Affaire N’ Djim Kaou au Mali : Le CNT dit non à la justice

Affaire N’ Djim Kaou au Mali : Le CNT dit non à la justice

C’est un pied de nez que vient de servir le Conseil national de la Transition, à la Justice et aux autorités maliennes dans l’affaire Issa N’Djim Kaou. Hier jeudi 4 novembre 2021, l’organe législatif mis en place par les autorités militaires, a demandé la suspension des poursuites judiciaires et la libération de Issa N’Djim Kaou, quatrième vice-président de l’institution en attendant la décision du tribunal qui l’avait jugé pour «rouble à l’ordre public». C’est par une majorité éclatante, de 101 voix sur 121 votants que les députés de la transition se sont exprimés en faveur de la suspension des poursuites contre l’ancien porte-parole de Mahmoud Dicko.

Pour la première fois dans cette affaire qui défraie la chronique sur les rives du Djoliba, le Conseil national de la transition (CNT) a invoqué l’immunité parlementaire d’un des siens dans un document écrit, la délibération demandant la suspension des poursuites contre M. N’Djim.

L’attitude du CNT surprend dans la mesure où l’on sait que le parlement est contrôlé  majoritairement par les militaires. Il s’agit d’une grande première et une rare manifestation de dissension entre le CNT, installé en décembre 2020 sous étroit contrôle des militaires, et les autres organes du pouvoir, également dominés par la junte qui a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta en août 2020.

Rappelons que N’Djim a été l’une des figures de la mobilisation contre M. Keïta, qui avait précédé l’éviction de ce dernier. Connu pour son soutien au colonel Assimi Goïta, chef des putschistes et désormais président de transition, il s’est illustré ces dernières semaines par ses critiques contre le Premier ministre de transition, Choguel Kokalla Maïga, également intronisé par les militaires. Issa N’Djim Kaou a été arrêté le 26 octobre avant d’être inculpé  pour «incitation au trouble à l’ordre public et atteinte au crédit de l’Etat». Il a été jugé en flagrant délit le 29. Le Parquet lui reproche une série de déclarations diffusées depuis juillet sur les réseaux sociaux, notamment contre le gouvernement et le Premier ministre.

La justice n’a pas précisé publiquement la teneur des propos qui lui valaient d’être poursuivi. Dans un entretien accordé à la télévision d’Etat, le procureur Idrissa Hamidou Touré a évoqué «ses multiples sorties médiatiques dans lesquelles il s’adonnait à propager de fausses informations et des allégations mensongères, lesquelles portent atteinte au crédit de l’Etat, au crédit des institutions».

Avec cette décision, le parlement marque son territoire vis-à-vis des autorités de la Transition mais surtout avec la junte, qui semble vouloir régner en maître absolu sur toutes les institutions. Il s’agit aussi, d’un subtil rappel des règles élémentaires du droit constitutionnel, notamment  la séparation des pouvoirs, principe sacro-saint de la démocratie dont le respect permet d’éviter les intrusions et violations flagrantes.

A présent, même si le danger qui plane sur la tête de N’Djim Kaou reste imminent, il faut se féliciter de la décision du CNT de faire respecter le processus en la matière (c’est-à-dire la mise en accusation de son quatrième vice-président) pour éviter de laisser entrer le loup dans la bergerie. Du reste,  il n’est pas exclu qu’après Djim Kaou, d’autres membres du CNT soient dans le collimateur de la justice. Pour ce faire, il serait risqué de laisser les choses passer comme une lettre à la poste, car dans le cas d’espèce, il s’agit tout simplement d’un rapport de force qu’il faut définir entre deux institutions de la république. Alors, malheur à celle qui va se laisser marcher sur les doigts .

 Davy Richard SEKONE

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