La réaction n’aura pas tardé. Moins de vingt-quatre heures après l’annonce par le Procureur près le Tribunal de grande instance d’Abidjan de la mort de l’activiste burkinabè Alain Christophe Traoré dans sa chambre de détention, les autorités burkinabè ont exprimé leur indignation face à ce qu’elles qualifient « d’assassinat ».
Dans un premier temps, c’est le chef de la diplomatie du pays des hommes intègres qui a donné le ton en convoquant ce lundi 28 juillet 2025, la chargée d’affaires de l’ambassade de la Côte d’Ivoire à Ouagadougou. Le message de Tiémoko Jean-Marie Traoré est fort et sans filtre. Pour le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération régionale et des Burkinabè de l’Extérieur, « Il y a beaucoup de mépris, un manque d’égard et de courtoisie pour les autorités et le peuple burkinabè, et ça l’est encore plus pour la famille du défunt qui découvre une nouvelle aussi douloureuse sur les réseaux sociaux ». Il a confié que les autorités burkinabè n’ont pas été officiellement notifiées du décès de l’activiste. Karamoko Jean Marie Traoré a indiqué à la Chargée d’affaires de l’ambassade de la Côte d’Ivoire que les Burkinabè veulent recevoir le corps de leur compatriote. Il a donc exigé le rapatriement du corps. « Etant donné qu’il a été déchu de la nationalité ivoirienne, il reste un Burkinabè et nous voulons recevoir le corps de notre compatriote ici au Burkina Faso », a-t-il exigé.
Quelques heures après, c’était au tour du ministre porte-parole du gouvernement burkinabè de dénoncer les circonstances obscures du décès de Alain Christophe Traoré alias Alino Faso. Tout en exprimant sa consternation et sa profonde indignation, le gouvernement du Burkina Faso regrette que jusqu’à cet instant précis aucune notification officielle ne lui a été faite par les autorités ivoiriennes sur la mort en détention de l’activiste. « Ni la famille de Alain Traoré, ni son avocat, ni l’Ambassade du Burkina Faso en Côte d’Ivoire n’ont été avisés sur ce qui est présenté dans le communiqué en question comme un suicide », explique le ministre Gilbert Ouédraogo.
Du reste, le gouvernement burkinabè s’étonne que le drame se soit produit dans une école de gendarmerie et dans ces circonstances alors même que le Porte-parole du Gouvernement ivoirien s’était évertué à nier les pratiques d’enlèvement forcé, d’exécution sommaire et de torture en Côte d’Ivoire, lors d’un point de presse en date du 15 janvier 2025. « Toutes ses déclarations d’intention sur la transparence et le respect des Droits humains contrastent paradoxalement avec la gestion ténébreuse de ce dossier soldée par la mort plus que suspecte de notre compatriote Alain Traoré »,
Tout en s’interrogeant sur les motivations réelles de la détention de l’activiste dans une caserne de gendarmerie plus de six (6) mois après son interpellation et sans procès, le gouvernement du Burkina Faso dit rejeter avec force et vigueur la thèse du suicide actuellement avancée par les autorités judiciaires ivoiriennes qui, selon lui, « ont brillé par une complaisance coupable face à l’arbitraire et au déni de justice dont a été victime Alino Faso dans cette affaire, depuis son interpellation le 10 janvier 2025 ».
Aussi, il condamne fermement cette disparition assimilable à un assassinat crapuleux et s’indigne de cette tentative manifeste de tronquer les faits. « En effet, alors que le décès aurait été constaté le jeudi 24 juillet, il a fallu 72 heures pour que l’information soit portée dans l’espace public sur la foi d’un communiqué du Procureur de la République près le Tribunal de première instance d’Abidjan dont l’authenticité était difficile à établir », a déclaré le ministre de la Communication.
Pour terminer, le Gouvernement exige des autorités ivoiriennes le rapatriement sans délai du corps de notre compatriote Alain Traoré pour des obsèques dignes et honorables et les interpelle sur l’exigence de vérité et de justice pour Alain Christophe Traoré dont la mort tragique laisse une famille endeuillée dans une douleur incommensurable et des millions de ses compatriotes révoltés et sans voix. « La mort de Alino Faso ne restera pas impunie », assure le gouvernement burkinabè.
Rappelons que Alain Christophe Traoré était en détention provisoire depuis le 10 janvier 2025 pour « intelligence avec des agents d’un Etat étranger de nature à nuire à la situation militaire ou diplomatique de la Côte d’Ivoire ou à ses intérêts économiques essentiels, « complot contre l’autorité de l’Etat, diffusion de nouvelles fausses de nature à entraîner une atteinte au moral de la population », « rassemblement des renseignements de nature à nuire à la Défense nationale dans l’intention de les livrer à un Etat étranger et espionnage ».
Lire la déclaration in extenso du porte-parole du gouvernement dans la parution du jour


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