Ce n’est plus un secret, la Force paramilitaire russe Wagner s’installe au Mali. Alors Bamako fait le dos rond et refuse d’aborder officiellement la question, les barbouzes russes ont débuté leur déploiement. Et ce n’est ni par des sentiers tortueux du Sahel, mais par voie aérienne que se fait cette arrivée qui suscite des grincements de dents chez les partenaires occidentaux présents aux côtés du Mali depuis plus de 8 ans.
Après avoir dénoncé à la tribune de l’ONU (par la voix de son premier ministre Choguel Maïga) «un abandon en plein vol» suite au redéploiement de la Force Barkhane dans la zone des Trois frontières, le Mali a fait le choix de changer son fusil d’épaule face au terrorisme. En dépit des volées de bois verts envoyés par le président Emmanuel Macron appuyé de son chef de la diplomatie, Jean Yves Ledrian et de son ministre des Armées, Florence Parly, Wagner prend ses quartiers au Mali. Et depuis 48 heures, les mouvements aériens sur l’aéroport de Bamako indiquent que les choses sont très avancées.
La réaction ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué commun, le Canada et 14 pays d’Europe, dont la France, estiment que le déploiement du groupe Wagner ne peut qu’«accentuer la dégradation de la situation sécuritaire en Afrique occidental». «Nous regrettons profondément la décision des autorités de transition maliennes d’utiliser des fonds publics déjà limités pour rétribuer des mercenaires étrangers au lieu de soutenir les forces armées maliennes et les services publics au bénéfice du peuple malien », indique le communiqué des 15 pays signataires.
Ceux qui croyaient à un coup de bluff de la junte malienne pour contraindre la France à reconsidérer ses positions se sont trompés. Après huit ans de coopération mi-figue mi-raisin, Assimi Goïta et ses hommes semblent déterminés à tourner la page Barkhane et par extension Takuba pour faire place à l’épisode Wagner. Désormais donc, l’ex-Soudan Français ne sera plus exclusivement une chasse-gardée de la France. Il faudra compter avec la cavalerie russe qui s’est glissée entre les mailles du filet de la lutte contre le terrorisme pour se faire une place dans cette partie du continent.
A coup sûr, la cohabitation s’annonce difficile voire impossible, mais comment vont réagir les 15 pays d’Europe, la France en tête face à ce déploiement massif des mercenaires de Wagner ?
La Force Barkhane qui opère sa mue pour devenir Takuba va-t-elle remballer ses affaires pour quitter le pays ou fera-t-elle contre mauvaise fortune bon cœur et poursuivre sa mission au Sahel ? Délicate question pour la France et les 14 qui font face à un dilemme cornélien dans ce qui pourrait s’apparenter à un bourbier. Ce jeu d’échec martial qui a cours au Mali sera déterminant pour le reste des pays du G5 Sahel (notamment le Burkina Faso et le Niger) durement éprouvés par les assauts sanglants des groupes armés terroristes depuis bientôt 7 ans.
Davy Richard SEKONE
COMMENTAIRES