28e sommet Afrique-France de Montpellier : Macron a réussi sa catharsis

28e sommet Afrique-France de Montpellier : Macron a réussi sa catharsis

Ce Nouveau sommet Afrique-France (NSAF) aurait pu s’intituler forum «Macron et les petits Sankara d’Afrique» tant on sentait que toutes les interventions des porte-paroles de ces jeunes du continent et de la diaspora avaient une tonalité des discours «du Guevara africain» dont le procès s’ouvre d’ailleurs ce matin 11 octobre à Ouagadougou. Avec une salle à Montpellier conquise qui vibrait d’ailleurs à l’unisson.

Entre la question de tripatouillite aiguë de constitutions dont sont atteints bon nombre de dictateurs soulevée par le Guinéen Aliou Bah, l’exigence d’un repentir de la France pour solde de compte colonial du sénégalais Cheick Fall, et l’injonction de la truculente malienne Adam Dicko, enjoignant la jeunesse africaine à «prendre ce qui est nécessaire pour l’Afrique» sans oublier, la «marmite sale de corruption, de paroles condescendantes, laquelle marmite doit être récurée» de la Burkinabè Eldaa Koama, c’est à un véritable défouloir-vérité qu’a consisté le plat de résistance de ce NSAF tenu à Montpellier, au-delà des panels et conférences.

On peut aimer ou non, mais c’était un dialogue sans filtre, un président d’une ex-Métropole, face à des jeunes de ces ex-colonies vivant en Afrique ou  en diaspora.

On peut même parier qu’aucun de ses homologues africains n’oseraient pareil exercice (sauf peut-être encore un Thomas Sankara !), et même si l’un d’eux s’y risquait, ses securocrates et autres gros bras videraient la salle à la moindre incartade de langage, et il pourrait même y avoir des arrestations pour outrage à chef de l’Etat.

Or, Macron, qui en tant que 1er président post-colonial, répondait de façon décomplexée, telle la réplique à Adam Dicko qui avait glissé sur ce terrain «sécuritaire et de la rupture entamée depuis par les jeunes», ce qui n’a pas laissé le choix à Macron de remettre une couche un tantinet agacé au sujet de la Transition malienne : «vous ne pouvez pas couvrir les propos de gens qui ne sont pas légitimes … Vous me prenez à partie, vous me bousculez, mais chacun doit faire sa part de boulot …». Bousculé, mais difficile de désarçonner Jupiter.

Encore une fois, on a vu un Macron qui excelle dans ce genre d’exercice. On l’a vu déjà à Ouaga le 28 novembre 2017, des étudiants croyants «coincer» un président français oublieux que c’est un maître de la communication, de la parole qu’ils avaient en face, cette «parole qui gouverne le monde» selon le docteur Cheick Omar Diallo, directeur de l’Ecole oratoire africaine du Sénégal.

Naturellement, il y a une sorte de «En même temps» et de «grand écart» auquel s’est adonné Macron, avec les cas du Mali et du Tchad par exemple car nul n’est dupe les règles de ce NSAF, c’est la France qui les a fixées, les jeunes c’est elle qui a les choisis, c’est la même France qui a décidé de faire rester les chefs d’Etat chez eux pour les remplacer par ces jeunes. Au nom de quoi Macron peut-il convier des jeunes à ce jamborée ? Jupiter n’échappe pas à ces griefs.

Ensuite, vu sous le prisme politique, à 7 mois de la présidentielle française, ce clin d’œil macronien fait à la diaspora binationale ne saurait passer inaperçu.

Enfin, dans un contexte de crises avec le Mali sur le dossier Wagner, et avec l’Algérie sur l’écueil mémoriel, Macron tente de transformer l’essai. Il sait que Achille Bembé a bien mâché le sujet, avec ses 13 propositions-phares avec entre autres la Maison des Mondes africains et de la diaspora, le Fonds de financement de la démocratie, quand bien même le site Médiapart épingle l’AFD au passage dans un récent numéro, sur certaines pratiques… Alors tout compte fait, on peut faire crédit à Macron d’avoir réussi sa catharsis à Montpellier d’autant qu’à l’heure où se déroule ce NSAF, se tient concomitamment un contre-sommet. Reste maintenant les actes !

En effet, ces jeunes ont parlé, mais les actes, ce sont les politiques qui le prennent.

Le terrorisme au Sahel, il faut des actions sur le terrain et là on ne peut que se tourner vers les chefs d’Etat, les décideurs, la question du Franc CFA, c’est eux, la gestion des deniers publics, c’est encore eux. Peut-être qu’au 29e NSAF, il faudra que les jeunes aient comme vis-à-vis les chefs d’Etat africains avec Macron comme modérateur, un sommet qui devra se dérouler dans une capitale africaine ! Pas en France !

Sam CHRIS

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