La fausse chimère d’un modus vivendi en gestation entre militaires putschistes et partis politiques en Guinée s’est définitivement dissipée ce vendredi 13 mai 2022.
Par un oukase, ce jour-là, le CNRD, l’organe qui assure le pouvoir d’Etat, depuis la chute d’Alpha Condé, le CNRD donc proscrit toute activité politique durant les 36 mois de Transition ! Pas de meetings, pas de rassemblements, ni de conférence de presse, encore moins de marches … rien ! Autrement dit, les militaires au pouvoir en Guinée encastrent partis politiques et politiciens dans un bâillon pendant 3 ans !
Or, la bronca survenue après la mise en place du CNT, l’ostracisation des figures de proue de l’opposition à l’image de Cellou Dalein Diallo dont la maison a été détruite ou de Sidya Touré tous dans l’œil de la justice, ou encore l’aval du CNT donné aux 36 mois de transition très contesté, tout ce raffut avait semblé ramener les maîtres de Guinée, vers un dialogue avec les partis politiques. Erreur, le lieutenant-colonel Doumbouya et ses frères d’armes ont durci leur position envers les animateurs naturels de la vie politique.
On peut comprendre les militaires, car cette classe politique a maintes fois déçu et si la Guinée est là où elle est aujourd’hui, c’est-à-dire avec des pendules du développement en retard, c’est à cause de leur ego et boulimie du pouvoir, et il n’y en a pas qu’Alpha Condé seul à qui il faut jeter la pierre !
Néanmoins, vouloir mettre ces partis politiques dans un angle mort, alors que ce sont eux qui sont les principaux acteurs de la vie nationale, et que ce sont les militaires putschistes qui ne sont pas à leur place actuellement, c’est chercher tout simplement la bagarre nationale.
Le maître de Guinée, Mamady Doumbouya, doit savoir que c’est moins le coup d’Etat en lui-même que l’arrêt du 3e mandat indu de Condé, qui a fait que les populations sont sorties pour les porter aux nues au lendemain du putsch. Face à un coup d’Etat constitutionnel, le peuple a salué celui par les armes. Mais les Guinéens espéraient et même ne doutaient point que les soldats putschistes sont arrivés pour mouler des valeurs cardinales, mettre cette Guinée qui n’en finissait pas de faire des embardées politiques sur la route, par des élections libres, transparentes et honnêtes, et regagner les casernes et doper ainsi leur estime en grandeur républicaine !
Or, chaque jour qui passe achève de convaincre les citoyens qu’il y a comme un agenda caché ou plutôt, celui de s’éterniser au pouvoir, voire le confisquer après l’intérim par d’autres subterfuges.
En interdisant les partis politiques de s’adonner à ce qui est l’essence même de leur existence, le lieutenant-colonel Doumbouya crée objectivement toutes les conditions d’une tambouille légitime avec les hommes politiques. Déjà, le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) qui a été le fer de lance de la lutte anti-3e mandat de Condé renâcle et dit non à cette interdiction, l’Organisation guinéenne des droits de l’homme (OGDH) crie à une gravissime entrave de la liberté d’opinion. Et c’est certain que les partis politiques vont préparer la riposte à cette décision qui équivaut à leur disparition programmée.
A titre de comparaison, dans les 2 autres pays touchés par le virus du coup d’Etat, les activités politiques sont tolérées, et même qu’au Mali, certains partis sont au cœur de la Transition via le M5-RFP. Au Burkina, on assiste à un printemps de la recomposition du paysage politique par des regroupements et des fusions-absorptions contre-nature, mais qui sont des activités politiques, que laisse faire le lieutenant-colonel Damiba.
Dans une Guinée très sensible et très inflammable quand il s’agit de la chose politique, Doumbouya doit rétropédaler par rapport à cette décision, car le CNRD ne peut pas tenir en joue tout le peuple, tout le temps !
La REDACTION
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