Le caricaturiste Glez a cette année 2024 gratifié ses confrères burkinabè d’un dessin et avec le thème : «Ne brisons pas le rempart : alerte sur la mise à mort du journalisme» qui campent à eux seuls l’existant des médias au pays des hommes intègres ! A l’occasion de cette 27e Journée nationale de la liberté de la presse au Burkina Faso, un regard rétrospectif et surtout présentiel met sous une lumière crue, un métier qui vit un problème existentiel dû à plusieurs raisons dont la moindre n’est pas cette crise sécuritaire qui tenaille le Burkina depuis bientôt une décennie.
L’hydre terroriste ne laisse guère le choix et si dans la guerre classique la communication est toujours régulée, dans celle hybride, elle l’est encore davantage. Injonction est donc faite aux médias burkinabè, de distiller les informations, et voilà les journalistes écartelés entre déontologie, questions casuistiques et patriotisme !
La loi d’airain du journaliste en période de guerre, est qu’il doit tremper sa plume ou tourner sa caméra dans la tempérance, mais toujours garder à l’esprit l’intérêt supérieur de la Nation.
Et voici les médias burkinabè confrontés à un journalisme à géométrie variable, qui divise la profession et très suivi aussi par les autorités militaires : dans ce Faso en proie au terrorisme, le journaliste doit-il tout dire ?
C’est la question nœudale que la Loi sur la Mobilisation a réglé en partie, mais qui demeure au cœur de la pratique de la profession ballotée entre la sacralité des faits et les lois en temps de guerre, et encline à une autocensure qui ne dit pas son nom, l’attitude normale restant celle de la prudence et de la responsabilité. Pour autant, la liberté de la presse dans ce contexte d’exacerbation de la lutte anti-terroriste doit in fine se lire à l’aune des contraintes de cette lutte !
Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ! La liberté de la presse actuellement se met au service de la libération du peuple du joug terroriste ! Y a-t-il liberté aux confins de Djibo ou de la Gnagna ou entre Dédougou et Bobo où d’intrépides défenseurs de la liberté à savoir 2 jeunes avocats (Constant Somé et Christian Kaboré) ont été brutalement enlevés par des groupes terroristes ?
Mais dans cette posture, il y a un vide pesé au trébuchet qu’occupent nos confrères de la Toile, dans le douillet confort de l’anonymat et de l’irresponsabilité lesquels confrères ruent dans les brancards. Au demeurant, beaucoup d’ennuis de la presse burkinabè proviennent de cet Infernet plutôt que des médias traditionnels.
Mais, il est aussi une autre lame des Parques qui scient la vie des médias : le problème financier. L’économie de guerre a décéléré toutes les activités, et face à la hausse des intrants (par exemple papier, calque, encre, matériels techniques), à l’absence de publicité et d’annonces, aux factures impayées par l’Etat et démembrements et aux charges incompressibles (salaires, loyer, électricité, téléphone, Internet…) mais aussi aux réguliers coups de boutoir des impôts et de la CNSS ainsi qu’aux sommations matinales des créanciers et banques, de nombreux confrères ont disparu ou mangent la vache enragée. C’est la clochardisation à coup sûr, et d’autres sont sur le point de mettre la clef à la porte.
Même si le journaliste vit son métier comme un sacerdoce, il n’a pas fait vœu de pauvreté, et il y a un viatique minimum, encore que c’est un travail qui peut et doit le faire vivre ! Hélas, Misère du journalisme ne peut produire que journalisme de misère pour paraphraser un éminent aîné, Mahamoudou Ouédraogo !
En toute sincérité, les médias burkinabè se meurent et sans une action de l’Etat qui est toujours l’Alpha et l’Oméga de l’économie, la catastrophe est certaine. L’observatoire Burkinabè des Médias (OBM) a rendu public son rapport 2024 ce week-end et dit que les journalistes font preuve de résilience et d’opiniâtreté. Certes, mais entre crises sécuritaire et financière, même l’apostolat professionnel et la résilience ne sauraient suffire à sa survie !
La REDACTION
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