Antony Blinken lui-même l’a avoué lors du point de presse conjoint avec son homologue rwandais Vincent Biruta, que sa visite consécutive RDC-Rwanda relevait presque du funambulisme, un jeu de grand écart au sujet de la question brûlante entre les 2 pays : La rébellion M23.
Le pavé des experts de l’ONU qui soutient que le Rwanda est enfoncé jusqu’au coup dans l’action de ce groupe à l’Est du Congo n’en finit pas d’envenimer les choses dans les Grands Lacs. Mardi, il était avec Félix Tshisekedi à Kinshasa où ce problème a dominé l’aparté. Avec Kagame, pareil ! Et il n’est pas évident que le locataire d’Urugwiro village change son fusil d’épaule.
A Kigali, Blinken n’a pas joué au moralisateur puisqu’il n’y a pas eu de condamnation, devant les médias, Blinken s’est juste contenté de dire que des sources «crédibles» attestent que le M23 serait une armée quasi-croupionne rwandaise, et c’est de cela qu’il a échangé avec Paul Kagame. Le secrétaire d’Etat américain avait d’ailleurs donné le ton en RDC ; pas question de jouer au parrain mais une répétition de la même phrase dans les 2 capitales. «Tout soutien ou collaboration avec des groupes armés dans l’Est de la RDC met en péril la stabilité régionale». Et comme on le devinait, si en RD Congo, on voue aux gémonies le M23 qui serait soutenu à bout de bras par le Rwanda, chez Kagame, c’est le FDLR, qui serait stipendié par la RD Congo, qui fait éructer.
D’où ce mot de Blinken qui affirme que ce qui vaut pour le Rwanda à propos du M23, est pareil pour la RDC relatif au FDLR. Il ne pouvait en être autrement, de ce jeu «d’équilibriste» de la part du diplomate américain, qui se trouve en présence de 2 pays dont l’oncle Sam a besoin.
La RD Congo pour ses richesses hydriques, et géologiques, le Rwanda pour sa posture géopolitique et géostratégique. Du reste, si ceux qui s’attendaient à ce que Blinken tance le Bonaparte de 1994 sont restés sur leur faim à propos du M23, le sentiment reste le même sur le cas de l’opposant Paul Rusesabagina, et au-delà sur l’ensemble de la question des droits de l’homme au Rwanda. Ici aussi, Antony Blinken s’est contenté du service minimum, en s’alarmant sur la situation soulevée maintes fois par les droits-de-l’hommistes, sans plus ! Un diplomate, c’est la chorégraphie de l’arrondissement des angles.
Antony Blinken termine donc son second séjour en Afrique au Rwanda, sur une note de la realpolitik que les dirigeants du continent seraient bien inspirés de s’en approprier. Les intérêts d’un pays priment sur tout. En ménageant la RD Congo et le Rwanda, Blinken sait qu’il est inopportun actuellement de s’aliéner ces 2 pays, au moment où Russes et Chinois sont aux aguets, pour ne pas dire qu’ils ont pied en Afrique.
La rédaction
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