Liberté de la presse en Afrique : Embellie, petits satrapes et grande prédatrice

Liberté de la presse en Afrique : Embellie, petits satrapes et grande prédatrice

Ce 3   mai 2021 est consacré comme chaque année à la Journée internationale de la liberté de la presse, et évidemment  c’est le rapport de Reporters sans frontières (RSF) qui est le référentiel pour jauger la situation des journalistes courant 2020.

 Globalement selon RSF, ça va un peu, surtout sur le continent africain car  parmi  les 180 pays classés, on a  la Namibie (23e), le Cap-Vert (25e), le Ghana (30e), l’Afrique du Sud (31e), le Burkina Faso (37e)…

Une journée dédiée à la liberté de la presse  marquée par d’énormes éclaircies dans le monde et particulièrement en Afrique de l’Ouest et australe, avec le trio Ghana-Burkina-Sénégal qui trotte en crête dans la sous-région. Il est notable que l’Afrique des années 90 et 2000 c’est-à-dire dire les années de plomb  n’a rien à voir avec celle d’aujourd’hui. Entre ces décades de nombreux confrères ont payé de leur vie pour que les choses changent positivement : Norbert Zongo tué le 13 décembre 1998 au Burkina et Deyda Hydara assassiné le 16 décembre 2004 en Gambie pour ne citer que ces 2 là sont de ces martyrs de la liberté de la presse.  

Grande embellie donc  qu’il est méritoire de souligner mais qui ne doit pas faire oublier que seule une vigilance permanente permet de garder cette situation et de l’améliorer. De par son travail, le journaliste côtoie les puissants de son pays car un journaliste, c’est sa plume, son clavier et son carnet d’adresses, or pour un éditorial critique, irrévérencieux ou pire trempé au vitriol, le «gratte-papier» ,pardon le «tape-clavier» peut se retrouver dans la ligne de mire d’un tyranneau ou satrape ou d’un faux démocrate africain.

En RD Congo les miasmes de l’ère Kabila-fils subsistent. Comment oublier le calvaire des 4 journalistes d’Iwacu au Burundi sous la férule de Pierre N’Kurunziza, jusqu’à ce que son remplaçant, militaire pourtant, le général Evariste N’Dayishimye les libère ? Au Maroc les cas de Soulaiman  Raissouini et Omar Radi n’en finissent pas de mettre en exergue la fragilité du contexte médiatique et l’exercice difficile du métier. Evidemment le Benin qui est passé de  la 96e à la 113e place entre 2019 et 2020 n’a rien à voir avec l’Erythrée ,mais on note un net recul de la liberté de presse intimement lié à la vis politique depuis l’arrivée du président Patrice Talon, laquelle vis aura valu  à  notre confrère Ignace Sossou de  croupir en prison pour un tweet sur le procureur de la République, sans oublier la fermeture de radio et les lois liberticides .

Mais il est une prédatrice pernicieuse et mortifère qui a fait des ravages dans la pratique  journalistique en 2020 : la Covid-19. Déjà que les hommes de médias vivent difficilement de leur profession bien avant l’avènement de la pandémie, on sait que c’est un véritable crève-cœur actuellement avec cette maladie. Bien avant elle, des titres ont disparu du paysage médiatique (journaux, sites web, radios…).

Fins de mois difficiles, absence ou distribution sélective de publicité, (l’Etat demeure le plus grand pourvoyeur de la pub en Afrique) tracasseries  des services fiscaux paperasseries administratives et intimidations diverses font que le journaliste est constamment exposé à la précarité. Si à un certain moment d’aucuns ont pensé que le bon journaliste est celui qui tire le diable par la queue, ce qui est d’ailleurs faux car il devient vulnérable et corruptible, n’ayons pas peur des mots, aujourd’hui les mentalités ont évolué et sans vouloir être des Crésus, les journalistes veulent pouvoir vivre de leur boulot. Hélas avec la Covid-19 la situation est devenue pire. Des médias ont fermé boutique, et ceux qui survivent le sont difficilement face à ce darwinisme pathologique. C’est dur pour les journalistes, (pas seulement eux, restaurateurs, hôteliers… crient aussi à juste raison) et Mahamoudou Ouédraogo ex-ministre de la communication disait que «La misère des journalistes crée un journalisme de misère».

Au Burkina Faso classé 5e par RSF en Afrique en matière de liberté de la presse, les journalistes essaient de faire bien leur travail.

«Ils ne sont pas au bas de l’échelle», affirme baba Hama, autre ancien ministre de la Communication (lire interview page 8)Pluralité des titres, ton critique  mais mesuré même s’il existe des médias de caniveau où d’ailleurs se trouvent souvent les meilleures recettes de communication, au Burkina donc les journalistes sont responsables quoique joignant comme des galériens les deux bouts, si fait qu’en même temps qu’il y a un perpétuel printemps de la presse en même temps ils disparaissent et paraissent au gré des quelques subsides et expédients coltinés çà et là.

In fine, les journalistes vivent leur profession comme un corsé sacerdoce avec des bouts de ficelles, mais avec le cœur à l’ouvrage. Il faut bien des gens pour faire ce travail combien ingrat mais indispensable en démocratie !

Sam Chris

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