Après Sarraj, Haftar en France :  Une équidistance entre l’Est et l’Ouest libyens difficile à tenir

Après Sarraj, Haftar en France : Une équidistance entre l’Est et l’Ouest libyens difficile à tenir

Comment prouver que la France reste à équidistance entre l’Est et l’Ouest de la Libye ? Telle est diplomatiquement la problématique qui turlupine Emmanuel Macron qui a reçu en deux semaines d’intervales les deux leaders ennemis Sarraj et Haftar.

Pendant que le maréchal Khalifa Haftar gravissait hier 22 mai 2019, les marches de l’Elysée, les armes tonnaient à Tripoli contre les positions de ses troupes à telle enseigne que l’ONU redoute une «guerre totale», euphémisme pour désigner une guerre civile dont la ligne de démarcation n’est pas si tenue avec la situation actuelle. Normal qu’il dise au président français Emmanuel Macron que les conditions du «cessez-le feu ne sont pas réunies». Du reste, elles ne seront jamais réunies au regard de la position de chacune des deux parties. En effet, après l’aparté Haftar-Sarraj-Macron à Saint-Cloud le 25 juillet 2018, le camp du gouvernement d’entente nationale (GNA) avait déjà sa religion toute faite:  La France à défaut d’appuyer Haftar, est frappée de cécité au sujet de ses bombardements sur tripoli , une suspicion qui date de 2016 et qui aujourd’hui a évolué, côté Sarraj, lequel est convaincu désormais que la France est bien une alliée du maréchal de l’Est libyen, un premier ministre libyen qui n’a du reste pas manqué de le signifier au président français, lors de son séjour élyséen, en début mai dernier. On connaît la réponse du président français : la France ne soutient pas Haftar !

Et pourtant, si officiellement Paris reste dans une position médiane entre les 2 frères ennemis libyens, néanmoins, la France «prône pour une solution sécuritaire pour la Libye», où elle aimerait voir une sorte de Léviatheim, un homme fort, que semble habiter Haftar émerger afin de rassembler orphelins, ennemis et autres de l’astre de la Jamahiriya éclipsé à jamais depuis 7 ans. Des indiscrétions fuitées dans la presse italienne font état d’un cénacle courant le 5 avril dernier entre des émissaires des gouvernements français et italiens et ceux de Haftar à Rome puis ensuite à Paris. Objectif ; faire de Haftar un chef warrior à l’image d’un Déby du Tchad.

Actuellement, Khalifa Haftar est décidé à garder ce qu’il a acquis alors que le premier ministre Fayez Al-Sarraj s’arc-boute au retrait de ses troupes des faubourgs de Tripoli avant qu’il ne songe à parler d’arrêter le staccato des armes. Dans ces conditions, on est bien assis confortablement dans un dialogue de sourds dont l’issue est des plus hypothétiques.

On comprend la volonté de l’agresseur de «pacifier» Tripoli. Mais le vœu  de l’agressé de ne pas perdre la face est tout aussi dans l’ordre du compréhensible.

Néanmoins, on se demande si la Libye n’est pas un immense échiquier où s’amusent des puissances insoupçonnées. Une hypothèse nourrie par le yoyo auquel se livre la France, soutenant l’un le jour et lui retirant son appui la nuit.  Le jeu trouble de l’Elysée a fini par mettre à cran le Premier Fayez Al-Sarraj qui, après avoir formulé publiquement son accusation, a tenté de la manifester économiquement en imposant aux entreprises européennes de renouveler des autorisations d’être sur le sol libyen expirées depuis Mathusalem.

A l’évidence, l’Est et l’Ouest du pays perclus de plaies et de cloques du défunt Mouammar Khadafi est la carcasse d’un pauvre gibier pétrolier sur laquelle s’échinent des carnassiers avides de pétrole, de billets et de richesses. Et la carcasse n’étant pas très grande, dans une atmosphère planétaire où la manne noire se raréfie davantage, les appétits sont aiguisés. Par dirigeants interposés, ils se livrent donc une bataille rangée, les uns fournissant des armes au premier pendant que les autres encouragent et donnent instruction aux seconds dans l’espoir que l’un prenne le dessus sur l’autre pour espérer voir fructifier des accords secrets et inavouables.

Le tout est caché sous le vernis du  service après-vente de l’embrouillamini qui a été semé en Libye en 2011, sous le prétexte de déraciner un dictateur qui semait la terreur dans le cœur de son peuple. A voir les décombres qui jonchent la belle Libye d’antan, on se demande du reste, qui des libérateurs et du dictateur, sert la terreur à ce peuple libyen. Et on comprend bien cette Europe, qui ahane à faire revenir la paix en Libye, car ce pays, plongé dans cette situation de ni pain, ni mie reste la porte ouverte au prosélytisme djihadiste et celui du péril migratoire, 2 dangers qui ne laissent personne coi à commencer par l’Europe. Du reste, il n’est pas jusqu’aux Africains, dont les suppliques pour l’option Haftar qui n’aient parvenues aux oreilles de Angela Merkel, lors de son récent séjour au Burkina.

Les «libérateurs» devraient cependant chercher à faire amende honorable et ne pas faire en sorte que le service après-vente soit plus catastrophique que la marmelade déconfite qui a été vendue «gratuitement» aux Libyens !

Ahmed BAMBARA

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