Liberté-résidence surveillée pour Gbagbo │ Et pourtant, il lui faut son kérosène : la présidentielle 2020

Liberté-résidence surveillée pour Gbagbo │ Et pourtant, il lui faut son kérosène : la présidentielle 2020

On devinait confusément que l’acquittent de Laurent Gbagbo et Blé Goudé le 15 janvier, la célérité avec laquelle le procureur a fait appel et le temps mis pour les libérer 15 jours après soit le 1er février, on devinait donc que c’était pour régler certains détails :

– en particulier, où va choir l’ex-n°1 ivoirien, sitôt la levée d’écrou effectuée ?

– va-t-il répondre présent, en cas de procès en appel à la CPI ?

– et surtout comment faire pour empêcher ou à défaut pour retarder le retour de Laurent Gbagbo à Abidjan ?

– en lame de fond, que faire pour que le célèbre prisonnier ivoirien de La Haye soit absent de la présidentielle de 2020 ?

Finalement, la Chambre d’appel de la CPI a libéré l’ancien chef d’Etat de Côte d’Ivoire, mais, en le tenant en laisse, puisque s’il peut humer l’air de la liberté hors des geôles de Scheveningen, notamment probablement en Belgique, (ce qui n’est pas le cas de Blé qui cherche toujours où poser ses pénates), s’il est libre, Gbagbo ne peut aller nulle part, perclus par des conditions imposées par la Thémis du statut de Rome.

– pas de passeport qui est remis au greffe

– obligation d’émarger hebdomadairement en justice

– sortie de la commune de residence soumise à la CPI…

– interdiction de parler du procès.

Or cette liberté-là confine à une prison, puisque la résidence surveillée bruxelloise ressemble à s’y méprendre à la prison de La Haye, les quatre (4) murs en moins et la possibilité limitée d’aller et venir en Belgique en plus. Mais tout cela n’intéresse pas le fondateur du FPI, car si Laurent Gbagbo s’est battu durant les sept (7) ans, face aux juges de la CPI, c’est pour faire éclater la vérité, se disculper, mais c’est surtout pour recouvrer la liberté et retourner chez les siens en Côte d’Ivoire. On peut tirer deux (2) leçons de cette décision de la Chambre de second degré de la CPI, qui n’est ni pain, ni mie :

1) rarement on aura vu des acquittés libérés et mis sous liberté conditionnelle, d’où la bronca des ouailles frontistes depuis Gagnoa, Yopougon et plusieurs villes ivoiriennes et pas seulement. Il n’est pas jusqu’à certains juristes à commencer par l’avocat de Gbagbo, Me Emmanuel Altit, qui n’aient trouvé ce grand écart de la CPI, écartelant !

Mal enrolé, avec 82 témoignages approximatifs et des preuves légères, le dossier Gbagbo portait en lui-même les arguments solides pour disculper l’incriminé. Instruit depuis quelques temps de procès en partialité avec les inculpations unilatérales de Noirs, avec les cas de Jean-Pierre Bemba, ayant bénéficié d’un acquittement il y a sept (7) mois, du non-lieu du président et vice-président Kenyans, la CPI est aux yeux des Africains et pas seulement ceux qui ont des problèmes avec les droits de l’homme, la CPI est aux yeux de tout ce monde un instrument judiciaire politisé anti-africain.

C’est une juridiction censément universelle qui est perçue désormais sous le prisme d’une justice des vainqueurs et une Cour pénale pour Indigènes (CPI) et le bad happening du cas Gbagbo achève de convaincre qu’il faudra non seulement revisiter le statut de Rome et obliger la CPI à mieux se pourvoir pour les dossiers à venir.

2) seconde leçon de cette libération de Gbagbo avec des pauses: elle a des relents politiques, car chacun sait que tous ces salamalecs enrôbés dans des clauses juridiques version CPI, renvoient à la présidentielle de 2020 en Côte d’Ivoire. Bien qu’une condamnation de vingt (20) ans de prison pèse sur la tête de Gbagbo pour le fric-frac de la BCEAO, un retour à moins de deux (2) ans d’une échéance aussi ouverte que risquée que cette course à la magistrature suprême augure certes de bribes de chances de réconciliation, mais surtout fait trembler beaucoup de leur carcasse, tant Gbagbo présent à cette présidentielle trouble leur quiétude. L’élargi du 1er février n’a vécu depuis son transfèrement en novembre 2011 à La Haye que pour ça. Lui, le miraculé de la rébellion de la 2002, des Accords de Marcoussis et de la pétaudière postélectorale de 2010, croit en sa baraka proverbiale, à son étoile arrimée à la Côte d’Ivoire, cette Côte d’Ivoire dont la moitié des populations au moins attend son retour. Le retour à ‘’Mana’’ et la présidentielle de 2020, voici le kérosène de Gbagbo ! Sans ce carburant, Gbagbo est désarçonné, perdu.

Cette rétention d’un potentiel et sérieux candidat d’une présidentielle, dans un pays européen notamment en Belgique, laisse subodorer des immixtions pour ne pas dire de possibles connexions entre la CPI et des politiques et c’est bien dommage. Retenir Gbagbo dans une territorialité de la CPI pour qu’il ne participe pas à la compétition de 2020 c’est remettre de probables changements positifs à plus tard, en particulier, la décrispation de la politique voire les frémissements d’une vraie réconciliation,  au risque aussi d’empirer une atmosphère ivoirienne qui s’alourdit chaque jour. La CPI mesure-t-elle aussi ce timing et cet enjeu ? 

Sam Chris

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