Le 8 juin dernier, la CPI a pris le monde entier à revers en prononçant l’acquittement de JP. Bemba. Voilà que Fatou Bensouda et ses jurés viennent d’octroyer la liberté provisoire à ce poids lourd du Congo, au propre comme au figuré, (1,80 m pour 150 kg, et leader dans l’Equateur et même à Kinshasa). Une liberté provisoire assortie de conditions mais, liberté tout de même puisque le célèbre reclus de Scheveningen pourra être aux côtés de sa famille et rejoindre même la RD Congo probablement. L’intime conviction et l’absence de preuves ont-elles guidé les juges, qui passent ainsi par perte et profit les 5 000 victimes de viols, violences sexuelles, et crimes, des 1 500 hommes de l’ALC, le bras armé du MLC ?
Pourquoi en 2010, la même CPI avait basé sa condamnation en première instance, sur ces mêmes preuves, en écrouant Bemba à 18 ans ? Est-ce la lettre que Bemba avait envoyé à Ange-Félix-Patassé, l’intimant de mettre fin à ces exactions, et l’enquête interne qu’il a menée au sein de l’ALC, afin de sanctionner les fautifs, qui ont constitué des circonstances atténuantes ? Pourquoi à l’époque Ange-Félix-Patassé, exilé depuis sa chute le 15 mars 2013 dans une maison de l’OUA à Lomé n’a-t-il jamais été inquiété jusqu’à son décès lui qui avait personnellement demandé en octobre 2002 aux troupes de Bemba de lui venir en aide ? Et les généraux Yangongo et Boumbayaké respectivement ministres centrafricains de la défense et commandant de la garde présidentielle qui étaient sur le terrain des exactions, qu’en pense la CPI ?
Jean-Pierre Bemba, lui n’oubliera pas cette nuit du 24 mai 2008, où il fut alpagué à Bruxelles par une escouade de policiers pour le compte de la CPI. Comment peut-il faire preuve d’amnésie pour cette longue décennie passé dans le bagne de Scheveningen ? Il reste enfin convaincu que peu ou prou ce sont des raisons politiques qui l’ont conduit devant d’abord Luis Moreno Ocampo, puis Fatou Bensouda. Il garde en mémoire l’attaque meurtrière de sa résidence le 21 août 2006, dans l’entre-deux tours qu’il attribua à Kabila fils, sa fuite erratique ou son exil, c’est selon…
D’ailleurs a-t-il jamais accepté la victoire de son rival, qui l’avait battu de 900 000 voix ? Sans être dans la tête de l’ex-vice-président de RD Congo, il se dégage un parfum de double revanche, avec ce plus que plausible retour, sitôt, la question de subornation de témoin réglée. A moins que le fils de Jeannot Bemba Sadona, veuille se consacrer désormais à ses affaires, qui ont pris un coup, pendant son emprisonnement.
Improbable !
Notre conviction est que cet acquittement en appel et cette liberté provisoire à six mois d’une présidentielle historique et de tous les dangers, relève de tout sauf d’un hasard de calendrier. Autant on a le sentiment que son séjour à la CPI participait d’un plan de cette fameuse communauté internationale, disons, les puissants de la planète, question de l’éloigner de la RDC, autant on est habité par le même sentiment que ce come-back est éminemment politique. Face à l’entêtement bovin d’un Kabila qui veut rester au pouvoir par de multiples subterfuges, Bemba serait-il au milieu des Tshisékédi, Katumbi, Kamérhé, le joker de cette communauté internationale ? Sans doute, le chairman prendra le temps de réfléchir, mais, avec ce virus de la politique dans le corps, et vu le landerneau congolais actuel, ce serait un miracle, que l’enfant terrible de l’Equateur reste coi.
La prison lui a sans doute appris et assagi, mais, humainement et politiquement, il ne peut rêver que de revanche et la meilleure, serait qu’il s’installe au palais de la Nation. Or le chemin qui y mène, sera semé de chausses-trappes et de traquenards divers. Pourra-t-il les éviter et se couler dans la peau d’un homme d’Etat et non en chef de guerre, pour y parvenir ?
Zowenmanogo ZOUNGRANA
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