Après les sermons de l’Eglise catholique, voici quasiment la supplique ecclésiale des évangélistes et presbytériens qui tous disent en chœur : il faut reporter les législatives face à la situation délétère qui prévaut au Togo. En dépit de la médiation de la CEDEAO, le processus électoral au Togo est au point-mort, car les 14 partis politiques, représentatifs restent arc-boutés à leur mot d’ordre de boycott du scrutin du 20 décembre. Ce qui n’augure rien de bon, et c’est ce qu’ont relevé hier, les Eglises évangéliques qui redoutent le pire, du moins, ce qui est advenu, en 2005 et 2010.
Quiconque sait les péripéties de la politique togolaise depuis les années 90 à nos jours croirait à la même histoire, avec à peu près les mêmes acteurs, les mêmes revendications, les mêmes solutions éculées et surtout, la confrontation entre une famille, les Gnassingbé contre les autres agglomérées dans l’opposition. Le boycott des législatives du 20 décembre prochain par l’opposition rentre dans ce «déjà vu», cet éternel recommencement, dans un Togo, balloté entre une opposition, qui n’a jamais goûté aux délices de l’alternance, et un pouvoir qui depuis plus de 40 ans est dans les mains de la même famille, qui use de tous les moyens pour encore le garder.
Pas question de participer à ces élections trompe-l’œil, avaient martélé, les Gilchrist Olympio, Yao Agboyibor, Léopld Gnininvi… dans les années 90 pour protester contre à l’époque, une CENI, dont la partialité puait à plein nez, et contre le découpage des circonscriptions électorales. La même opposition ira aux législatives de 1994, et remportera la majorité des sièges, qui font que le poste de premier ministre devait lui revenir, mais, ce ne sera pas le cas, et le pays fut plongé dans une longue léthargie avec les opérations «villes mortes».
Trois décennies plus tard, on a d’un côté quelques figures de l’opposition de cette époque comme Brigitte Johnson, Jean-Pierre Fabré et de jeunes loups comme Tikpi Atchadam et de l’autre côté, les descendants et successeurs du pater Famillia Gnassingbé Eyadéma.
30 ans, après les réformes institutionnelles et constitutionnelles couvrent encore une poudrière. Au Togo, depuis la disparition du patriarche Gnassingbé Eyadema et même avant, les élections sont inséparables de manif., marches, et violences avec leurs lots de victimes.
En 1995, des dizaines de corps flottant au niveau d’Afflao, avait créé un incident diplomatique entre Accra et Lomé, les autorités togolaises accusant le Ghana d’avoir armé des mercenaires pour les renverser. In fine c’était des togolais tués.
En 2005, la dévolution du pouvoir passé de père en fils, d’abord par un tour de passe-passe, puis par les urnes, avait été émaillé de morts, 500 pour le gouvernement, 1000 pour l’opposition.
Bis repetita en 2010, même si l’ampleur des dégâts était moindre.
C’est sans doute pour conjurer ce syndrome électoral, que les hommes de Dieu, plus précisément la communauté chrétienne a trouvé sage de surseoir à ces législatives, le temps de trouver une solution médiane aux réformes institutionnelles et constitutionnelles. Car si hier le début de la campagne fut terne, du reste, même si l’opération «Togo mort» a été mitigée, ça sent le roussi, car au fur et à mesure que la date fatidique s’approche, nul ne peut prévoir ce qui adviendra à ce petit pays, où distribution de gourdins, coupe-coupe et autres armes accompagnent toujours les élections.
Reste à savoir si le pouvoir écoutera les sermons des ces hommes…
Sam Chris
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