Les premiers responsables du CNSP ont-ils été touchés par la grâce, ou se sont-ils résolus à agir au cas par cas, selon le médiateur, son origine et son mandant ?
Alors que certains émissaires de la CEDEAO ont été quasiment éconduits dès l’aéroport de Niamey sans avoir eu une oreille audible à leur médiation, le début du week-end écoulé, notamment jeudi, d’autres envoyés spéciaux ont rencontré des personnalités des putschistes de Niamey : c’est le cas du chef Inzala du Nigeria, un guide d’un mouvement religieux d’inspiration salafiste, avec plusieurs membres qui ont rencontré le président du Nigeria Bola Tinubu, avant de mettre le cap sur Niamey, où ils ont pu rencontrer le nouveau premier ministre, Ali Lamine Mahaman Zeine. Objectif : trouver une solution pacifique à la grave crise que vit le Niger, suite au coup d’Etat du 26 juillet 2023.
Le CNSP semble avoir été un peu attentif à cette dernière médiation en date, ce qui constitue une subreptice avancée. Même s’il ne faut pas trop rêver. En outre, le célèbre reclus de la présidence nigérienne, son ex-locataire, le président Mohamed Bazoum a pu effectuer un cheik up médical avec son médecin et bien se sustenter, (son fils Salem de 22 ans aussi) une première depuis le putsch à telle enseigne que sa fille Zazia a alerté dans le journal anglais The Guardian que la situation était critique pour son père. Autant de signes que la porte de la diplomatie n’est pas cadenassée à double tour ? Oui et non !
Oui, car les tombeurs du président élu savent qu’ils ont pris le pouvoir par les armes, mais rien n’est réglé et le Niger ne peut pas se mettre à dos tout le monde (politique et religieux, surtout chez le puissant voisin le Nigeria).
Non, car personne n’est dupe. En même temps qu’on négocie, et que pointent quelques embellies, la menace d’une intervention est toujours pendante, même si de moins en moins certains y croient, surtout que ceux-là même qui doivent la mettre en musique, les chefs d’état-major des armées, n’ont pas pu se réunir à Accra, la dernière fois.
Cependant, cette option reste de mise. Sans oublier qu’on n’a pas pu lever le Nihil obstat ( objection) du parlement de la CEDEAO d’où on observe des divergences sur l’envoi de ce corps expéditionnaire au Niger. Car les pays n’ont pas trouvé un point d’accord pour cette intervention. Alors que ça grenouille dans certains états-majors avec des militaires mobilisés pour ça.
Là où on doit trouver peut-être quelques explications à une posibilité que de petites lignes bougent, ce sont les dures sanctions qui pèsent sur le pays, depuis le 31 juillet dernier.
«Allez dire au président Bola de lever les sanctions contre nous, c’est dur», a lâché le premier ministre nigérien au chef Inzala, et ce n’est ni un plaisir, ni un oxymore premier ministériel, mais les Nigériens ont vraiment chaud : Entre la Douane et les Impôts, les 2 mamelles du Trésor public qui ne font plus de recettes, les banques en manquent de liquidité, les salaires, les pécules et les bourses des étudiants qui ne seront pas payés, les produits de première nécessité dont les prix flambent, malgré un coup de main du Burkina Faso qui a autorisé des exportations de céréales au Niger, sans oublier le carburant, l’électricité coupée par le Nigeria, et l’inflation qui culmine autour de 30%, le CNSP sait qu’il doit savoir agir avec tact. Et à y voir de près, ces sanctions dont les civils sont les premières victimes, constituent une arme plus efficace et plus dissuasive que l’hypothétique intervention militaire. A cela, groggy dès les premières semaines, les pro-Bazoum et le PNDS ont commencé aussi à donner de la voix hier avec des manifs à Niamey et Zinder pour un retour à l’Etat de droit, à la libération de «l’otage» Bazoum.
Reste tout de même des «incertitudes : où va le Niger ? Quelle est sa géolocalisation politico-militaire ? Si solution diplomatique, il devait y avoir, va-t-on remettre Bazoum sur selle. Ce dernier va-t-il in fine signer sa démission ? Vers une transition civilo-militaire, sans objet car les 21 membres du gouvernement sont quasiment tous des soldats ? Une intervention est toujours dans les tuyaux, mais les putschistes menacent de tuer Bazoum dans ce cas ! Véritable quadrature du cercle au Niger et difficile de trouver le fil d’Ariane pour démêler l’écheveau.
Zowenmanogo Dieudonné ZOUNGRANA


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