Par Ally Coulibaly, ministre-conseiller spécial auprès du président de la République de Côte d’Ivoire, accompagné de sa fille Djamila, Blaise Compaoré a remis à Kosyam une lettre au chef de l’Etat, Paul-Henri Sandaogo Damiba, une missive devenue virale depuis hier, puisque sa teneur était attendue, souhaitée, voire exigée : un acte de contrition en bonne et due forme, pour les crimes commis sous son interminable règne de 27 ans.
A la famille de Thomas Sankara, à sa femme et à ses enfants, et à toutes les autres familles de victimes phares, comme les capitaines Henri Zongo, Guy Sayogo et le commandant Jean-Baptiste Lingani, aux Christophe Saba, Paulin Bamouni, les profs Alain Zagré, Oumarou Clément Ouédraogo, les lieutenants Daniel Kéré, Ki Bertoa le commandant Michel Koama, Watamou Lamien, Dabo Boukary…
Sans oublier tous les anonymes tués sous son magistère par la violence politique. A toutes les familles et au peuple burkinabè, il demande pardon. Il regrette toutes les meurtrissures subies par certains de ses compatriotes du fait des évènements politiques lorsqu’il était à la tête du Burkina Faso.
Lue par le porte-parole du gouvernement, Lionel Bilgo, l’épistolaire de Blaise aborde également la question du terrorisme, invite à l’Union sacrée, pour recouvrer l’intégrité du territoire.
Evidemment, en battant sa coulpe par écrit, et non par voix orale, certains doutent de l’authenticité de la correspondance, arguant que le désormais proscrit ne peut ni parler, ni écrire, et que ce n’est même pas sous sa dictée qu’un nègre de la plume a écrit, mais c’est une lettre fabriquée par des proches.
Effectivement, on aurait voulu que ce soit même mezza voce que Blaise demande ce pardon. Qu’importe la présence de sa fille, et celle de Ally Coulibaly dépêché par le président ivoirien sont autant de gages du sérieux de cette lettre ! D’autres, cynisme quand tu nous tiens, y voient même, une façon pour Ouattara de se débarrasser d’un Blaise qui n’est pas au mieux de sa forme, mais qui n’est pas non plus à l’article de la mort. La bourde du 8 juillet dernier est en train d’être réparée, car si Damiba a voulu brûler les étapes par le conclave avec les anciens présidents, il commence à suivre le chemin prescrit qui pourrait faire mouche, côté réconciliation.
Le triptyque vérité-justice-réconciliation suit désormais son cours. Blaise a été condamné à perpétuité, dans le dossier Thomas Sankara et son retour il y a 3 semaines, en foulant au pied des cours et jugement a été une embardée politique de la part de Damiba, qui voulait aller vite ! A présent, avec ce pardon, il s’agit de trouver la formule, car si le pardon est un autre chemin vers la paix, il reste d’autres escaliers afin de tourner la page de ces années de braise. Serait-ce la grâce présidentielle ou l’amnistie que retiendra le forum ? Nombreux sont les irréductibles qui veulent voir Blaise, passer par la case prison, avant quoique ce soit ! Ou qu’il se rende chez la famille Sankara pour implorer leur miséricorde ! Et pour toutes les autres familles qu’en fera-t-il ?
Quelle analyse faire de cette tonitruante lettre de pardon de Blaise Compaoré, à l’égard de l’iconique Sankara et du peuple du Faso, lequel pardon a soulevé l’encéphalogramme socio-politico-judiciaire du Burkina ?
A l’évidence, il y a un temps pour tout ! Le temps de la réconciliation rime avec le temps du président Damiba. Il reste à souhaiter que certaines aspérités soient aplanies auxquelles devront adjoindre succès et baraka éléments nécessaires à ce processus, tant souhaité, reconnaissons-le, les Burkinabè étant fatigués au plus profond d’eux-mêmes de ces divisions fratricides. En demandant pardon au peuple burkinabè et à la famille de son ami et frère Thomas Sankara, Blaise entre dans l’Histoire comme un homme d’Etat qui connut ses moments de gloire, mais aussi ses intermèdes de faiblesses, fautes et limites avec le régicide de 87. Que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre, et rejette ce pardon grandiose porté par la fille unique du demandeur.
Cet acte de contrition doit évidemment être suivi de demandes plus officieuses conduites auprès des familles Sankara, la victime emblématique, pour que les mânes des ancêtres intercèdent et apportent leur bénédiction pour ouvrir une nouvelle ère de concorde, de paix et de prospérité que tous les Burkinabè espèrent de tout cœur.
Certes, comme souligné plus haut, des Burkinabè sceptiques prendront plus de temps et même refuseront d’accompagner cette nouvelle dynamique pacificatrice, comme au sortir d’une longue bataille ou les acteurs encore hébétés ne réalisent pas que la paix est encore possible. Mais, si victoire il y a, ce sera celle de tous les Burkinabè sans exclusive ! Bravo au président ivoirien Alassane Ouattara d’avoir facilité et accompagné le processus. Bravo au président Damiba, pour avoir mis ses grands frères dans la bonne direction. Bravo à lui pour avoir mis l’Eglise, la Mosquée, le Temple et les Animistes au centre du village. Pour avoir placé la réconciliation nationale au cœur de la République.
La REDACTION
COMMENTAIRES