Mahamadou Issoufou lauréat du  Prix Mo Ibrahim : Une consécration qui tombe à pic

Mahamadou Issoufou lauréat du  Prix Mo Ibrahim : Une consécration qui tombe à pic

Mahamadou Issoufou entre dans l’Olympe des lauréats du Prix Mo  Ibrahim. Aux côtés de cinq anciens présidents africains qui ont été récompensés depuis 2007, quand le prix a été accordé pour la première fois: le Mozambicain Joaquim Chissano (2007), le Botswanais Festus Gontebanye Mogae (2008), le Capverdien Pedro De Verona Rodrigues Pires (2011), le Namibien Hifikepunye Pohamba (2014), et la Libérienne Ellen Johnson Sirleaf (2017), il a désormais un fauteuil taillé sur mesure,  aux dimensions de son parcours présidentiel exemplaire.

 Il était du reste le potentiel candidat idéal pour l’ONG du milliardaire Soudano-anglais. Et c’est tant mieux ainsi  car depuis 4 ans, le prix cherche désespérement preneur.

Transition entre les coups d’Etat et une république « normale » et démocratisée. Une gouvernance axée vers le développement d’un pays mal loti dans les rangs des plus pauvres de la planète. Des actions pour renforcer la démocratie. Et point culminant de cette construction, pas exempte de reproche, mais assez encourageante pour être assise sous le chapiteau des éloges, son renonciation à un troisième mandat.  Oui Issoufou est une enigme parmi ses homologues tourmenteurs de constitutions et pouvoiristes indécrottables. Il ose renoncer à un 3e bail et laisser aussi des chantiers en rade! Issoufou est de la race des présidents en voie d’extinction.

Sous d’autres cieux et en temps démocratiquement normal, ce n’est pas un fait extraordinaire. Lorsque la Constitution limite les mandats consécutifs à deux, on la respecte dans ses  lettres et son esprit. Mais on est sous l’ombrage tumultueux des tropiques et les Constitutions semblent être faites pour être modifiées et scarifiées à tout bout de champ et sur le chemin des intérêts privés et parfois égoïstes.

Mahamadou Issoufou a donc fait un exploit. Il apparaît comme un héros sur le toit d’une Afrique où les présidents qui quittent d’eux-mêmes le pouvoir sont une race qui est malheureusement écrite sur la liste des espèces en voie de disparition. En effet, si l’on regarde dans le rétroviseur, le président Alassane Ouattara et son homologue guinéen ont démontré qu’ils ne pesaient pas lourd le respect de la parole donnée et la sacralité de la Constitution. Et lorsque l’on jette un coup d’œil dans le pare-brise avant, sur l’horizon du futur, les velléités  avérées et latentes de lacérées la peau fragile et délicate de la sacro-sainte loi de la limitation des mandats présidentielles se laissent pressentir.

Pourtant, le prix Mo Ibrahim est une sacrée rente qui devrait tout de même attirer la convoitise des présidents en fin de bail constitutionnel. 5 millions de dollars pour le prix initial et un salaire annuel à vie de 200 000 dollars ! Rien que ça ! C’est vrai que ce n’est pas grand-chose comparativement aux soutes dorées d’un palais présidentiel africain. Mais c’est mieux qu’une chute brutale et douloureuse du piédestal présidentiel, doublée d’une humiliation à vie et générationnelle, voire pire… Alors, messieurs les chefs d’Etat, un «tiens un prix Mo Ibrahim » est nettement préférable à un hypothétique «demain, tu auras ton troisième mandat» aux évolutions imprévisibles. Pensez-y donc !

Ahmed BAMBARA

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