72 heures durant à partir d’aujourd’hui 5 avril 2023, Emmanuel Macron, le président français effectue une visite à Pékin et à Canton en Chine. Séjour nimbé d’Europe également puisqu’il est accompagné de la présidente de la Commission européenne, Ursula Von Der Leyen. Deux sujets costauds meublent l’agenda de ce déplacement : la guerre en Ukraine et les intérêts français et européens, face au coffre-fort du monde.
Sans doute, si ce voyage est programmé de longue date, l’image d’un Vladimir Poutine accueillant le 21 mars dernier Xi Jinping au Kremlin, avec solennité et grandiose, cette image a aussi boosté cette visite.
Face à Pékin conscient de son rôle, et à sa volonté de concrétiser sa Route de la Soie et surtout sachant que dans cette géopolitique de la zone indopacifique, elle demeure incontournable, la Chine agit selon ses intérêts. Or, la guerre en Ukraine est éminemment géostratégique. Elle est aux portes de l’Europe. Les 27 de l’UE l’ont d’ailleurs compris d’où ce support à bout de bras de l’Ukraine.
Si donc la France veut parler à la Chine de ses parts de marchés en recul en 2022 (1,3%) contre 1,5% en 2021, de ses 2 000 entreprises, de ses vins et spiritueux, son aéronautique et ses cosmétiques, bref, de ses placements commerciaux, la menace de la guerre en Ukraine est urgente, à telle enseigne que ce sujet seul justifie à plus de 50% ce séjour marconiste au pays de Mao Zedong. En revêtant ce costume du diplomate français et européen, Macron espère peut-être convaincre Xi Jinping de pèser de tout son poids sur Poutine, à tout le moins d’appliquer son plan. Même en sachant la proximité Poutine-Xi, Macron prend le risque calculé d’essayer d’amadouer son homologue chinois, car «la Chine est le seul pays au monde en mesure d’avoir un impact immédiat et radical sur le conflit dans un sens ou dans l’autre », a-t-on entendu du côté de l’Elysée en fin mars dernier. Macron fera-t-il mouche en Chine au sujet de la guerre en Ukraine ? Quels arguments peut-il bien utiliser pour persuader le puissant Xi Jinping ? Est-on sûr d’ailleurs que Xi peut influer le non moins puissant Poutine ? Et l’Afrique dans ce tango des pays puissants de la planète ?
C’est un déplacement que le continent doit suivre avec minutie. Si la France perd pied ces derniers temps sur le continent, elle reste une puissance qui compte dans le concert des Nations et surtout rien que la guerre en Ukraine est un sujet qui s’est «africanisé».
Depuis plusieurs mois, le prix des hydrocarbures a grimpé à la pompe, c’est la guerre en Ukraine. Idem pour le pain, c’est encore cette guerre en Ukraine. Or, les Emirats Arabes, le Koweït et la … Russie ont décidé de baisser leur production de pétrole, et du coup, le prix du baril a bondi de 6%. Ne faut-il pas s’attendre à une énième valse des prix des hydrocarbures sur le continent ?
Au-delà de ces considérations alimentaires et de services vitaux, ce qui se joue dans la zone indopacifique est quasi-planétaire que les pays africains, en particulier le Sahel, ne peuvent pas ne pas suivre avec une attention d’orfèvre. Cette partie du monde représente 75% de la population mondiale, mais en 2050, un habitant sur 2 sera Africain ! Depuis quelques années, le Sahel est un terroir géostratégique où Français, Russes, Américains et Chinois se toisent, jouent les amphitryons et essaient chacun d’être le partenaire idéal.
La Russafrique, la Chinafrique, la Françafrique… sont soit implantées, soit en embuscade ou malmenées sur le continent. Alors, ces jeux d’échec et souvent de pokers menteurs géopolitiques qui se jouent via la guerre Russie-Ukraine, et les micmacs russophones et francophones au Sahel sont la preuve que ce voyage de Macron intéresse aussi l’Afrique. C’est à l’aune des intérêts des pays puissants, que l’Afrique doit aussi se positionner pour défendre les siens, et ne pas se retrouver peut-être un siècle après les soleils des Indépendances, le bec dans l’eau .
Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
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