La tension ne baisse pas au Tchad. 48 heures après la nomination du gouvernement de la Transition, chapeauté par Pahimi Padacké, le front social est de nouveau en ébullition. Hier mardi 4 mai 2021, la coordination des actions citoyennes, aux avant-postes de la contestation de la dévolution du pouvoir à Déby-fils et qui conteste la légitimité du Conseil militaire de Transition, a annoncé une nouvelle manifestation pour le samedi 8 mai prochain.
Le mouvement Wakit Tama qui conduit la contestation depuis quelques semaines n’entend donc pas baisser la garde mais entend maintenir la flamme de la contestation et la pression sur ce «régime» militaire qui à n’en pas douter, s’apprête à officialiser une «patrimonialisation» du pouvoir d’Etat.
Ainsi, malgré la violente répression de la contestation qui a eu lieu le 27 avril dernier, et qui avaient laissé sur le carreau quinze morts, ce regroupement d’organisations de la société civile et de partis politiques ne démord pas et reste droit dans sa logique et ses bottes. Pas question de laisser le champ libre au clan Déby et aux militaires du CMT. Aux yeux des responsables du mouvement Wakit Tama, le nouveau gouvernement de la Transition est autant illégitime que son géniteur le CMT.
Sur la présence d’une frange de l’Opposition dans ce gouvernement, le mouvement s’est montré sans équivoque et ne décolère pas contre ses désormais ex-membres qui ont préféré rejoindre le gouvernement pour assouvir des intérêts personnels que de poursuivre le combat pour un «Tchad libre». Du reste, pour ledit mouvement, ces partis ou organisations membres se sont exclus d’eux-mêmes de la coalition. Toute prétention gardée, les responsables de Wakit Tama sont conscients du rouleau compresseur qu’ils combattent depuis la mort du maréchal-président. Ils savent aussi que les actions qu’ils mènent sont loin d’ébranler les militaires au pouvoir. Mais en gardant la pression, ils pourraient produire un déclic en matière de liberté et de justice sociale en faveur des populations tchadiennes visiblement exténuées par plus de trente ans de gestion autocratique et clanique. Pour toutes ces raisons, et quel que soit l’issue de ce bras de fer qui s’annonce «mortifère» pour ceux qui auront la témérité de braver les balles d’une armée réputée pour sa bravoure mais surtout ses dérives, ils auront eu le mérite de tenter de forcer le destin.
Mais comme il fallait s’y attendre, le Mouvement patriotique du salut (MPS), parti du défunt président, a vivement réagi à cette sortie. Pour le parti au pouvoir, (c’est une subtilité), très bien représenté au sein de ce gouvernement, il faut soutenir l’action du CMT. Ce qui s’apparente à une réponse du berger contre la bergère constitue en fait une sortie qui pourrait traduire une ébauche de ce qui se tramerait entre les militaires et ce parti. En demandant une modification de la Charte de la transition, et l’exclusion systématique du premier ministre et des ministres du gouvernement de transition des prochaines élections (présidentielle et législatives) le MPS montre que les linéaments du «deal» tant redouté par tant d’observateurs sont profonds. Si ces propositions sont actées, les choses se préciseront donc et il s’agit en clair d’offrir un boulevard à Déby-fils afin de lui permettre de troquer le treillis de général de corps d’armée à une gandoura ou un costume comme le faisait si bien son défunt paternel.
La rédaction
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