Audience de non-lieu à la CPI pour Laurent Gbagbo : L’ombre d’un doute

Audience de non-lieu à la CPI pour Laurent Gbagbo : L’ombre d’un doute

Hier 1er octobre 2018, des zélotes et autres gbagbophiles agglutinés aux vitres de la salle d’audience de la CPI,  désapprouvaient certains propos des juges, ou  réclamaient la libération de leur mentor, alors qu’à 6000 km de là à Yopougon, quartier populaire et frontiste jusqu’à l’âme,  ses partisans se rassemblent comme à l’accoutumée et à la plateforme de Cocody ou, on suit les minutes du procès sur écran plasma géant , les avis sont tranchés : il est temps de libérer Laurent Gbagbo, victime injuste d’une justice universelle, qui n’a d’impartialité que de nom. Vous l’aurez deviné, la reprise du procès Gbagbo tient en haleine autant au pays-Bas qu’en Côte d’Ivoire.

500 pages de requêtes de non-lieu, 1 057 pages et 6 000 notes de bas de page, c’est la pile de paperasserie et de justif posés par les avocats de Laurent Gbagbo, sur la table des juges de la CPI pour demander tout simplement la relaxe de l’ancien président ivoirien.

Après huit mois d’absence de l’audience, qui auront permis au célèbre prisonnier ivoirien de La Haye et à sa défense et à son ex-ministre de la jeunesse, Charles Blé Goudé, de mieux paufiner, ou plutôt de déconstruire chaque argument de la CPI, voilà donc Gbagbo et sa défense de retour devant les juges pour plaider l’acquittement. Hier 1er octobre, c’est véritablement un tournant décisif dans cet interminable procès, car tout tient aux réponses que donneront les magistrats à certaines questions :

1)        les tueries du marché d’Abobo ont-elles été ordonnées par Laurent Gbagbo ?

2)        les différents crimes relèvent-ils d’une planification dont tout mènerait à Gbagbo ?

3)        y-t-il au fait, des preuves tangibles qui confondent l’ex-président dans cette affaire de crimes contre l’humanité ?

Pour le substitut du procureur, Eric Mc Donald, il n’y a pas l’ombre d’un doute, que le président déchu a usé de méthodes criminelles, ciblant des civils ivoiriens, notamment les ouailles d’Alassane Ouattara, et l’inquisiteur moderne, de renvoyer les uns et les autres aux preuves que lui, a présentées lors des deux premières années du procès. Les collaborateurs de la Thémis gambienne, croient détenir l’objet des crimes dans le mode opératoire des forces armées ivoiriennes de l’époque, et des miliciens du ‘’général’’ Blé Goudé, lequel mode consistait à appliquer une politique criminelle dictée par la galaxie Gbagbo.

Les avocats du fondateur du parti frontiste ivoirien, face à ces argumentaires de La Haye, ont, au lieu de passer à la phase du défilé des témoins à décharge, ont opté de contester «la lourdeur» du dossier, et demandent le non-lieu et la liberté pour leur client.

Risque calculé sans doute, au regard de certains faits, et du contexte actuel : déjà en 2014, la CPI a dû retoquer sa copie, qui était tellement légère (bâtie sur des coupures de journaux et des recoupements) qu’elle ne permettait pas la confirmation des charges.

Ensuite, il y a eu les dépositions de certains témoins à charge qui laissaient à désirer. Il y a eu aussi la plaidoirie de certains chefs d’Etat irréprochables judiciairement (Alpha Condé, IBK, Mahamadou Issoufou, Roch Kaboré) pour un réexamen du cas Gbagbo. Il y a également la salve américaine qui fragilise un peu plus une CPI, déjà en quête de crédibilité africaine. Enfin, il y a l’effet Jean-Pierre Bemba.

C’est dire que si sous réserve de plaidoiries, de preuves, et d’intime conviction des juges, les conditions n’ont jamais été autant réunies pour une levée d’écrou de Gbagbo.

Attention tout de même, à tomber benoitement dans un angélisme puéril. Rien n’est joué, et la CPI a jusqu’en décembre 2018 pour se prononcer, si le procès Gbagbo continue, ou s’il humera l’air de la liberté. Laurent Gbagbo à Abidjan avant la présidentielle de 2020 ? Ce sera une autre histoire ivoirienne.

Zowenmanogo ZOUNGRANA

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