Ce 3 décembre 2019, Alain Foka de RFI a réussi le tour de force, en marge du sommet de l’UEMOA à Dakar de réunir sur un plateau, 2 chefs d’Etat Macky Sall du Sénégal et Alassane Ouattara de Côte d’Ivoire, Kristalina Georgieva, la nouvelle patronne du FMI et jean-Hervé Lorenzi, président du cercle des économistes.
Développement durable et endettement de l’Afrique était le thème principal sur lequel, on a greffé la problématique du terrorisme, l’élection en Côte d’Ivoire et surtout, l’actuelle querelle arrimage du franc CFA à l’Euro.
On peut tout reprocher à Ouattara sauf qu’il ne maîtrise pas les questions financières et monétaires. Directeur adjoint du FMI, gouverneur de la BCEAO, et chef d’Etat, le n°1 ivoirien n’a pas varié d’un iota sur le CFA : cette monnaie doit rester arrimée à l’Euro, car cela garantie la stabilité et la convertibilité, et évite les inflations abyssales. S’il est pour le changement de nom, qui est déjà un acquis avec l’Eco, Ouattara estime que la parité fixe permet de rembourser les dettes à taux fixe.
Une position qui est aux antipodes de celle de Patrice Talon, qui, il y a quelques jours, prônait le rapatriement de l’argent gardé dans les caisses du Trésor français. Alassane Ouattara trouve aussi en Kako Nubukpo, un macro-économiste qui s’inscrit en faux contre cette vision, car pour l’ex-ministre togolais, au-delà du double aspect du CFA, symbolique et économique, la parité est liée à une politique économique, et le régime de change est fondé de la compétitivité réelle. Pour le Togolais, 60 ans de mariage CFA-Euro, c’est trop, et il faut maintenant un attelage à un panier de devises, ce qui donne un spectre plus grand au CFA.
Si l’Eco de la CEDEAO, englobe les 8 pays de l’UEMOA et les 7 autres avec des monnaies locales, il faudra voir où se situe le problème. Car pour Nubukpo, la stabilité du CFA est liée à la renommée de la zone CFA et la volatilité d’une monnaie est fonction de la gouvernance.
A la vérité, les «décrocheurs» surfent sur cette vague anti-française actuelle dont le pinacle est frôlé avec la polémique sur la présence de Barkhane au Sahel. Avatar de cette Francophobie véhiculée à dessein par certains, le prisme d’un CFA, symbole de néocolonialisme est réducteur, sinon étriqué, et un débat sur un divorce CFA-Euro devra être mené de façon saine, et non avec passion et des oukases sur la table.
Et sur ce plan, Ouattara a trouvé la meilleure réponse : la question du franc CFA est l’affaire de la BCEAO, a tout simplement affirmé le chef de l’Etat ivoirien. En assenant le taux de croissance de la zone UEMOA, son faible taux inflationniste, et les perspectives d’un endettement faible, Ouattara, qu’on accuse d’être un défenseur de cet arrimage, assume mais avec des arguments solides. Reste qu’entre le réel et le perçu, entre ce que perçoivent les populations et ce que gèrent les dirigeants, il y a souvent un fossé. Le CFA semble être l’objet de ce hiatus.
La REDACTION
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