Boubou Cissé à Sobane en attendant IBK : Désamorcer l’itératif «casus belli», avant la guerre civile

Boubou Cissé à Sobane en attendant IBK : Désamorcer l’itératif «casus belli», avant la guerre civile

Moussa Mara, Soumeilou Boubeye Maïga, Boubou Cissé, les premiers ministres se suivent et leurs déplacements sur les théâtres dramatiques au Mali se ressemblent.

 Hier 11 juin, 48 heures après la boucherie de Sobane, Boubou Cissé qui faisait son baptême de feu, en s’y rendant. «A chaque fois qu’un Malien est tué, les premiers ministres doivent avoir cette mort sur la conscience», a-t-il lâché en substance, tout en s’inquiétant de l’unité malienne qui s’étiole.

Les mots ne suffisent plus pour qualifier le drame humain qui s’est joué à Sobane. Les condamnations ne seront pas assez spongieuses pour absorber les larmes et les douleurs qui coulent dans les veines des victimes survivantes. Un tel acte ignoble est innommable et seule la gomme de la justice pourrait prétendre superficiellement effacer la gravure morbide inscrite dans la chair des ayants-droit.

Maintenant, la question est de savoir si cette sortie premier ministérielle consolera les rescapés ? Il est possible d’en douter. Si l’on en croit les témoignages, l’attaque a duré pratiquement onze heures. Quelle est cette armée qui met donc 8 heures pour se rendre dans une zone et empêcher que femmes, enfants, habitats et bétail soient passés sous le supplice de la mise  à mort et de façon si atroce ?

Une armée digne de ce nom, pilotée par un gouvernail tenu par une main ferme et avisée aurait pu réduire ce carnage, au lieu de venir par la suite se vautrer dans le sinistre et impuissant rôle de tenant de funérarium. C’est une posture qui n’est pas de nature à calmer les ardeurs, à rassurer les suppliciés et à mettre en garde les bourreaux.

Du reste, cet Etat a du mal à mettre un nom sur ces derniers. Des «terroristes». D’accord. C’est comme si l’on disait que des «bandits» ont dévalisé une bergerie. C’est une lapalissade. Mais de quels bandits s’agit-il ? D’où viennent-ils ? Pourquoi se sont-ils précisément attaqués à cette bergerie ? Où sont-ils partis ? Comment faut-il les traquer ? Comment les obliger à venir répondre devant la justice ? Comment expliquer que la base militaire située à quelques km de Sobane ne soit pas intervenue durant ces 8 heures qu’a duré le carnage ? Rompre avec le cycle des massacres-déplacement des premiers ministres sur les lieux pour ânonner la compassion et puis rien serait déjà un grand pas. Ensuite, muscler les FAMA, affirmer plus d’Etat dans les zones crisées, plus spécialement au Centre, et rendre justice serait également un balbutiement de solution.

C’’est pourquoi, pour Sobane, IBK doit en finir avec le rituel du tour des lieux du sinistre, du discours convenu et… cap sur Bamako, sous les regards hagards, apeurés et songeurs des rescapés. Place à des actes avec effet immédiat. Nécessité fait loi.

Mais Ibrahim Boubacar Kéïta a-t-il seulement les ressources nécessaires pour y répondre ? Assurément pas. Sinon, il aurait pu peut-être faire épargner la vie de ces 95 êtres humains qui ont été arrachés à cette planète d’une manière aussi  atroce.

Sobane est un village Dogon. C’est un secret de polichinelle. Il n’y a pas longtemps, un village peul, Agossagou, a connu pratiquement le même sort. Les accusations avaient fusé vers les Dogons, précisément leur mouvement d’auto-défense, dénommé Dan Nan Ambassagou. Cette association de chasseurs, malgré ses dénégations, avait finalement subi le courroux de la loi.

Qu’est-ce qui peut logiquement s’opposer à l’hypothèse que habitants d’Agossagou, las d’attendre que l’Etat fasse mouvoir son bras judiciaire, finisse par décider de se rendre justice eux-mêmes, soit en le faisant par leurs propres forces ou en utilisant des raccourcis logés dans l’antre des groupes terroristes qui pullulent dans la zone ? La question mérite d’être posée même si elle hérisse le poil de certains élus au Mali.

L’autre hypothèse est que certains esprits malins, intéressés par une implosion et le désordre dans le centre du Mali, ont fourbi des plans diaboliques pour jeter savamment les communautés les unes contre les autres. Il n’est pas exclu que ce soient les mêmes êtres sinistres qui aient opéré à Agossagou et à Sobane, pour tenter de pincer la corde de la fibre ethnique et jeter ainsi les bases de braise de la guerre civile. Et si tel est le cas, le stratagème semble avoir marché, puisque Dan Nan Ambassagou a compris Sobane comme une déclaration de guerre qu’il faudra relever.

La balle est désormais dans le camp d’IBK qui doit trouver les moyens et les voies pour désamorcer cette catastrophe qui risque, si elle explose, de mettre durablement à genoux un Mali déjà exsangue.

Ahmed BAMBARA

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