Grèves au Bénin :  Jusqu’où tiendra Talon face  à la fronde tous azimuts ?

Grèves au Bénin : Jusqu’où tiendra Talon face  à la fronde tous azimuts ?

Le 3e pouvoir est en colère noire au Bénin. Les syndicats sont passés à la vitesse supérieure. Sept centrales syndicales de la Fonction publique ont rejoint leurs «frères» de la santé et de la justice pour décréter une grève ce mardi.

 Au commencement, 4 syndicats opposent une fin de non-recevoir à des réquisitions, arguant que «le régime juridique des réquisitions en temps de grève au Bénin ne permet pas de procéder à aucune réquisition en période de grève». C’est la réponse musclée à un acte du premier pouvoir, via le second avec le vote par l’Assemblée nationale de la loi portant le retrait du droit de grève des secteurs de la justice, mais aussi de la santé, de la sécurité… et qui se soldent par une paralysie de l’administration judiciaire et d’autres secteurs.

Les travailleurs de la santé et de la justice grognent donc au Bénin. Ils ne sont pas d’accord avec le retrait de leur droit de grève, décidé par l’Assemblée nationale. Pour protester contre cette réforme jugée «démocraticide», ils ont recours à ce qui leur est retiré : la grève.

Et ils semblent être décidés à  ne pas lâcher prise. Et on peut peut-être les comprendre. Ce droit a été acquis de haute lutte par des êtres humains depuis des temps immémoriaux pour permettre à d’autres humains  de ne pas les opprimer.

Une sorte d’arme ultime contre le diktat des employeurs, souvent préoccupés par le nombre de billets de banque suscités par leurs fabriques à profits. Le droit de grève est cette bouche d’aération, une bouée de sauvetage, un trou d’air par lequel les «ouvriers» collent leurs narines pour attirer à eux un peu d’oxygène lorsque le four du travail devient intenable. Ces débrayages à tiroirs ne sont pas sans rappeler ce que vit son voisin le Burkina Faso depuis plus d’un an, et dont l’élément déclencheur a été justement… une satisfaction d’une plate-forme revendicative des magistrats par l’exécutif. Depuis lors, le pays des hommes intègres est gagné par une épidémie de grevisme et à l’heure actuelle, le spectre de l’année blanche rode, car les enseignants refusent de faire des contrôles aux élèves, et ne veulent pas dialoguer avec le ministre de tutelle.

 Certes,  boucher le droit de grève revient à plonger des hommes et des femmes dans l’obscurité et les condamner à vivre dans une atmosphère invivable. De ce point de vue, on ne peut qu’essayer de comprendre les cris de colère des agents de la santé et des magistrats béninois, dans le ciel d’un pays qui était jusque-là cité comme exemple de bonne démocratie.

Cependant, faut-il jeter Patrice Talon dans le dépotoir du tort ? Difficile. Car, à l’évidence, l’homme aussi tient compte de la sensibilité des secteurs vitaux dans lesquels ces hommes et ces femmes évoluent. Il n’y a pas de pause ou de grève qui tienne lorsque le fleuve du souffle de la vie est menacé d’être brisé. Une grève dans un centre de santé n’a d’autres conséquences que des chiffres désolants à dénombrer dans les couloirs de la morgue. Faut-il dans ce cas continuer à tolérer ce droit de grève qui peut être utilisé de façon non humaine ?

Malgré que les syndicats sont sur ses talons, le président béninois Patrice Talon semble décidé à tenir bon et à tenir sa décision dans les bottes de sa détermination. En effet, non seulement le président milliardaire béninois n’hésite pas à congédier son gouvernement et à former un nouveau, mais face aux magistrats, il a décidé d’engager le bras de fer, à ses risques et dépens, mais on ne gouverne pas avec des soupirs, et un chef d’Etat doit arbitrer et trancher dans l’intérêt supérieur de la Nation.

Et Patrice Talon semble être décidé à aller jusqu’au bout de sa logique l’ex-magnat du coton, milliardaire devenu président veut régenter une sorte ‘’Beninet Co’’ comme un PDG dirige sa boîte. Réussira-t-il ? Son intransigeance résistera-t-elle à la détermination des syndicats ? Les populations, principales «victimes» de ce bras de fer, vont-elles rester longtemps bouche-bée à regarder cette guerre ? Et finalement, est-ce que l’Assemblée nationale s’en laissera conter au point de vouloir faire un rétropédalage, question de sauver l’exécutif ? Rien n’est moins sûr. En tous les cas, c’est la première contestation majeure de l’autorité du nouveau président béninois qui comme on le sait n’a pas hésité à se défaire de ses faiseurs de roi. Il faut maintenant espérer une issue heureuse et rapide avec le moins de pots-cassés possibles.

Ahmed BAMBARA

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