Si c’était au PMU’B, nous aurions gagné le désordre. Car il est vrai que Christophe Dabiré était dans notre short liste parue à la UNE de notre édition d’hier, mais sans plus. L’apnée des Burkinabè aura duré trois (3) jours et voici venus les jours du 2e Premier ministre de Roch Kaboré.
Si la compétence d’un Premier ministre se mesure à l’aune de son sérieux, de la connaissance de l’administration et des hommes, alors, Christophe Dabiré en est un.
De la DGCOOP, c’est-à-dire de l’embryon des rouages de la coopération jusqu’à hier 21 janvier, date à laquelle il est promu PM, Dabiré a eu le temps d’apprendre, de gouverner, d’arbitrer, de trancher. Lorsqu’il prend le maroquin de la santé (1992-1997), il géra la délicate épidémie de la méningite qui décima en 1995 de nombreux Burkinabè. Mais, il a pu tirer le ministère vers des rivages plus prometteurs.
Au ministère des enseignements secondaire, supérieur et de la recherche scientifique (1997-2002), il s’est frotté aux grèves estudiantines et aux désidératas des campus qui aboutirent à l’année blanche (1999-2000). Christophe Dabiré officiera aussi à l’UEMOA comme commissaire en charge du Commerce. L’enfant de Wizin dans la province du Loba n’est pas sans rappeler, un peu Daniel Kablan Duncan de la Côte d’Ivoire et surtout le Marocain Driss Jettou, un ex-premier ministre du Roi M6
Technocrate modéré, pas va-t-en guerre pour un sou, même si affleure chez lui un homme de décision et fort de ses huit (8) ans de ministre, sept (7) ans comme député et dix (10) ans comme commissaire à l’UEMOA, Dabiré semble être ce mouton à cinq (5) pattes que recherchait le pouvoir actuel pour remplacer Paul Kaba Thiéba.
En un mot, pour ce coup-ci, Roch a choisi de rompre avec les premiers ministres off shore, qu’on faisait descendre du 9e étage de la BCEAO à Dakar ou du 20e de la Banque mondiale à News York, pour jeter son dévolu sur une personnalité connectée à l’existant quotidien des Burkinabè, un chef de gouvernement on shore, non externalisé, bref enfin un premier ministre «d’ici». Et c’est un grand atout pour Christophe Dabiré.
On imagine également que le zeste géopolitique y a joué, car une loi, d’airain non écrite, veut tout de même que si le président est mossi, le président de l’Assemblée nationale mossi, le PM ne peut que venir d’une autre ethnie et vice-versa. En optant pour le Sud-Ouest, Roch a vu juste, car, sauf erreur ou omission, cette région n’a jamais eu de PM. Or l’ouest et le sud-ouest constituent des viviers électoraux MPPistes.
Grèves à tiroirs, incivisme, terrorisme, le vivre-ensemble, sont des chantiers impératifs pour le nouveau locataire de la primature et son expertise dans les gouvernements passés, au parlement et à l’UEMOA ne seront pas de trop pour gérer un Burkina post-transition, post-insurrection… Une transition que Dabiré qualifie de «Révolution», de «volonté de changement» et qui doit dans son esprit, être permanent, mais pas «un accident de l’histoire du Burkina Faso».
Seuls bémoles: avec ces 71 hivernages il doit avoir bon pied bon oeil, être ingambe pour cette harassante mission. Et surtout avoir carte blanche de Kosyam pour agir.
Christophe Dabiré pourrait être une passerelle pour la réconciliation par exemple entre les amis d’hier qui se sont brouillés (CDP-MPP). Car, ce ne serait pas insensé, qu’il serve de go between, une courroie de transmission entre Blaise et le pouvoir actuel.
Ne disait-il pas, il y a un an, que «se réconcilier ne peut pas vouloir dire sortir de l’insurrection d’octobre, mais aller ensemble dans la direction que le peuple a indiquée en s’insurgeant ?».
C’est donc un Premier ministre qui a le physique et l’esprit de l’emploi, c’est-à-dire, capable de construire une ambition collective et de rendre au peuple burkinabè, une foi en l’avenir fondée sur l’action, l’audace et les résultats tangibles sous réserve de voir la configuration de son équipe, pour se faire réellement un jugement tranché sur ses chances de dépêtrer le Faso de cette gadoue protéiforme dans laquelle il s’est embourbé.
Zowemanogo ZOUNGRANA
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