Remaniement ministériel en Côte d’Ivoire : Ouattara continue à émonder son équipe pour le 31 octobre

Remaniement ministériel en Côte d’Ivoire : Ouattara continue à émonder son équipe pour le 31 octobre

La maladie à coronavirus n’a pas été un obstacle à l’engrenage de la vie politique sur les rives de la lagune Ebrié. La Covid-19 a beau faire tousser, les brumes qu’il fait dégager ne suffisent pas à …gripper la machine électoraliste. Car 2020 arrive et à grands pas. Il faut donc faire vite et bien, le 31 octobre c’est déjà demain.

Et en restant vissé à sa chaise ce fameux 12 mars 2020 au moment où tout le monde se levait pour acclamer le candidat désigné par Alassane Dramane Ouattara pour tenter de remporter la présidentielle de 2020, le ministre de l’Enseignement supérieur d’alors, Albert Mabri Toikeuse savait désormais son sort scellé.

Il avait par ce geste, clamé à tout le moins son opposition au choix de Amadou Gon Coulibaly (AGC), et au plus, sa volonté d’être calife à la place. Avec le léger remaniement du 13 mai 2020 (soit deux mois après cet épisode), le président de l’Union pour la paix et la démocratie en Côte d’Ivoire (UDPCI) devra donc aller se prévaloir de ses ambitions ailleurs que sous l’auvent du  RDHP. Il faut donc reconnaître que les jours du patron de l’UDPC étaient comptés, lui qui avait accepté de mauvaise grâce, le choix d’AGC le 12 mars dernier comme le candidat du parti unifié. Mais il y a autre chose : un Toikeuse dont les militants poussaient à se dévêtir de cette camisole de force qu’est le RHDP pour se présenter à l’échéance de fin octobre, pouvait-il faire autrement ?

Le célèbre Yacouba de Côte d’Ivoire n’en est d’ailleurs pas à son premier clash politique avec Ouattara puisque lors du premier mandat, il avait fait un va-et-vient dans l’équipe ministérielle pour d’autres divergences.

Un Albert pouvant en cache un autre surtout un Albert pouvant en remplacer un autre. La bagarre entre Albert Mabri Koikeuse et Albert Flindé est de notoriété publique, et si le président Ouattara a mis du temps à arbitrer, c’est qu’il a longtemps espéré que le désormais ex-ministre de l’Enseignement supérieur Toikeuse, allait finalement faire chorus derrière sa décision de jeter son dévolu sur Gon Coulibaly. Las ! Le n°1 ivoirien a manifestement fait sien cet adage de son compatriote Balla Kéita (tué à Ouaga) ancien ministre qui disait «un pied dehors, un pied dedans, c’est dehors». Toikeuse était dans ce grand écart, intenable.

Première leçon de ce lifting gouvernemental : bien que loin de la Côte d’Ivoire au bord de la Seine, en convalescence, Amadou Gon Coulibaly tient toujours son gouvernement dont il est le primus inter parés. C’est d’ailleurs après une visioconférence avec le président Alassanne Ouattara, que ce dernier a tourné un peu manège. Le chef du gouvernement, c’est toujours lui, pour qui en doutait.

Mais le président ivoirien a voulu également en opérant ce jeu de chaises musicales réaffirmé que le valétudinaire qui a fait son checkup à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière reste et demeure le cornac du RHDP pour la présidentielle dans 5 mois.

Un message que n’ont pas semblé entendre Amon Tanoh, qui a quitté le navire gouvernemental le 17 mars 2020 et maintenant Albert Mabri Toikeuse.

La seconde leçon de cette pichenette ministérielle est que Ouattara ouvre tous les fronts qui peuvent nuire à son ambition du 31 octobre. Et il n’y avait pas que Soro qui est dans son viseur.

Tous  ceux qui ont des velléités ou qui contestent sournoisement ou ouvertement le cap du 31 octobre tel que campé par Ouattara, passent à la trappe.

Alassane Dramane Ouattara affine par conséquent la lame de l’épée qu’il compte brandir à la conquête du fauteuil présidentiel. Et aucune opposition ne semble être tolérable à ses yeux. La preuve, il a fait pleuvoir sur son «fils  spirituel», Guillaume Kigbafori Soro, un déluge de «problèmes» au point que celui est obligé de courir autour de son pays sans pouvoir y entrer, comme un lion éloigné de sa tanière par un cercle de feu. Les adversaires qui sont  à l’intérieur et qui viendraient à vouloir manifester des intentions similaires sont prévenus à peu de frais.

Mais en même temps, en défenestrant Toikeuse au profit du maire de Man, Ouattara se sépare d’un allié et quel allié ! Electoralement, Toikeuse est un poids lourd, ce n’est pas pour rien qu’il était vice-président du RHDP ! Et à ce rythme, on pourra constater que de parti unifié, le RHDP, se réduit comme peau de chagrin et se rétrécit pour finalement redevenir le RDR tout simplement avec des transfuges, certes du PDCI, et d’autres partis, mais élagué des poids lourds politiques.

C’est un risque que Ouattara prend, calculé ? On n’en sait rien mais il n’ignore pas qu’un parti politique n’a jamais étrenné la présidence en solitaire depuis la disparition d’Houphouët-Boigny en 1993. C’est soit le ticket RDR+FPI ou RDR+PDCI.

Reste à savoir si cette stratégie qui consiste à élaguer et  à éloigner les contestataires va porter les fruits escomptés par le locataire du palais présidentiel. La météo politique ivoirienne n’a pas fini de passer de la grisaille à l’embellie, et d’ici le 31 octobre, elle nous réserve bien des surprises.

Ahmed BAMBARA

 

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