Fixation du prix plancher du cacao par la Côte d’Ivoire et le Ghana : Les cotonculteurs africains doivent s’y mettre aussi

Fixation du prix plancher du cacao par la Côte d’Ivoire et le Ghana : Les cotonculteurs africains doivent s’y mettre aussi

2 600 dollars la tonne ! Un prix plancher. Afin de redonner de la dignité à ces producteurs de cacao qui habitent dans les deux plus grands producteurs de cacao du monde : la Côte d’Ivoire (2,1 millions de tonne par an)  et le Ghana (900 000 tonnes par an) sur un total mondial de 4,8 millions de tonnes.

Et ce sont ces pays qui  sont à la pointe de cette «revendication» posée sur la table des transformateurs. Les discussions ont commencé et s’annoncent âpres. En attendant de soliloquer sur l’issue, il convient de souligner cette union assez historique et cette prise de conscience du côté africain. Le continent est réputé ne pas savoir parler souvent et trop souvent d’une même voix pour défendre ses intérêts. Or, une fois ligués, et abritant en leur sein d’importantes richesses convoitées par leur alter ego des autres continents, ils peuvent remonter la balance de l’équilibre économique et social pour la placer à des niveaux humainement acceptables.

Les producteurs de cacao en Côte d’Ivoire rasent les murs et se retrouvent avec des bribes de miettes des retombées colossales de la production du cacao au plan mondial. C’est une injustice sociale qu’il fallait corriger. Et c’est sans doute un précepte cher d’un certain fringant capitaine du Burkina Faso, Thomas Sankara qui se manifeste dans la réalité. «Consommons ce que nous produisons et produisons ce que nous consommons», tel était le mot d’ordre de Sankara, pour que l’Afrique sorte de l’ornière. C’est en chantant à l’unisson que les Africains pourront se faire entendre. Le Ghana et la Côte d’Ivoire semblent l’avoir compris par le cacao. Et vivement que, devant la miséreuse souffrance de ces paysans ivoiriens et ghanéens, la barre de résistance évidente des chocolatiers fonde…comme du chocolat.

Malheureusement, ce n’est pas le seul secteur où le cordonnier est très mal chaussé. On se met à rêver devant l’opulente richesse des producteurs de pétrole qui vivent royalement des fruits des entrailles de leur sol. En Afrique, les choses ne vont pas autant de soi. Les pays riches en diamant étouffent sous le carbone de la pauvreté. L’or tapi sous les sols de la plupart des contrées ne dore leurs habitants qu’avec la poussière rejetée par les grosses machines de creusage. Et que dire du coton ? L’Afrique est le premier producteur de cette matière première mais est très mal habillée de ses  retombées.

Le Burkina, le Bénin et le Mali, pour ne citer que ceux qui figurent dans le peloton de tête devraient s’inspirer de la hardiesse ivoirienne et ghanéenne et oser afin dire aux grandes industries de transformation de coton, qu’il est temps que le producteur vive décemment de la sueur de son front. Et ici encore c’est le lieu de le rappeler que le père de la Révolution burkinabè, ne professait pas autre chose, lorsqu’il disait et s’habillait en Faso Dan Fani, la cotonnade locale.

30 ans après sa disparition brutale, l’actuel président du Faso, Roch Kaboré fait d’ailleurs du sankarisme, sans Sankara, de façon vestimentaire, puisqu’il est quotidiennement troqué d’habits du terroir, et sans qu’il n’ait pris un décret, de nombreux Burkinabè s’habillent en Faso Dan Fani. Dans ce domaine, Roch est un exécutoire testamentaire de Sankara. Des propos appropriés obligeront les acheteurs de coton à n’avoir d’autres choix que de s’asseoir pour parlementer. Un prix plancher plus avantageux et humainement plus soutenable rendrait vraiment la blancheur immaculée au coton. Mais cela ne suffit pas.

Au-delà de tout cet arsenal de choristes qui se met en place du côté du continent africain, remuer les méninges pour orienter les réflexions vers la transformation de toutes ces matières premières est la véritable issue aux difficultés que vivent les agriculteurs africains. Oui, il faut que l’Afrique industrieuse devienne industrielle. Comment expliquer qu’avec ce coton produit, on ne puisse pas fabriquer même une simple compresse ? La transformation des matières premières in situ en Afrique est un chemin sûr vers le développement du continent. Et c’est en cela que la Zone de libre échange continentale (ZLEC) qui sera un des plats de résistance du sommet de l’UA qui s’ouvre ce jour 4 juillet à Niamey peut s’avérer une alternative. C’est un marché d’un milliard de consommateurs qui attend d’engloutir tout ce que l’Afrique va produire, transformer et vendre. En attendant,  pourvu que la vague «2 600 dollars la tonne» ne fonde pas !

Ahmed BAMBARA

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