Lamine Diack de l’IAAF condamné à 4 ans de prison : Calamiteux clap de fin de carrière pour un «génie»

Lamine Diack de l’IAAF condamné à 4 ans de prison : Calamiteux clap de fin de carrière pour un «génie»

Lamine Diack qui a fêté ses 87 ans le 7 juin dernier, avait comparu le lendemain 8 juin devant la 32e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris. L’ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) entre 1999 et 2015 était dans ce box pour des accusations de corruption, blanchiment en bande organisée et abus de confiance. Il risquait jusqu’à 10 ans de prison.

 Finalement l’homme, affable mais tout urbanité a pris 4 ans de prison dont 2 avec sursis et 500 mille Euros d’amende (soit 325 millions de F CFA). Bien qu’étant ressorti libre du tribunal, le  célèbre porteur de cheveux poivre de l’IAAF a été condamné pour corruption passive par le truchement de versements de pots-de-vin par des athlètes russes et le financement de la campagne pour la présidence sénégalaise.

Grand absent, son fils Papa Massata Diack, 55 ans qui a toujours clamé son innocence prend pour 5 ans ferme et 1 million d’Euros d’amende pour avoir couvert ces athlètes russes dopés entre 2011 et 2015. 6 autres personnes, parmi lesquelles 2 responsables russes ont été condamnées par contumace.

Quant à Papa Diack et fils et avec le recul et ce procès, c’est bien le naufrage d’une famille qui s’était hissé sur le toit de l’athlétisme pour mieux se remplir les poches, en feignant d’y apporter un brin «d’universalité» pour reprendre le vocable du père.

Retour sur la genèse de ce pillage de l’IAAF qui ne dit pas son nom : Alors que les Jeux olympiques de Londres se profilent, 23 athlètes russes sont soupçonnés de dopage avec l’introduction du passeport biologique. Une tâche d’encre monumentale pour le pays dirigé par Vladimir Poutine, d’autant que les Mondiaux d’athlétisme de Moscou de 2013 approchent à grands pas.

C’est aussi une menace qui pèse sur l’image de la Russie, celle-ci étant engagée dans une reconquête d’événements sportifs de grande ampleur comme le Mondial de football 2014. De son côté, la Fédération internationale d’athlétisme est dans une situation financière complexe. Valentin Balakhnitchev, président de la Fédération russe d’athlétisme et trésorier de l’IAAF, le sait bien.

Pour tenter de renflouer les caisses de l’institution et préserver l’image de la Russie et surtout permettre aux athlètes de la mer noire d’être sur les lignes de départ, ce dernier aurait proposé un marché au président de la Fédération internationale un certain Lamine Diack : en échange d’une entente sur des contrats de sponsoring et de diffusion des Mondiaux avec des entreprises russes, mais aussi de juteux pots de vin (estimés à près de 3,5 millions d’euros par la justice), l’IAAF doit retarder les sanctions contre ces athlètes.

En tout, il faut régler 23 cas, c’est à dire faire traîner 23 dossiers, avant les jeux de Londres 2012 et les championnats du monde de Moscou en 2013. Pour cela, il faut convaincre le Dr Gabriel Dollé, patron de l’anti-dopage à l’IAAF qui jouit d’une réputation d’incorruptible. Ce dernier a brandi l’ignorance et la trahison comme ligne de défense devant les juges. Et pourtant, il va céder assez facilement, aux demandes de son président et de son conseiller juridique, avocat au barreau de Paris, Me Habib Cissé. L’affaire est ralentie mais pas stoppée. D’autres grognent, mais avalent le tube à essai russe, parfois avec un peu de «liquide» pour faire passer, comme le Dr Pierre-Yves Garnier, chargé du passeport biologique, à raison de 10 000 euros ou Nick Davies, le secrétaire général adjoint de l’IAAF, pour 30 000 euros. Dollé lui se satisfera d’une enveloppe de 50 000€ pour couvrir la magouille. Somme qu’il a reconnue hier à la barre avoir reçu mais croyant que c’était des émoluments relatifs à la réussite des contrats de sponsors. Des cacahuètes au regard des sous brassés par Papa Massata Diack. Lui, c’est autre chose. Entré à l’IAAF au début des années 2000 dans l’ombre de son père-président, il ventile des millions. Rémunéré par la fédération à 1 200 dollars par jour comme consultant en marketing, l’enquête va mettre au jour un système de détournement de fonds ou plutôt de pillage de l’IAAF, si vaste qu’il est encore aujourd’hui difficile d’en estimer l’étendue.

Les événements s’accélèrent alors. Le 1er novembre 2015, Lamine Diack, président de l’IAAF, membre influent du CIO, est interpellé dans sa chambre de l’hôtel Sheraton de Roissy, son passeport confisqué, comme son ordinateur portable qui révélera bien des secrets aux enquêteurs. L’affaire est grosse, c’est un scandale international qui secouait le sport depuis un an, elle devient politico-financière. Dans son ordinateur, les enquêteurs tombent sur un mail intitulé «strictement confidentiel» de son fils Papa Massata Diack. C’est pratiquement la clé de l’affaire. Ce mail fait état du rôle que les Russes auraient joué dans les élections sénégalaises en 2010 et 2011. Le président sortant du Sénégal Wade sera battu, tout comme son fils Karim aux municipales de Dakar. Tout cela grâce à l’argent russe que Lamine Diack aurait fourni à Macky Sall. Le président sénégalais a toujours nié avoir profité des libéralités de Lamine Diack.

Depuis ce 8 juin, celui qu’on présentait comme le dirigeant sportif africain le plus influent du mouvement olympique, doit aider les juges à démêler le fil de cet écheveu, où les entrelacs entre athlétisme et politique sont si denses qu’on s’y retrouve difficilement. L’octogénaire devra éclairer en tout cas la lanterne des juges sur ce deal, qui a consisté si l’on veut résumer à un blanchiment de dopage, contre espèces sonnantes et trébuchantes, business qui aura permis d’extorquer 3,5 millions d’Euros à des athlètes russes. C’est le prix quoique puisse dire ou avancer Lamine Diack, c’est la rançon d’une compromission, car entre ses explications amphigouriques qu’il répète depuis 5 ans, qui consiste à dire qu’il a trempé les lèvres mais il n’a pas bu à savoir que des sous ont été reçus, mais pas dans le cadre de fermer les yeux sur les EPO et autres glucocorticoïdes, ingurgités par les athlètes russes entre cette crête de défense et le témoignage à charge de Gabriel Dollé et des preuves trouvées dans l’ordinateur, il faudra au célèbre dirigeant à l’éternelle chevelure blanche un véritable argument en béton pour convaincre.

C’est l’infamie donc comme clap de fin de carrière pour celui qui était qualifié de «génie» de l’athlétisme mondial, et qui avait effectivement des qualités managériales, et la vision, mais hélas qui a succombé au piège de la boulimie du pouvoir d’argent.

En nouant cette relation-sacrilège entre athlétisme et politique, il avait signé en même temps cette piteuse déchéance et c’est dommage, ce mélo-drame comme retraite pour M. Diack ! 

La REDACTION

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