Deux leçons se dégagent à ces élections locales ivoiriennes du 13 octobre 2018 : premièrement, c’est un tour de chauffe avant la présidentielle de 2020 qui a redessiné la carte électorale de la terre d’Eburnie. Les 6,5 millions d’électeurs qui devaient se choisir 200 maires et 31 conseillers régionaux et selon les résultats provisoires livrés hier à dose homéopathique par la Commission électorale indépendance (CEI), ont ainsi voté: le RHDP se taille 41 sièges, et 21 communes, talonné par les Indépendants, 14 postes, et le PDCI, ferme la marche avec six sièges. On ne sait pas d’abord si le FPI, modéré, tendance Affi N’Guessan présent dans six communes, a pu grappiller quelque chose, mais toujours est-il qu’il peut être satisfait par procuration ayant supporté quelques indépendants.
Justement, cette percée des indépendants, est un indicateur fiable que les cartes sont définitivement rebattues en Côte d’Ivoire, à deux ans de la présidentielle 2020. Il est bien vrai que le RHDP que d’aucuns appellent le RDR-bis, avec ses partis croupions ont raflé la mise, notamment à Bouna, Tengrela, Boundiali, Guiglo, et surtout Abobo, où son emblématique représentant, Hamed Bagayoko, a battu, l’Indépendant Tehfour Koné, mais le fait que ces indépendants se positionnent comme la 2e force politique du pays, électoralement parlant, est le signe patent que beaucoup de choses vont se «gnangmé» avant 2020. Sur les 400 représentants à ces compétitions électorales, les Indépendants ont confirmé, toute l’importance qu’on leur a accordé depuis les législatives de décembre 2016. Sur les 255 députés que compte l’hémicycle ivoirienne, les Indépendants ont 76, et poussaient déjà à l’époque à la roue le RHDP avec ses 167 réélus.
Le PDCI, en dépit de ses querelles internes, faites d’exclusions, de bravades, n’a pas à rougir, puisqu’il engrange aussi à ces locales des sièges tels ceux de Toulepleu, Grand-Laou, Alépé, ou Dabou. Malgré la migration vers la mangeoire de la douzaine de ministres et bien d’autres personnalités l’ex-parti unique présent sur 1 commune sur 2 et sur les 2/3 des régionales ne sera pas ridicule à ces scrutins
Deuxième enseignement : l’atmosphère qui était à couper à la machette à ces présentes élections, malgré la présence de 30 000 securocrates (gendarmes, militaires et policiers) augure une vue d’ensemble de ce que pourrait être 2020 multiplié au centuple.
Ce 13 octobre 2018, des voitures ont été caillassées et brûlées, un homme est mort à Bediala, des marcheurs ont été gazés… on s’est toisé méchamment. Désormais en Côte d’Ivoire, il y a l’ambiance d’une guerre feutrée qui peut évoluer rapidement en affrontements urbains, car les rancœurs ne sont pas tassées, il y a comme une soif inextinguible de revanche, pour ne pas dire de vengeance, bref, la réconciliation manquera cruellement aux Ivoiriens en 2020.
Les épousailles RDR-PDCI, célébrées en grande pompe en 2011, se sont terminées 7 ans plus tard par un douloureux divorce, entre Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara. Qu’on ne s’y trompe pas donc : en 2020, le PDCI aura son candidat, telle est la volonté du Pater familia de Daoukro, le RHDP ou ce qui en tient lieu aussi le sien, Hamed Bakayoko ou Amadou Gon Coulibaly ?
Reste l’équation Guillaume Soro : mais est-ce vraiment une, car au regard de son soutien, pas du tout anodin, à des candidats indépendants, l’actuel président de l’Assemblée nationale, affiche de plus en plus ses positions, et ce ne serait pas une surprise s’il officialisait sa candidature pour la présidentielle de 2020.
Le FPI quant à lui, à moins d’une libération de Gbagbo pourrait rejoindre le PDCI, les vieilles amours ont la vie dure. C’est dire que ce sont des alliés, voire des amis d’hier, qui pourraient s’affronter en 2020, et ayant en lame de fond, un désir d’en découdre pour solder certains comptes. Avec comme certitude que la Côte d’ivoire d’avant 2020, et surtout en 2020, aura un ciel gorgé de tous les dangers . UNE
Sam Chris
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