L’interrogatoire du général de brigade Djibrill Bassolé a repris hier lundi 14 janvier 2019, au tribunal militaire de Ouaga 2000. L’audience de cette journée a été marquée par l’intervention de ces conseils qui ont campé sur leur position tendant à prouver l’illégalité et la manipulation des écoutes téléphoniques attribuées à leur client. Pour eux, l’ex-PM Yacouba Isaac Zida est l’auteur de ces enregistrements sonores.
Accusé de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, de meurtres, de coups et blessures et de trahison dans le dossier du putsch du 16 septembre 2015, l’ancien chef de la diplomatie burkinabè Djibrill Bassolé continue de clamer haut et fort, qu’il n’a rien à voir dans cette affaire. Pour lui, il est victime d’une campagne d’accusation fondée sur l’illégalité, l’irrégularité et le faux. A la reprise de l’audience hier lundi, c’est l’avocat des parties civiles, Me Lassané Pierre Yanogo qui a poursuivi ses observations débutées le vendredi dernier. Tout comme ses confrères, il a critiqué la défense du général Bassolé qui consiste à ne pas se prononcer sur ces dites écoutes. Dans la même logique, il a expliqué que les interceptions de communications réalisées par les services de renseignement burkinabè ont été faits dans les règles de l’art. Cependant, comme le vendredi, le général n’a pas répondu à ses observations. A sa suite, la parole a été donnée aux conseils de l’accusé. Le premier à se prêter à l’exercice qui consiste à décharger Bassolé a été Me Antoinette Ouédraogo. A écouter l’ex-bâtonnière de l’Ordre des avocats du Burkina, nous avons à faire à un procès hors-norme. Selon elle, cette prise de position s’explique par le fait que le général Djibrill Bassolé est traité de tous les noms d’oiseaux. Quant à Me Mireille Barry, elle s’est attelée à démontrer que le natif de Nouna est victime d’une manipulation politique orchestrée par les autorités de l’époque avec en tête, l’ex-Premier ministre Yacouba Isaac Zida. «Il fallait, à tout prix neutraliser M. Bassolé», déplore t- elle. A l’en croire, dès le 25 septembre 2015, une procédure était déjà enclenchée à son encontre avec le gel de ses avoirs. Cependant, elle ajoute que les écoutes qui sont les seuls éléments de preuves détenus par l’accusation datent du 27 septembre de la même année. Mais, «dès le 25, le premier ministre Yacouba Isaac Zida a fait écouter à certains ministres de la transition un enregistrement sonore mettant en cause Djibrill Bassolé et Guillaume Soro», déclare Me Barry. Pour étayer ses dires, l’auxiliaire de justice s’est référée aux Procès- verbaux (PV) de témoignage de ces derniers. En effet, Salifou Dembélé, Nébila Yaro et Frédéric Nikiéma d’après elle, confirment cela. Ceci étant, l’avocate du général soutient qu’il y a eu un montage flagrant concernant ces éléments sonores. Par ailleurs, toujours dans l’optique de disculper son client, Me Mireille Barry a indiqué que la retranscription de l’expert Hermann Künzel est différente de celle effectuée par les Officiers de police judiciaire (OPJ). Répondant au parquet et aux parties civiles qui, eux, contrairement à la défense, prônent la légalité desdites écoutes, l’Homme de droit estime que la légalité est une question de pouvoir. «Celui qui a le pouvoir détermine la légalité», a lancé Me Barry. Avant de céder la parole à Me Dieudonné Bonkoungou, elle a demandé aux membres du tribunal de ne céder à aucune pression politique, encore moins de l’opinion nationale, lorsqu’il sera question de délibérer. De son côté, Me Dieudonné Bonkoungou n’a pas manqué, dès sa prise de parole, de répondre au ministère public qui a affirmé qu’il est dans son rôle en tant qu’organe poursuivant d’instruire uniquement à charge. «Si votre rôle est de charger, cela signifie que vous ne représentez pas la société», fait remarquer Me Bonkoungou. Si on veut le croire, il n’y a pas de loi obligeant le juge d’instruction d’instruire à décharge. Mais qu’à cela ne tienne, ce dernier le fait, argue t- il. Abordant dans le même registre que sa consœur Me Barry, il fait savoir que l’ancien premier ministre Zida et son comité de crise écoutaient déjà une bande sonore dès le 25 septembre. Pourtant, le dossier indique clairement que les enregistrements ont été effectués le 27 septembre à 22 h 59 mn. «Nous avons fait la remarque au juge d’instruction qui aurait dû investiguer pour en savoir davantage, mais il n’a rien fait», s’indigne-t-il. Selon l’avocat de Bassolé, l’inaction du juge d’instruction se comprend aisément, compte tenu que celui-ci ne pouvait pas faire autrement que ce qu’a voulu Isaac Zida. L’interrogatoire du général de gendarmerie se poursuit ce matin à la salle des banquets.
Boureima SAWADOGO et Omar SALIA
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