Tshisekedi confirmé président en RDC : Fayulu débouté, l’UA humiliée par la Cour constitutionnelle

Tshisekedi confirmé président en RDC : Fayulu débouté, l’UA humiliée par la Cour constitutionnelle

En RDC, les instituions de la République adorent bien la nuit au ciel festonné d’étoiles ou couvert de nuages pour certaines décisions nationales, voire cruciales. Dernier en date, la CENI et la Cour constitutionnelle, avec les élections du 30 décembre 2018.

Pour bien faire les choses, on fait appel à la compagnie de la nuit en République démocratique du Congo. Ainsi, c’est dans la pénombre du soleil couché du 9 au 10 janvier 2019 que la Commission électorale nationale indépendante avait proclamé les résultats de la présidentielle. La Cour constitutionnelle a également attendu que les poules s’emmitouflent dans les bras de Morphée pour rejeter ce samedi 19 janvier les recours de Martin Fayulu et confirmer la victoire de Félix Tshisekedi. Les recours de l’opposant ont été bien été reçus. Mais ils ont été jugés non-fondés et par conséquent, àa proclamé Félix Tshisekedi président élu de la RD Congo qui devient chef d’Etat de fait et de jure à partir de ce 20 janvier 2019.

Les reproches faits au champion de Lamuka par la juridiction électorale suprême ? Pas de preuves pour soutenir le lourd poids de ses accusations et de ses réclamations, dont notamment un recomptage des voix. La Cour constitutionnelle lui a opposé une fin de non-recevoir, courte et nette. Envolés les 61,37% que revendique le porte-étendard du G5, des JP Bemba, Moise Katumbi et Cie, ignorée la posture de la CENCO qui a mots à peine couverts désignait Martin Fayulu comme celui qui a été oint par ses compatriotes.

Mais ce n’est pas seulement à Martin Fayulu que la juridiction suprême a fait ce pied de nez. La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) allait prendre la même raclée si elle n’avait pas effacé ses demandes (recomptage des voix et formation d’un gouvernement d’union nationale) pour les remplacer par des félicitations de «l’élu de la CENI» et un appel à la sagesse et à l’union des acteurs politiques et des Congolais. Il n’est pas jusqu’à l’UA qui n’ait reçu cette humiliation par cette haute juridiction congolaise, pour ne pas dire par le pouvoir sortant. Une nique d’autant plus accentuée, que déjà l’Afrique du Sud a reconnu l’élection de Tshisekedi, une position pas anodine, qui sape encore les bases de la solidarité de l’organisation continentale, une fragilisation que tente de minimiser en vain, la porte-parole de l’UA, Ebba Kalondo.

Cette baffe de la Cour Constitutionnelle, cette gifle, Paul Kagamé, le pointilleux président en exercice de l’Union africaine (UA) et ses pairs l’ont bien sentie passer. Elle a été si retentissante qu’ils ont annulé dare-dare la mission qui devrait atterrir à Kinshasa ce 21 janvier 2019. Voyant sans aucun doute que tant le président sortant Joseph Kabila que le nouveau Chef d’Etat Félix Tshisekedi allaient leur rire au nez après la proclamation des résultats par la Cour constitutionnelle, ils ont préféré économiser temps et énergie et s’en remettre au laconique communiqué de la Commission de l’UA qui prend  acte et appelle les Congolais à «la préservation de la paix et de la stabilité ainsi qu’à la promotion de la concorde nationale».

Evidemment ! Que pouvait-elle dire d’autre ? Les chefs d’Etat au sommet ont demandé à la RDC de suspendre la proclamation des résultats parce qu’ils ont émis sans équivoque des doutes sur la réalité de la victoire de Félix Tshisekedi. Et la mission «spéciale» qui a été dépêchée pour Kinshasa n’allait certainement pas tenir un discours qui résonnerait comme une sérénade aux oreilles de Joseph Kabila ou de Tshisekedi. Voilà pourquoi et sans aucun doute, la Cour constitutionnelle a proclamé avec autant d’empressement les résultats, coupant l’herbe sous les pieds des «pairs» du nouveau président de la RDC.

Qu’est-ce que ces derniers peuvent faire désormais contre ce qu’ils considèrent comme une usurpation du pouvoir ? Contre ce «coup d’Etat électoral» selon l’expression de Fayulu ? Pas grand-chose à l’évidence. Que peut faire la communauté internationale devant des résultats proclamés par les institutions républicaines de la RDC et dans les règles de l’art, sans faire preuve évidemment d’une grave ingérence dans les affaires internes d’un pays et d’une violation flagrante des règles de la bienséance et de la souveraineté ? Le piège confectionné, si piège il y a, a donc bien marché et la «souris» ici est impuissante et y est tombée dedans. A la vérité et bien qu’après l’UA, l’UE et d’autres voix se soient jointes au chœur de réprobation, sur la vérité des urnes, la communauté internationale sera obligée in fine d’accepter cette alternance volée ou piégée, mais alternance tout de même. Idem pour les Congolais qui feront du raffut, à l’appel de Lamuka, mais sans trop, car pour bon nombre d’entre eux c’est un opposant qui a gagné, un opposant «vendu», stipendié peut-être, mais un opposant tout de même, qui a profité de l’usufruit politique paternel.

Les questions qui taraudent à présent sont : les Congolais répondront-ils aux appels à manifester de Martin Fayulu, qui se considère comme le «seul» vrai gagnant de cette présidentielle, à l’image d’un certain Jean Ping du Gabon ou d’un Alassane Dramane Ouattara en Côte d’Ivoire, il y a quelques années ? Autrement dit, la «gâchette de l’Afrique» sera-t-elle le Gabon de 2009 ou la Côte d’Ivoire de 2010 ? Pas si sûr, car apparemment après 40 ans de Mobutisme, 20 ans de Kabilisme père et fils les Congolais  préfèrent cette alternance bancale qu’ils pourront améliorer au fil des années que de plonger le pays dans l’abîme. Et  à bien voir, entre le  vrai ou faux mauvais arrangement entre Tshisekedi et Kabila et un embrasement de la RDC, quel choix irait le mieux pour les intérêts du peuple congolais ? La réponse va de soi, même si c’est hélas aussi pour les Congolais .

Ahmed BAMBARA

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