IBK renversé par un pouvoir kaki au Mali : De la grogne politico-sociale à la malédiction du putsch

IBK renversé par un pouvoir kaki au Mali : De la grogne politico-sociale à la malédiction du putsch

Militaires en mal de soldes ? Simple mouvement d’humeur ? Vengeance du chef d’état-major adjoint limogé la veille ? Bronca contre la nouvelle loi sur leur avancement ? Décision d’arbitrer l’impasse dans laquelle est empêtré le Mali depuis des semaines ? Hier 18 août dans la matinée, coups de feu au casernement  Soudjata KeIta de Kati, puis des hauts gradés sont arrêtés, ensuite descente à Bamako, direction au domicile d’IBK au quartier Sebenikoro où ils trouvent le chef de l’Etat et son premier ministre Boubou Cissé qu’ils prient  de les suivre. En cortège 4×4, et sous les cris de Bamakois, ils sont amenés au camp de Kati, situé à 15 km sur des hauteurs de la capitale.  Kati siège des éternels mutins ? Kati, foyer de militaires putschistes ? Car c’est dans ce même camp de bérets verts qu’en 2012, est parti le coup d’Etat qui chassa ATT, et installa l’éphémère capitaine Amadou Sanogo. Bis repetita 8 ans après ! La malédiction du putsch ?

Kati. Comme en 2012 . La forteresse de Bamako s’est transformée en bourreau pour le fort de Koulouba. Bidasses et godasses font trembler le sol de la capitale malienne. Les populations jubilent. Applaudissent. Mais ne savent pas encore très bien à quoi s’en tenir. La CEDEAO et la France jouent sur les mots. Les expressions «coup d’Etat» et «putsch» sont soigneusement occultées dans les communiqués aux allures fermes qui ont commencé à pleuvoir sur le pays depuis le début des coups de feu et des mouvements de troupes à Kati.

Mais en lisant, l’esprit chuinte. Tout le monde pense à la même chose. Certains peut-être craignent que cette chose n’arrive. Finalement, elle est arrivée et elle porte ce nom tant redouté : putsch. Les USA condamnent, la France «suit avec attention», l’Union africaine et la CEDEAO s’insurgent. Réunion d’urgence du conseil de sécurité de l’ONU aujourd’hui 19 août.

Oui, au 21e siècle, un président démocratiquement élu vient d’être renversé dans ce Mali déjà exsangue. Les condamnations tous azimuts n’y ont rien fait. Les coups de fils endiablés et enragés qui ont striés le ciel ouest-africain depuis l’Hexagone n’ont pas pu empêcher le coup d’Etat militaire. En effet la mini-visioconférence entre l’Elysée et des chefs d’Etat du Sahel n’y changeront rien.

Et ironie, ce que les manifestations civiles n’ont pas réussi à faire en plusieurs semaines, les militaires  l’ont exécuté en moins d’une journée. L’argument de la force pèse, quoi qu’il arrive et dans n’importe quelle circonstance. C’est donc acté. Ibrahim Boubacar Kéïta a été renversé par les militaires. La soldatesque a arbitré. Les putschistes ont parachevé l’œuvre du M5-RFP, mais l’équation malienne reste entière.

Il demeure maintenant les zones d’ombre à éclaircir. Qui l’a renversé ? Pourquoi ? Des militaires maliens convaincus de la justesse de leur action ? Des soutiens du M5 et compagnie ? Faut-il y voir la main des terroristes tapis dans les dunes du Nord et qui pourraient ainsi mettre la main sur le gouvernail du pays ? Ou s’agit-il réellement de Maliens convaincus qu’ils vont faire œuvre utile en prenant ainsi de force un pouvoir qui était pourtant sacralisé par la Constitution ?

Zones d’ombre donc. Un boulevard d’incertitudes aussi s’ouvre devant l’avenir du Mali. Nul ne peut prédire exactement ce qui pourrait arriver. Forcera-t-on le président malien à démissionner pour ouvrir la voie à une «alternance» à la Zimbabwéenne ? Une transition forcément. Une junte militaire s’assoira-t-elle sur le fauteuil présidentiel, prête à faire face aux assauts de la «communauté internationale» ? Une transition où on appellera toutes les forces sociales du pays à venir s’asseoir pour relancer le pays  sur de nouvelles bases ? Intérim militaire ou civil ? Quoiqu’on dise c’est un coup d’Etat consommé et on ne sait pas si le scénario de 2012 sera dupliqué.

En attendant, les pays voisins du Mali ont de quoi s’inquiéter surtout sur le plan sécuritaire. La digue malienne a carrement dijoncté! Le Mali avec déjà un pouvoir  institutionnalisé n’arrivait pas à tenir la bride des groupes terroristes. Que va-t-il se passer maintenant que le pays s’est engouffré dans une instabilité institutionnelle ? La situation qui demeure volatile à l’heure où ces lignes sont tracées ne permet pas d’y répondre.

Ahmed BAMBARA

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