Décès de BCE et intérim de Mohamed Ennaceur : Place au fratricide bal des prétendants en Tunisie

Décès de BCE et intérim de Mohamed Ennaceur : Place au fratricide bal des prétendants en Tunisie

«Excusez-moi de ne pas être mort !» plaisantait Béji Caïd Essebsi (BCE) avec le corps médical après sa sortie de l’hôpital militaire de Tunis le 27 juin dernier. Un mois jour pour jour après, dans ce même hôpital, le nonagénaire, locataire du palais de Carthage, n’aura plus l’occasion de persifler la Grande faucheuse, qui l’a finalement emporté.

Le baroudeur de la classe politique tunisienne a cassé sa pipe. A quelques jets de pierre de la fin de son mandat. Le fils de cultivateur, devenu président, quelques années après la chute de celui qui l’a fait entrer dans la sphère tumultueuse de la politique, Habib Bourguiba, a finalement été vaincu par le malaise qu’il semblait pourtant avoir terrassé le 27 juin.

Le doyen des dirigeants de pays, toutes tendances confondues, sauf la Reine Elisabeth d’Angleterre, a tiré sa révérence. Et à 92 ans, on peut légitimement croire, comme on aime à le dire dans certaines contrées de l’Afrique, qu’il est parti «se reposer».  Ouvrant désormais la voie à ce qui avait été évité un mois plus tôt : la vacance du pouvoir.

Une vacance qui n’aura duré que le temps de l’annonce de l’éclipse définitive du fondateur de Nidaa Tounes, puisque l’occupant du perchoir, Mohamed Ennaceur, a immédiatement prêté serment, afin de conduire une transition qui, constitutionnellement, court entre 45 à 90 jours.

Une échéance électorale dont le timing avait été arrêté par le défunt, qui fixait les législatives au 6 octobre et la présidentielle au 17 novembre 2019. Un calendrier qui sera forcément chamboulé et qui pourrait être raccourci et même peut-être post-posé, la présidentielle pouvant se tenir avant les députations.

Il se profilera en même temps, la confrontation entre les dauphins putatifs ou réels de BCE. Une bataille à l’issue incertaine, tant les ennemis d’hier ont fini par pactiser, transformant le landerneau tunisien en un inextricable théâtre d’ombres.

De parti leader, Nidaa Tounes est devenu second de par la force des législatives. Un parti présidentiel fragilisé et par ce décès et par son actuel directeur exécutif, Hafeth Caïd Essebsi (HCE), rejeton du l’illustre disparu, 57 ans dont la propulsion à la tête du parti n’a pas fait que des heureux. Inconnu au bataillon, il fut mis en pole position par son père, et fut un des artisans du rapprochement avec Ennhada. Taiseux, on le dit grand manœuvrier opportuniste.

Il y a également Rachid Ghannouchi, 79 ans, président de Ennhada, actuel premier parti au parlement. Cette formation islamiste est à elle tout seule un pouvoir et en supplantant Nidaa Tounes, avec qui, il est pourtant en tandem, il devient incontournable.

Le 10e congrès lui a renouvelé sa confiance et les statuts d’Ennhada stipulent bien que Ghannouci peut postuler au fauteuil de Carthage.

Guignent également l’impérium tunisien, Moncef Marzouki, ex-président, patron d’Al-Irada (Mouvement tunisien Volonté) qui rêve de revanche, l’ex-PM Habib Essid, et bien sûr l’actuel Premier ministre Youssef Chabed, allié, puis opposant de BCE, qui c’est sûr, le temps du deuil d’une semaine passée, dévoilera ses ambitions carthaginoises.

Et on n’oublie pas les Hamma Hammani, Nabil Karaoui… On le devine aisément, non seulement, Mohamed Ennaceur aura à gérer, un intérim corsé d’un pays dont l’on s’accorde à saluer la Révolution de jasmin, mais dont les fruits de ce mouvement n’ont pas tenu la promesse des fleurs, avec des maux qui ont pour noms : chômage des jeunes, terrorisme, régression du tourisme… mais, le ‘’transitaire’’ de la République devra aussi surveiller une tambouille qui s’annonce meurtrière entre des partis et des individus, qui n’ayant plus de figure totémique qui s’impose à tous, risquent de ressortir les couteaux des fourreaux à l’orée des joutes électorales .

Ahmed BAMBARA

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