La CEDEAO et le Mali : Attention à ne pas  pourchasser une chimère !

La CEDEAO et le Mali : Attention à ne pas  pourchasser une chimère !

Les chefs d’Etat de la CEDEAO sont sur leurs grands chevaux. C’est de bonne guerre ! Le renversement d’un gouvernement et d’institutions démocratiquement établis par des bidasses n’est pas acceptable. C’est la résurrection d’une race de méfaits politiques qu’on pensait pourtant morte et ensevelie, en tout cas, du côté-ci de l’Afrique. Les bruits des godasses des soldats sur le sol de Koulouba, décoiffant la barbe blanche d’Ibrahim Boubacar Kéïta (IBk) relève de l’incongrue et n’est pas du tout un bon signal.

C’est un très mauvais message, même un dangereux écho renvoyé dans le reste de l’organisme ouest-africain. Car, oui, non seulement les putschs sont de retour, mais ils ont fait preuve de «résilience». Ils se sont réinventés et obéissent désormais aux failles laissés par la codification de la démocratie.

C’est parce que le président a été renversé sans qu’il n’ait son mot à dire que la Constitution est considérée comme violée. Mais qu’est-ce qui se passe lorsque le président décide de démissionner et dissout gouvernement et assemblée nationale ? Ce sont bien des cas prévus par la Loi fondamentale et les militaires se sont engouffrés dans son appendice qui ne précise pas les cas de force majeure qui ne doivent pas être prises en compte dans le délaissement «légal» du fauteuil présidentiel.

C’est bien un putsch au Mali. Mais comme au Zimbabwe, les auteurs sont couverts par la démission du président de la République. De sorte que l’agitation de la CEDEAO, ses gesticulations et ses pirouettes ne ressemblent davantage qu’à un coup de bluff qu’à une réelle action qui aura une concrète réaction.

Que fera vraiment cette cavalerie qui se précipite à Bamako ? Espère-t-elle la réédition de ce qui s’est passé au Burkina Faso avec le retour du président Michel Kafando qui avait été arrêté par les soldats du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) ? Peut-être. Mais au Burkina Faso, le président Michel Kafando avait refusé de démissionner, tout comme son Premier ministre. Au Mali, ce n’est plus le cas.  Comment rétablir un président qui a démissionné et l’a dit devant public et témoin ?

De plus, il y a une donne très importante à prendre en compte. Le putsch est soutenu par une bonne partie de la population malienne. Ou du moins, une bonne partie de la population malienne avait réclamé le départ du président IBK. Aujourd’hui 21 août d’ailleurs, une grosse marche de soutien à la junte est prévue. Ce qui n’était pas le cas au Burkina Faso. Les Burkinabè, et tout le reste de  l’armée nationale, avaient fait front commun derrière les «autorités légitimes». Le Mali d’IBK ne le voulait plus. Sa démission «poussée» tombe donc comme une aubaine. Alors, sur quelle légitimité la CEDEAO va-t-elle s’appuyer  pour «exiger» le retour du président ?

Ne serait-il pas mieux «d’accompagner» les nouveaux hommes forts du Mali vers la fin de cet état d’exception, d’autant plus qu’ils sont enclins à remettre le pouvoir aux civils ? Oui, ce serait plus productif plutôt que de s’arc-bouter sur des positions de principe qui risquent de paraître à la longue ridiculement néfastes pour le Mali blessé de toutes parts. Le Mali est déjà au bout du rouleau. Il ne faut pas l’enfoncer davantage.

 Ahmed BAMBARA

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