Ça sent le roussi pour Gabriel Agbéyomé Kodjo après la levée de son immunité parlementaire par l’Assemblée nationale. Une sensation renforcée par la senteur qui émane des chefs d’accusation qui ont été lancée contre lui : trouble à l’ordre public, de mise en danger de la sécurité nationale et d’atteinte la sécurité intérieure de l’État. Le Parlement vient donc de charger à bloc les armes du Procureur de la République. Et sans risque de se tromper, celui-ci va dégainer.
Il faut dire que le bras armé de la justice togolaise ne va pas hésiter. Gabriel Agbéyomé Kodjo a commis deux crimes de lèse-majesté. D’abord, il a «osé» tutoyer dans les urnes le président sortant togolais Faure Gnassingbé Eyadema. Certes, son score n’avait pas de quoi inquiéter le président-sortant. Cependant, il s’est présenté comme son nouveau challenger, coiffant ainsi au poteau les vieux dinosaures de la classe politique togolaise. Rien que pour cela, il aurait peut-être eu à s’expliquer en d’autres époques. Mais en plus de cela, il a «osé» remettre en cause les résultats sortis des urnes et qui plus est, l’opposant a contesté publiquement et ostensiblement la victoire du président sortant réélu. Les mots qu’il a utilisés ont ensuite été des plus pas politiquement correctes, au sens du palais présidentiel, et nul doute que cet « affront » n’allait pas rester sans suite.
Il faut tout de même reconnaitre, avec une certaine dose d’objectivité, que Gabriel Agbéyomé Kodjo a débordé souvent quelques frontières. Déclarations qui frisent l’appel à l’émeute, propos qui n’enjolivent pas très souvent le soutien que lui apporte sans trop se cacher, l’épiscopat togolais, et comportement qui aurait être mieux canalisé et ne pas donner des fouets à qui de droit pour se faire chicoter. Ce qu’il a malheureusement fait. En effet, grâce au soutien de Mgr Kpodzo, le champion du MPDD a pu coltiner ces 18% de suffrages. Il aurait pu en capitaliser l’usufruit et se reconstruire une épaisseur de leader de l’opposition. Hélas chassez le naturel, il revient au galop. En 1994, il avait déjà écrit une missive trempée au vitriol où il disait « il est temps d’espérer» dans laquelle il s’en était pris à son mentor, Eyadema, avant de prendre la fuite pour la France.
Bis repetita, 30 ans plus tard, sauf que pour ce coup, le procureur pourra le faire juger, devenu un justiciable Tartempion et le condamner. Car si même le frère du président Faure kpatcha a croupi pendant quelques années en prison…
Toutefois, le gouvernement togolais, le président Faure Gnassingbé en tête, devrait faire preuve de pédagogie et de ne pas avoir la main trop lourde dans cette affaire. Il n’y a aucune gloire à porter l’estocade à un adversaire au sol et désarmé. Le faire serait un autre aveu d’une certaine impuissance et une fébrilité. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire et écraser une tempête dans un verre d’eau avec une hache, c’est lui donner davantage d’éclat et de panache .
Ahmed BAMBARA
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