Décès du colonel-major Wattao à New-York : Fin de show pour «Anaconda»

Décès du colonel-major Wattao à New-York : Fin de show pour «Anaconda»

New-York, dimanche 5 janvier 2020, 4h 40, soit 1h 40 à Abidjan, le souffle de vie quitte le colonel-major Issiaka Ouattara, alias Wattao. Evacué dans la ville-pomme le 13 décembre dernier, pour un cas aigue de diabète, «un mal mystérieux» affirment certains, la mort n’étant jamais naturelle en Afrique, soit on a été ensorcelé ou empoisonné, cette figure tutélaire de la rébellion du 19 septembre 2002, s’en est allée.

Né il y a 53 hivernages, Wattao embrassa très tôt le métier de militaire. Son parcours oscillera entre fracas des armes, rébellions, coups d’Etat et vie bling-bling puisqu’il fait partie des jeunes gens qui ont renversé Henri Konan Bédié de la présidence, pour installer le père Noël le 24 décembre 1999, le général Robert Guéï. C’est de là que débuta la saga Wattao…

Il est donc un des premiers visages de la rébellion de 2002 avec les Tuo Fozié, Chériff Ousmane, Kouakou Fofié, Morou Ouattara, Ibrahim Coulbaly dit IB, Losseni Coulibaly alias Cobra …

On le revoit souvent lors de l’interminable guerre civile post-électorale, à tous les combats, on le revoit habillant le 11 avril 2011, Laurent Gbagbo, dépoitraillé à l’hôtel du Golf, on revoit bien cette armoire à glace, écumer les boîtes de nuit Ouagalaises avec son groupe Cosa Nostra.

Promus dans l’armée, les Com’zones, intégreront leurs hommes dans la grande muette officielle, même si on se rendra compte que la greffe n’a pas pris, comme le témoignera les mutinérites sévères de 2017 et 2018, évènements au cours desquels, Wattao prouvera qu’il a toujours de l’autorité sur ses hommes, qui à l’époque avaient passablement pris en otage, le ministre de la Défense de l’époque, Richard Don Whawi … Il aura fallu l’entregent et la poigne de Wattao pour calmer les mutins.

Introduit au cœur du système sécuritaire, ce géant de 1,90 y essaimera donc ses obligés, et la promotion suprême viendra, sous la forme de patron de la garde républicaine, c’est-à-dire, celle chargée de la sécurité du président Alassane Ouattara, entre autres.

Le désamour viendra ensuite entre lui et le pouvoir de Ouattara, dont l’entourage le soupçonne de déloyauté, même, si l’on a laissé croire le contraire, les atomes entre Wattao et son grand frère Ouattara, ne seront plus si crochus que cela, à partir de la rupture Soro-Ouattara.

A vrai dire, les étincelles politiques de ces derniers mois, ont fait apparaître clairement que l’unité n’est plus la chose la mieux partagée au sein de la dizaine de Com’zones, qui ont aidé à hisser Ouattara au sommet de l’Etat.

Il y a désormais les pro-Soro, au nombre desquels, il y a le judoka de Fontainebleu en France, Wattao naturellement, Morou Ouattara, Koné Messamba, lesquels détestent les pro-Ouattara, dont Zakaria Koné, Losseni Fofana, l’autre judoka de Fontainebleu Chérif Ousmane, Gaoussou Koné, Kouakou Fofié, Ousmane Coulibaly et Hervé Touré. Du reste, certains tels Tuo Fofié sont dans l’hôtellerie, Morou dans l’élevage, Chérif dans la manufacture. Une reconversion soit, mais peuvent-ils se défaire de ce passé qui les a fait ? Car comme qui dirait, rebelles un jour, rebelles toujours …

Sa disparition est une perte pour l’armée ivoirienne, en témoigne la compassion du président Ouattara, la minute de silence qu’il a fait observer, et les funérailles nationales qu’il promet d’organiser. Et surtout de ne pas l’avoir avec d’autres ex-rebelles livré à la justice nationale ou internationale pour des délits de crimes commis lors de la décennie noire 2000-2010, suivie de celle des sanglants évènements de l’après-élections.

Mais il manquera certainement plus à Guillaume Soro, qui a parlé de «l’effondrement d’un pilier du 19 septembre 2002». Car peu ou prou, la force de l’ex-président de l’Assemblée nationale repose sur ses hommes avec qui, c’est «à la vie, à la mort !». Et Wattao était sans conteste le maillon fort de la chaîne Soro. Il part aussi sans avoir vu, qu’en sera-t-il de la présidentielle 2020, c’est-à-dire le match entre pro-Soro et partisans de Ouattara. Si jamais il a lieu !

Mais surtout ‘’Saha Bélé Bélé’’ meurt en laissant une Côte d’ivoire, certes rassérénée par le président Ouattara, mais d’où persistent des incertitudes, et une certaine atmosphère anxiogène. Aurait-il pu peser dans la balance pour imposer Soro dans le jeu, par le truchement de l’armée ? Coupé de ses hommes, comme on le dit, Wattao, n’était-il pas l’ombre de lui-même, malgré son bombardement comme colonel le 18 décembre dernier ?

Enfin, le décès du ‘’Boa’’ nous ramène à la condition humaine : on est si peu de chose on peut être fort, bardé de bagues, d’amulettes, de gris-gris, en somme «waké», c’est-à-dire invincible aux balles et aux mauvais sorts, bref ‘’blindé’’,  on reste toujours un homme, même pas un démiurge ( demi-dieu) et seul importe ce qu’on fera d’utile de la vie, pour soi, pour son prochain et pour la Nation, le reste n’est que glorioles de poussière.

Sam Chris

COMMENTAIRES

WORDPRESS: 0
Aujourd'hui au Faso

GRATUIT
VOIR