Le Syndicat national des travailleurs de l’agriculture était face à la presse, ce jeudi 21 juin 2018, à Ouagadougou, pour contredire l’affirmation de leur ministre de tutelle, Jacob Ouédraogo, selon laquelle les agents de l’agriculture ont refusé d’assurer la distribution des semences et intrants subventionnés, aux agriculteurs. Selon le secrétaire général du syndicat, Der Richard Somé, les agents n’ont jamais refusé la distribution des intrants, mais ont plutôt posé depuis mai 2017, des préoccupations sur la sécurisation des intrants et équipements agricoles et les conditions de la mise en œuvre de l’activité, ce qui n’a pas été respecté.
Le résultat prévisionnel attendu en céréales pour la campagne humide 2018 – 2019 est estimée à 5 800 000 tonnes. Une des actions-phares de la politique agricole du Ministère de l’agriculture et des aménagements hydrauliques (MAAH) est la subvention et la disponibilité des intrants aux producteurs. Ainsi, l’accompagnement prévu pour cette campagne humide est composé de 7 000 tonnes de semences sèches contre plus de 90 000 tonnes de besoin, 16 000 tonnes d’engrais contre plus d’1 million de tonnes de besoin, 1 150 000 boutures, 27 200 unités d’équipements agricoles, 5 200 outils de vulgarisation, 10 500 animaux de trait. Ces dotations représentent moins de 10% du besoin.
«Depuis 2008, l’opération de distribution des intrants agricoles à prix subventionné connaît des remous dans sa gestion souvent liée aux humeurs des autorités du MAAH», a déclaré le secrétaire général du Syndicat national des travailleurs de l’agriculture (SYNATRAG), Der Richard Somé. De ses explications, au début, l’activité avait été confiée aux agents de l’agriculture qui ont assuré la gestion sans frais de carburant ni frais de communication. De 2009 à 2011, le ministère a confié la distribution aux collectivités locales et le bilan a été désastreux. L’année suivante, il s’est tourné vers les agents et ce, jusqu’en 2013, année à laquelle l’opération a fait l’objet de contrat entre l’état, l’AGRODIA et la COCIMA, deux structures privées qui étaient payées pour la mission. Là encore, le bilan a été calamiteux. En 2015, ce sont encore les agents de l’agriculture qui sont appelés à la rescousse.
A en croire le SG du syndicat, les travailleurs ont demandé au ministère de les mettre dans le minimum de conditions pour le travail. il a poursuivi qu’ils étaient tombés d’accord sur :
la question de la sécurisation des magasins. En effet, un des agents de la Boucle du Mouhoun qui a été victime de vol, a par la suite été traduit en justice par son directeur régional. Cela veut dire que la distribution de ces intrants est source d’insécurité pour les agents. C’est ainsi que les travailleurs ont demandé au ministère, la sécurisation des magasins, chose qu’il a accepté, en promettant le recrutement de gardiens avant le début de la distribution.
«Nous avons demandé de quoi communiquer pour une bonne exécution de l’activité. Là encore, le ministère a promis d’échanger avec le MINEFID pour la faisabilité. Mais à notre grand étonnement, le SG du Ministère de l’agriculture, lors de son passage à la RTB le 30 mai 2018, a considéré cette revendication déjà approuvée par le MAAH, comme un fonds commun», a soutenu le porte-parole du SYNATRAG.
De ses dires, pendant longtemps, les agents se sont sacrifiés pour mener cette activité et à partir du moment où le ministère a reconnu les efforts fournis par les agents, il doit les mettre dans des conditions acceptables de travail.
Opération budgétivore et détournement d’instants
Le MAAH a un nouveau mécanisme et de celui-ci, il ressort que la subvention vise essentiellement, les producteurs vulnérables. Cependant, «pour satisfaire les 351 commissions départementales, le nouveau mécanisme a prévu un kit de semences et un sac d’engrais, pour chaque membre, ce qui coûtera plus de 57 millions, au titre des récompenses en nature et de la sensibilisation qui coûteront encore des millions», foi de Der Richard Somé. Pour lui donc, c’est un détournement massif de 105 tonnes d’engrais, 31 tonnes de semences au profit de membres de la commission, au détriment de plus de 1050 producteurs vulnérables. Les conférenciers ont souligné que les intrants et semences subventionnés sont destinés aux agriculteurs indigents et de leur avis, c’est un détournement que de donner un kit comprenant des semences et de l’engrais subventionnés aux membres de la commission de distribution, composée de maires, préfets, etc.
Le SYNATRAG, tout en déplorant les mesures insuffisantes prises pour parer à la situation d’insécurité alimentaire qui sévit dans notre pays, s’est inquiété également de la présence confirmée de la chenille légionnaire d’automne qui a fait des ravages, pendant la campagne 2017 – 2018.
Aline Ariane BAMOUNI


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