La dent de Paul Kagamé contre l’ancien chef d’état-major général Kayumba Nyamwasa est féroce. Le nom de ce dernier figure dans la liste des personnes contre qui des mandats d’arrêt internationaux viennent d’être lancés par la justice de Kigali. Il s’agit des membres du P5, un rassemblement de partis d’opposition qui demandent à s’asseoir à la table du dialogue avec le président rwandais.
Qu’est-ce qui peut expliquer cette fronde judiciaire contre notamment celui qui a échappé à un attentat contre sa personne en 2010 et qui a finalement trouvé refuge en Afrique du Sud ? Officiellement, il est question d’une préparation de rébellion dans les tréfonds de la République démocratique du Congo, en vue évidemment et nécessairement de porter un coup traître au Rwanda.
Pendant donc que ces opposants appellent au dialogue, ils seraient également en train de comploter pour soulever de son piédestal l’homme fort de Kigali ! C’est une bien piètre technique de la part des membres du P5 si cela s’avérait.
Toutefois, l’on ne peut s’empêcher de se poser des questions sur la fébrilité du gouvernement rwandais. Paul Kagamé vient à peine d’être réélu. Qui plus est, avec une marge confortable qui lui met d’espérer «régner» sur son pays dans les parages de l’année 2030. Les voyants sont au vert, même si les défenseurs des droits de l’homme grognent et trépignent, ainsi que les chantres de la démocratie, qui ne le regardent pas du tout avec un œil très favorable.
Dans ce cas de figure, un homme politique ne devrait pas craindre ou s’en faire pour des opposants, qui sont d’ailleurs établis à des kilomètres de leur pays. Même si en bon tacticien, il sait qu’il vaut mieux taper sur un bout d’écorce dans l’eau plutôt que de se faire surprendre par les crocs acérés d’un crocodile affamé.
Dans tous les cas, c’est une patate chaude qu’il a lancée entre les mains de Cyril Ramaphosa, le président sud-africain, à qui il a été enjoint de «faciliter» l’arrestation du général Kayumba Nyamwasa. Ou alors, faut-il voir dans cette salve de mandats d’arrêt internationaux, l’expression d’une possible rancune de Kagamé après la désolidarisation de Ramaphosa dans l’affaire de la «réprobation» de l’Union africaine contre la victoire de Félix Tshisekedi en RDC ? Ceci expliquerait-il «tout» cela ?
Ahmed BAMBARA
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