Pour tracer la Belgique dans les annales des demi-finales de coupe du monde, il faut remonter à 32 ans en arrière. Cette année–là, Enzo Scifo et ses camarades se sont heurtés au génie d’un certain Diego Maradona de l’Argentine.
Cette demi-finale de la 21e Coupe du monde dégageait un parfum bien particulier. Porté par les effluves d’un mixage blanc-black-beur qui les avait enivrés un soir de 12 juillet 98, les Français, au détour de matchs référents contre l’Argentine et l’Uruguay, ont remis au goût du jour, une très forte envie de célébrer les noces de porcelaine. Capitaine des Bleu, il y a 20 ans, on imagine que le sélectionneur Didier Deschamps nourrit le secret espoir de revisiter les champs Elysée dans sa veste de sélectionneur.
Ce nectar convoité par toutes les nations des différents continents, les Belges avec leur stars tels que Eden Hazard, Thibaut Courtois, Kevin De Bruyne, Vincent Company, voulaient le humer à plein poumons. Pour cela, il fallait passer par la France, un pays voisin qu’ils connaissent bien. La réciproque est tout aussi vraie, tant les joueurs de ces deux nations se fréquentent sur les pelouses d’Europe dans les différents championnats, aussi bien en opposition que sous le même maillot.
Géographiquement et culturellement très proches, la France et la Belgique ont renvoyé au continent africain, un reflet de son histoire coloniale. Si ce passé forgé dans la sueur des esclaves noirs et le sang des tirailleurs s’est dissout dans l’esprit formaté des nationalistes, il resurgie inlassablement sur les rives de l’histoire en cours, porté par ses dignes fils par la boule de cuir.
Comme s’il était écrit que l’histoire ne se fera pas sans elle, l’Afrique palie son absence du Mondial par la présence de ses fils. Hier, sur la pelouse du stade Krestovski de Saint Pétersbourg, la tête victorieuse du natif de Yaoundé, Samuel Umtiti, a retenti dans les hameaux les plus reculés du Cameroun de Kylian Mbappé et au-delà, au bord du fleuve Djoliba du Malien N’golo Kanté, dans les profondeurs de la Guinée forestière de Paul Pogba, des collines abruptes de la Martinique de Raphael Varane, des plages tropicales angolaises de Blaise Matuidi… nous vous le disions dans une de nos édito, l’Afrique n’est pas éliminée ! Elle est vengée et même en finale par… la France.
Si la clameur s’est faite entendre au coup de sifflet final hier du côté de la rive brazzavilloise du fleuve congo, ce ne fut certainement pas le cas sur sur l’autre versant de la même rive côté Kinshasa, la capitale de vénérable mémoire des rois Léopold et Baudouin. Belge par la force du canon et de la poudre, puis par adoption politico-coloniale et économique, les Congolais de la République démocratique du Congo, absents à l’appel depuis 1974, avec sa mémorable chute verticale de 9 à 0, devant la Yougoslavie (défaites 2 à 0 devant l’Ecosse et 3 à 0 face au Brésil), rêvaient d’un mondial par procuration. La charge était trop lourde pour les épaules du Belgo-congolais Romelu Lukaku, devant cette France, collectivement accomplie, inspirée par une jeunesse au talent insolent qui ont contraint les Diables rouges, bien qu’ils se soient démenés comme de beaux diables à un purgatoire de 4 ans.
Pendant que Kin-la belle s’endort dans la douleur, les champs Elysée entonnent le refrain fétiche «on est en finale, on est en finale, on est, on est en finale». Un refrain repris en cœur aussi bien dans les quartiers poto-poto d’Abidjan, sous les chaumières de Ouagadougou que les baraquements de Conakry, les cages rondes du pays Dogon où les jardins luxuriants des Antilles… Au-delà du décor et de la couleur de peau, c’est une question d’histoire. Parfois douloureux, souvent joyeux… elle s’écrit une fois de plus en blanc-black et beur…sur la planète footballistique. Ce n’est pas beau le foot ?
Hamed junior
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