Attaque contre la MINUSMA et Barkhane au Mali : Menaces réelles sur la présidentielle

Attaque contre la MINUSMA et Barkhane au Mali : Menaces réelles sur la présidentielle

Le compteur affiche le triste chiffre de 161 au chapitre des casques bleus décédés dans les bras du Mali, depuis le déploiement en 2013, de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA). Des statistiques macabres qui démontrent la violence dans laquelle vivent ces hommes et femmes venus de contrées différentes pour s’asseoir au chevet du grand Mali, malade de son hémisphère nord.

Mais les analystes affirment que le déluge de feu qui s’est abattu ce 14 avril sur le camp que la mission partage avec l’opération Barkhane à Tombouctou, alors que le soleil affichait l’après-midi sur la cime des dunes,  n’a pas encore eu de comparant jusque-là. Tirs de roquettes, véhicules-suicides et échanges de tirs ont tenu en haleine le ciel de la ville pendant quatre heures de temps, avant que les forces coalisées ne viennent à bout des terroristes. Bilan : un mort, le caporal de l’armée burkinabè Ibrahim Yamwéogo et une dizaine de blessés dans les rangs des casques bleus et de Barkhane. Voilà de nouveau, le pays des hommes intègres endeuillé, mais au-delà, cette estocade sanguinaire des assaillants, montre désormais une témérité à tout crin, (telles les attaques de l’ambassade de France et l’état-major général des armées à Ouaga le 2 mars dernier), une volonté d’en découdre, et un objectif encore inavoué : les élections maliennes.

Le mode opératoire mérite qu’on s’attarde dessus. Pendant que des tirs de roquettes et d’armes à feu pleuvaient sur le camp, des assaillants ont essayé de s’infiltrer, déguisés en casques bleus dans ledit casernement. Des véhicules chargés d’explosifs, deux, étaient estampillés, l’un aux couleurs de l’armée malienne et l’autre, avec le signe N.U, appartenant aux Nations unies. Comment cela a-t-il été possible ? Y a-t-il des taupes à la MINUSMA ou  au sein de l’armée malienne ?

Ou faut-il mettre cette ruse militaire sur le compte du génie malfaisant des terroristes, qui s’offrent le luxe de copier les tenues de guerre de leurs ennemis ? Ce dernier argument gagnerait à être vérifié. Le cas échéant, c’est une information qui s’avère grave pour l’intégrité de la MINUSMA. En tous les cas, ce serait idéal que les mesures de sécurité soient renforcées de façon draconienne, pour éviter d’éventuelles catastrophes.

En attendant, les regards sont également tournés vers les garde-fous qui auraient dû éviter cette situation au Nord-Mali. Il s’agit d’abord, de l’Accord d’Alger dont l’application ne semble pas produire des effets bien palpables. Faut-il se résigner à accepter que les youyous poussés en 2015, n’ont été que des agréments d’une locomotive poussive qui n’a pratiquement bougé de son lieu de départ et s’est grippé, après avoir émis quelques toussotements, suffoquée. Et même qu’il y a à peine un mois un additif à cet accord, a encore été signé par les frères ennemis maliens.

Le deuxième élément est la tournée effectuée par le Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maïga, le 23 mars 2018, dans le septentrion et le Centre du pays. Ses atterrissages, puis ses décollages sans encombre ont eu le goût d’une prouesse, d’une victoire et d’une promesse pour le chef du gouvernement malien. Cela a effacé du même coup, l’arrière-goût amer de la visite fiasco de Moussa Mara, en mai 2014, qui avait tourné à un affrontement entre les forces armées maliennes et les groupes armés, au détriment des premières. Les sourires et les poignées de main franches qui ont émaillé la tournée du 23 mars 2018, avaient donné de l’espoir quant à un lendemain plus encourageant au Nord du pays. Mieux le chef du gouvernement n’a eu de cesse d’insister sur cette date du 29 juillet 2018, qui sans être gravée dans le marbre de la constitution, sera tenue.

Mais le déluge de feu qui s’est abattu sur Tombouctou remet tout cela en doute. Et surtout, il souffle des nuages gorgés d’orage sur l’élection présidentielle prévue dans quelque trois mois au Mali. Comment dans ces conditions des élections pourraient se tenir sur toute l’étendue du pays d’Ibrahim Boubacar Kéïta ? Les Maliens pourraient aller aux urnes à Bamako. Mais le président qui sera élu pourra-t-il se présenter comme étant le premier magistrat des habitants de Kidal, Gao ou Tombouctou car il risque de ne pas y avoir vote ? Electeurs, membres de bureaux de vote se sentiront-ils en sécurité ? Comment ouvrir des urnes, la peur au ventre ? Car, à l’allure où vont les choses, il serait périlleux de parier sur une élection qui se déroulerait sans encombre au Nord du pays et même au centre. Et les katibas djihadistes n’ignorent pas cet état de  fait d’où cette situation kafkaïenne qu’ils multiplient à l’approche de cette échéance cruciale, sachant par exemple, que la sécurisation des élections fait partie du mandat de la MINUSMA

Sans vouloir jouer les oiseaux de malheur, il est important que les armes s’éloignent, lorsque la voix de la démocratie prend la parole. Le cas échéant, on se dirige vers une division encore plus prononcée du grand Mali. Et le Mali d’abord ! Le leitmotiv d’IBK risque de se muer en «Le Mali dommage !». Malheureusement.

Ahmed BAMBARA

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