Attaque de Koutougou par le GSIM : Le Burkina doit-il négocier avec le caïd djihadiste de Tinzawatène, Iyad Ghaly ?

Attaque de Koutougou par le GSIM : Le Burkina doit-il négocier avec le caïd djihadiste de Tinzawatène, Iyad Ghaly ?

D’abord la bonne nouvelle : au moment où le clavier bidouillait les premières lettres de cet éditorial, elle est tombée sur la tête éprouvée et endeuillée des Burkinabè. Les cinq militaires portés disparus lors de la triste écorchure à la dignité du Burkina, dans le bled de Koutougou, le 20 août dernier ont été retrouvés. Et ils sont vivants. Sains et saufs et prêts à repartir au front. Aucun bras n’est de trop dans ce combat pour la survie d’une nation. Car, le combat est rude, maintenant que le nom de celui qui a osé frapper durement l’armée burkinabè est connu :

Ce n’est nul autre que le tristement célèbre Iyad Ag Ghaly, le diable fantomatique mais à la réalité dangereusement présente dans le Sahel. Sa coalition de semeurs de la mort, le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI), a en effet revendiqué l’attaque meurtrière qui a coûté la vie à 24 vaillants soldats burkinabè à Koutougou dans le Nord du «pays des hommes intègres».

C’est le plus lourd bilan jamais essuyé par l’armée burkinabè depuis que les crocs du terrorisme ont décidé de mordre dans le gras de son bras.

Et malheureusement, cette revendication est bien à la hauteur de l’hécatombe. Le GSIM, lorsqu’il frappe le Burkina, a comme toujours décidé de lui faire vraiment mal. Les chiffres les plus homériques qui ornent l’épitaphe des attaques terroristes dans ce pays portent le plus souvent sa signature macabre :

–  Café Cappuccino, 30 morts en janvier 2016

– état-major de l’armée burkinabè, 8 morts le 2 mars 2018

Ces attaques, qui semblent être mûrement planifiés et exécutés avec des moyens conséquents, arrivent le plus souvent à frapper le Burkina là ça fait mal, vraiment très mal.

Cependant, lot de consolation, on se rappelle qu’à Rayongo, en juin 2018, l’armée burkinabè avait réussi à infliger un sévère coup de pied dans l’organigramme de la force de destruction, en annihilant l’un des cerveaux organisateurs des attaques terroristes qui frappaient le pays, dont notamment la capitale Ouagadougou. Cette agression avait donné un coup de mou au GSIM, qui a certainement dû se réorganiser.

C’est la preuve donc que le combat est rude entre les forces armées burkinabè et les forces obscurantistes, qui tentent de mettre à genoux un pays, ou, à tout le moins, de le séparer d’une partie de son territoire.

Après avoir pleuré les morts et soigné les blessés, le Burkina (ce n’est plus l’armée seulement, mais toute la nation burkinabè) doit vite repartir au front. Et il ne s’agit plus d’y aller pour y aller. Il s’agit désormais d’anticiper les prochains coups de l’ennemi.

On sait peut-être comment il procède. Il veut frapper pour faire de l’effet. Il mobilise donc du monde. Un monde qui ne devrait plus passer inaperçu sous les yeux des populations et des radars des forces de sécurité. Des armes ont été emportées pendant l’attaque du détachement militaire de Koutougou. Elles ne serviront certainement pas à orner les dunes du Sahel. Elles entreront sans doute dans l’arsenal d’une potentielle autre attaque, si elle n’est déjà presqu’à terme. Il faut se préparer à y faire face, et pourquoi pas, l’étouffer dans son œuf infernal.

L’autre élément qui apparaît de plus en plus inéluctable, c’est l’arme de la négociation. Elle est devenue une nécessité face à la complexité et la singularité du péril qui assaille le Burkina. Le Burkina ne devrait pas en rougir car il ne sera certainement pas le seul à user de cet outil pour amoindrir ses pertes et ainsi, moins recourir aux mouchoirs pour sécher les larmes des veuves et des orphelins.

A la guerre, il y a un temps pour brandir la kalachnikov. Et il y a un autre temps aussi où il faut savoir utiliser l’arbre à palabres.

Alors se pose la question qui trotte dans beaucoup d’esprit et qu’Aujourd’hui au Faso a toujours défendue : le Burkina doit-il prendre langue avec l’impitoyable caïd des Ifogas ? Faut-il négocier avec le parrain des katibas du Sahel, ce ‘’high value individuals’’ (individu de haute valeur) dans le jagon militaire ?

Des contreforts de Tinzawatène à la frontière algero-malienne, l’enfant terrible de Boghassa qui dispose de plus d’un millier de combattants illuminés frappe allègrement au Mali, comme au Burkina.

Les Maliens ont-ils parlementé avec lui ? Est-il «protégé» par les Algériens comme le pensent certains ?

En tout cas, sans compromission et sans penser à ce que Blaise Compaoré faisait, c’est en toute lucidité que les autorités burkinabè devraient explorer cette piste, qui n’est ni honteuse, ni illogique, ni une abdication, mais une tactique de guerre éprouvée que ne dédaignent même pas les Américains qui négocient actuellement dans les lointaines plaines afghanes avec les Talibans. Un deal dans le cas d’espèce avec, Iyad Ghaly ne signifie pas forcément «vendre» le Burkina, ni se dire qu’il y a trop de victimes et qu’on ne négocie pas avec les djihadistes ! Le tout-guerre, paraît de plus en plus un cul-de-sac sans ce zeste de pourparlers. Mais c’est aux autorités burkinabè d’en juger, de jauger et de baliser une plausible négociation avec celui qui incarne le visage du djihadisme sahélien depuis 30 ans

Ahmed  BAMBARA

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