Ethiopie-Erythrée : Révolution duale dans la Corne de l’Afrique

Ethiopie-Erythrée : Révolution duale dans la Corne de l’Afrique

Renvoi des civilités oblige, et la rapidité en plus 6 jours seulement après la visité historique du Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed à Asmara, voilà que le président érythréen Isayaas Afeworki s’est rendu à Addis Abeba, pour un séjour de trois jours. Dès ce 14 juillet 2018, après le tassement des flonflons protocolaires et des salamalecs d’usage, les deux responsables se sont attelés rapidement à lever les goulots d’étranglement qui bloquent leurs relations : en appliquant in concreto, la feuille de route du document conjointement signé qui instaure désormais la paix et la coopération après deux décennies de barbaries, pour des raisons idéologiques et économiques :

– ouverture des frontières entre les deux pays

– premier vol aérien d’Ethiopian Airlines, ce mercredi 18 juillet, qui relira Asmara à Addis

– ouverture d’une ambassade érythréenne en Ethiopie.

Mais ce qui va dérider encore plus les rapports entre les deux frères ennemis, ce sera le retrait des troupes éthiopiennes de Badmé et d’autres localités, et la reprise de l’utilisation des ponts érythréens par l’Ethiopie qui s’était rabattu sur ceux de Djibouti. Les parenthèses douloureuses des meurtrières guerres de vingt ans, d’avant les indépendances, et celle fugace d’après-indépendances (1998-2009), mais qui fut tout aussi désastreuse en vie humaine, se ferme aussi définitivement. L’accès des ponts érythréens va rendre plus florissante une économie éthiopienne qui déboursait chaque année deux milliards pour écouler ses divers échanges via la mer. C’est une véritable révolution duale dans la Corne de l’Afrique, car un tel réchauffement de relations, et aussi rapidement que celui qui se déroule entre l’Ethiopie et l’Erythrée est rarissime pour ne pas être qualifié de révolutionnaire. C’est une Révolution silencieuse, opérée par deux pays qui se sont tant haïs, tant combattus du moins, les politiques, qu’ils en sont arrivés à la conviction que seule une table ronde peut tout résoudre. Si le vieillissant Issayas Afeworki, qui est pris au collet, et par les sanctions onusiennes depuis des années, et son isolement obsidional, a pris conscience que la seule issue pour lui claquemurer dans ses certitudes paranoïaques et la sauvegarde du pays dont des fournées entières de jeunes fuient à vau-l’eau vers l’Europe, si donc le dictateur d’Asmara a été touché par les grâces de la Realpolitik et économique, son puissant voisin aussi n’en pouvait plus de cette diète maritime, car ni les 19% de part pris dans l’érection de pont de Berbera dans le proto-Etat du Somaliland, ni les rafistolages maritimes avec Djibouti ne peuvent être que des solutions structurelles. Seule voie de salut par mer : l’Erythrée. Révolution donc dans cette Corne de l’Afrique dont il faudra attendre  les retombées, pour se prononcer sur un jugement tranché. Déjà, on ne peut qu’applaudir pour les deux pays et pour… l’Afrique.

Sam Chris

COMMENTAIRES

WORDPRESS: 0
Aujourd'hui au Faso

GRATUIT
VOIR