Francophonie : L’Afrique, bonnet d’âne en démocratie

Francophonie : L’Afrique, bonnet d’âne en démocratie

En 1970, l’Organisation internationale de la Francophonie naissait avec un certain Abdou Diouf aux manettes et aux moteurs à gaz. Son objectif, défendre et promouvoir le français.

«J’enseigne le français aux petits français», affirmait goguenard, Léopold Sédar Senghor, ancien président sénégalais et surtout, immortel, puisqu’ayant eu sa chaise sous la coupole. C’est en ce lieu symbolique qu’Emmanuel Macron a choisi devant 300 étudiants des 5 continents pour tracer les linéaments d’une «nouvelle page de la francophonie». Ce fut un discours-matrice, qui a pour vocation de redonner du souffle à une langue française qui n’est plus la seule propriété de la France, mais dont les dividendes demeurent mitigés depuis l’avènement de l’OIF.

48 ans après, les regards se ruent sur le rétroviseur pour s’interroger sur ce que cette Francophonie a apporté aux pays africains. Une belle langue, certes, avec des tournures attractives, une complexité qui surdose son charme et une diversité de sources qui nourrit sa singularité populaire. Des entreprises françaises implantées en Afrique. Des aides apportées dans le domaine culturel, avec toujours en ligne de mire, en toile de fond, servir le français. Si comme l’a professé à Ouagadougou le 24 novembre 2017, Emmanuel Macron, que le «français pourrait être la langue de l’Afrique, voire du monde», il n’en demeure pas moins que la Francophonie gagnerait à ne plus se complaire dans le repli culturel, voire identitaire, qui flirte bon l’appartenance à une communauté. D’où effectivement le plurilinguisme et le multiculturalisme. Et si les 274 millions de personnes qui parlent la langue de Molière dans le monde, la 5e parlée dans le monde et la première, d’ici à 2050 doit progresser, c’est par l’ouverture. De Paris à Kinshasa, de Dakar à Ouaga, du Québec à Abidjan «la langue est un trésor», et si l’Irlande frappe à la porte de l’OIF ce n’est pas anondin. Mais si la Francophonie, est d’abord une langue, elle est aussi une politique, celle de la France, et hélas sur ce plan, surtout en ce qui concerne l’Afrique, son apport demeure mitigé pour ne pas dire négatif. Les bonnets d’âne en matière d’alternance, de démocratie et de bonne gouvernance sont portés par les pays francophones, legs selon certains de l’Indirect rule, cher à l’ex-Métropole.

Car la question se pose désormais:  y a-t-il une réelle plus-value, comparativement aux pays qui ont subi la colonisation anglaise, par exemple ? Par certain. Parmi les pays qui tirent le continent vers l’avant, rares sont ceux qui naviguent dans l’escadron de la Francophonie. Par contre, les dictateurs ou en tout cas, les dirigeants qui ne sont pas recommandables sont recensés à la pelle dans la zone francophone africaine. Que se passe-t-il ?

Aujourd’hui, les boucliers qui s’élèvent contre la Francophonie ressemblent à la peau d’un porc-épic exaspéré.  La Francophonie «reste malheureusement encore perçue comme la continuation de la politique étrangère de la France dans ses anciennes colonies». C’est ce qu’a écrit l’écrivain franco-congolais, Alain Mabanckou, lequel a refusé l’offre de collaboration avec la représentante personnelle de la Francophonie d’Emmanuel Macron.  Elle «permet à la France de continuer de soutenir activement des potentats qui brutalisent leurs peuples en français», ajoute pour sa part le Camerounais Achille Mbembé, théoricien du postcolonialisme. En prenant rien que l’exemple de la RD Congo, le plus grand pays francophone en Afrique, on reste sidéré par le cas presque pathologique de sa gouvernance, et son incapacité à la mobilité politique depuis les indépendances. Le Gabon est englué dans une crise …post-électorale, le Cameroun avec le même capitaine depuis 35 années…

Ces sorties d’hommes avertis résument sans doute ce que la Francophonie représente aujourd’hui aux yeux de nombreux Africains. Emmanuel Macron a beau se défendre d’être un partisan de l’inexistence la «politique française». Il aura bien plus besoin que des discours et plus d’une trentaine de mesures pour convaincre le monde autour de lui, ce monde francophone africain de ne pas adopter le chemin emprunté par le Rwanda mais qui ne semble pas s’en porter plus mal depuis lors… Même si le même Macron trouve   que snober le français n’est pas la solution aux problèmes africains.

Hamed Bambara

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