Général Gilbert Diendéré : «Je n’arrive pas à faire le distinguo entre l’avocat Me Guy Hervé Kam et le porte-parole du Balai citoyen»

Général Gilbert Diendéré : «Je n’arrive pas à faire le distinguo entre l’avocat Me Guy Hervé Kam et le porte-parole du Balai citoyen»

Les avocats des parties civiles ont continué avec leurs séries de questions et observations à l’endroit du général de brigade, Gilbert Diendéré, à l’audience d’hier mercredi 5 décembre 2018. Pour son septième jour à la barre, il a refusé de répondre aux questions de fond de Me Guy Hervé Kam. Entre les deux hommes l’ambiance a été par moments électrique.

Le général de brigade Gilbert Diendéré n’a pas commandité un coup d’Etat. Il l’a simplement assumé. C’est ce qu’il continue de dire et  fonde ainsi  sa défense sur cet argument. Mais, les avocats des parties civiles ne sont pas de cet avis, car persuadés qu’il est l’auteur principal du coup d’Etat du 16 septembre 2015. C’est pourquoi, ils vont s’atteler à le prouver. C’est le cas de Me Prosper Farama qui lui rappelle que les mots qu’il a tenus lors de la réunion de la Commission de réflexion et d’appui à la décision (CRAD), prouvent qu’il n’est pas allé en tant que médiateur. Pour lui, le général s’est rendu à la réunion en tant qu’acteur de ce qui venait de se produire. Mieux, il se pose la question suivante : «comment un médiateur peut appeler à ce qu’on entérine et endosse les faits». En sus, il fait remarquer que les éléments du RSP obéissaient aux ordres de leur «père spirituel» même n’ayant aucune fonction officielle au corps. A titre d’exemple, la libération des ministres femmes qu’il a ordonné. Revenant sur la déclaration de l’accusé qui assure que la hiérarchie militaire a accepté de l’accompagner dans son aventure, le conseil des parties civiles l’interroge en ces termes: «même si l’armée a décidé d’assumer le coup, pourquoi c’est vous qui décidez de prendre la tête en lieu et place de ceux qui ont fait ce coup ?»  Refusant de répondre à la question, l’officier militaire rappelle avoir longuement expliqué cela dans son récit et ne souhaite plus revenir là-dessus. Face à ce refus, l’avocat va observer que pour lui, l’argument qu’il a avancé ne tient pas. Il souligne que dans certains pays, l’on a vu des caporaux, des sergents devenir  des chefs d’Etat à la suite de coups d’Etat.

Le général ne répond pas aux questions de Me Guy Hervé Kam

Entre le cerveau présumé du putsch et l’avocat Me Guy Hervé Kam le climat a été très tendu. C’est ce que l’on peut dire au regard des échanges entre les deux hommes. Répondant  à une question de l’homme de droit, le mis en cause déclare : «il m’est difficile de faire la différence entre l’avocat et le porte-parole du Balai citoyen». Il explique que l’avocat est aussi responsable de ce qui est arrivé. Accusant l’homme de droit d’avoir aidé le lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida à faire un coup d’Etat en octobre 2014, il affirme : «nous avons tous vu les photos et nous connaissons ce qui s’est passé au camp Guillaume». Poursuivant sa narration, l’ex-chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré révèle qu’il y a eu un deal entre les deux parties. Toutefois, il soutient que l’avocat a bénéficié des 50 millions du RSP que Zida a distribué aux leaders d’OSC et même d’une somme de 100 millions de francs CFA. Convaincu que Me Kam tient une part de responsabilité dans les évènements qui ont conduit au coup d’Etat, il lui fait comprendre qu’il usera de son droit pour ne pas répondre à ses questions de fond. C’est d’ailleurs ce qu’il fera.

La réplique de Me Kam

Il faut croire que l’intervention de l’accusé n’a pas été du goût de l’avocat des parties civiles, Me Guy Hervé Kam. Cela dit, il n’a pas tardé à répliquer. «J’ai compris avec votre intervention que Blaise Compaoré, en 2014, n’a pas vu venir l’insurrection et a fui le pays avant la prière de 13 heures. Je comprends pourquoi en 2015 vous avez fait le coup d’Etat qualifié de «plus bête du monde», a lancé l’auxiliaire de justice. Qualifiant de mensongers les propos de l’officier supérieur, Il s’indigne que ce dernier se permet de mentir, nonobstant qu’il ait fait le serment de dire la vérité à la barre. Rappelant qu’il était à la première loge en 2014 quand les balles des éléments du RSP sifflaient, il souligne : «Si c’était à cause de ces sommes, je n’allais pas risquer ma vie». Tout en lui notifiant ses cinq chefs d’accusation, l’avocat déclare que ce qu’il raconte ne l’aidera en rien. «Défendez-vous.Quand à Me Kam ou Monsieur Kam n’ayez aucune pitié». Comme leçon de  morale à l’attention du sexagénaire, Me Kam estime que dans la vie, on peut perdre de l’argent, l’honneur ou  le pouvoir, mais l’important c’est de mourir dignement. 

L’avocate de Savane FM réclame son matériel emporté

Me Aoua Sawadogo, quant à elle, s’est intéressée aux actes  concrets posés par la hiérarchie militaire, allant dans le sens de l’accompagnement du coup de force du 16 septembre 2015. Tout en répondant par l’affirmative, Golf  soutient qu’il  en a bénéficié de plusieurs.  Pour le général aux deux étoiles, l’hélicoptère qui a été mis à sa disposition, le maintien de l’ordre et la présence de l’ex-CEMGA  à ses côtés à l’aéroport pour accueil des chefs d’Etat étrangers, constituent à en point douter des faits tangibles. Par ailleurs, en tant que conseil de la radio Savane FM qui a subi des dommages pendant ces événements, l’avocate  lui a demandé dans quelle mesure il a ordonné de rechercher la 108. FM ? «C’est une proposition qui m’a été faite par les techniciens car cette radio émettait de façon insolite et appelait à la violence. Et c’était juste pour faire cesser et non arracher le matériel», répond le natif de Yako.

Et de poursuivre qu’il a accédé à cette proposition en tant que chef de l’Etat en ce moment et qu’il était de son devoir, d’interrompre des messages pouvant entrainer des troubles dans le pays. «Et qu’en est-il du matériel qui a été emporté ?», lance de nouveau Me Sawadogo. Sur ce plan, le général Diendéré confie qu’une partie du matériel était au  camp Naaba Koom II et l’autre partie à l’état-major particulier.

Dans la même logique, il assure avoir pris l’engagement de le remettre après que le responsable de la radio Savane FM l’a joint au téléphone, mais n’a pu le faire jusqu’au jour où il a été mis aux arrêts. L’audience a été suspendue et reprend demain vendredi 7 décembre 2018, au tribunal militaire à Ouaga 2000.

Boureima SAWADOGO et Edoé MENSAH-DOMKPIN

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