Pour ceux qui connaissent la ténacité, l’esprit de défi, l’équidistance du «qu’en dira-t-on» d’Alpha Condé, pour cette catégorie de personnes, le doute même hyperbolique n’est plus de mise, après sa sortie à RFI et sur France 24 : le président guinéen fera son référendum constitutionnel et son parti, le RPG et le conglomérat arc-en-cl’adouberont pour un 3e bail. Et pourtant, l’intéressé se refuse à lâcher le morceau. Il louvoie, botte en touche…
En Guinée-Conakry, le président Alpha Condé ne veut pas appeler le chat par son nom. Pourtant, lui et une bonne partie de son peuple connaissent bien l’appellation du petit félin. Le président veut jouer à cache-cache. Mais le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) n’a pas le cœur à l’ouvrage. Il préfère jeter la couverture du jeu et affronter son vis-à-vis à visage. Et le chœur de bronca qui s’élève contre ce «coup d’Etat constitutionnel» se fait plus bruyant, plus risqué aussi.
Car qu’est-ce qui pourrait bien se cacher dans cette Constitution qu’il veut tant modifier avant la fin de son mandat, qu’il prend le soin d’emballer dans un référendum qu’il fait agripper à des élections législatives ? Si ce n’est que cette modification constitutionnelle a pris les traits d’un beau sandwich dans lequel est cachée une pilule qui risque d’être amère pour ceux qui veulent une alternance à la tête de la Guinée Equatoriale. En fait, au lieu d’une pilule, il s’agit d’un gros boa que l’opposant historique, oint par 2 fois par la loi des isoloirs veut faire avaler à ses compatriotes.
Une tactique de louvoiement, l’évitement qui ne colle pas trop à la peau de l’ancien opposant frondeur, prêt à risquer sa vie pour «la cause du peuple» et offrant sa poitrine et ses poignets aux bracelets de la police. En ce temps-là, Alpha Condé n’usait pas de ruse de mauvais alois. Son verbe n’était pas alambiqué, encore moins ses convictions. C’était le professeur-opposant !
C’est bien là la preuve que soit, le pouvoir a fait quelques aménagements chez lui ou alors qu’il avait déjà ancrée en lui cette nature qui le pousse aujourd’hui à montrer ce visage à la face au monde et de ses compatriotes.
Sauf qu’en face de lui, les Guinéens ne semblent pas vouloir se laisser faire. Ce troisième mandat qui se refuse à clamer son nom haut et fort ne passe pas et le forcing que tente le pouvoir de Conakry a de fortes chances de faire plus de mal que de bien. Entre trêves mortuaires pour inhumer les morts constitutionnels, écouter des personnalités religieuses, le FNDC est reparti de plus bel pour guerroyer contre ce désir de pouvoir jusqu’à la lie.
Oui bien sûr des pays ont modifié leur constitution, des présidents ont charcuté leur Loi fondamentale pour demeurer au pouvoir. Mais est-ce des exemples à suivre, cher professeur, vous qui, il y a 15 ans, prônez d’octroyer l’immunité judiciaire et des moyens conséquents aux partisans du pouvoir éternel, afin qu’ils partent tranquilles, en venez à prendre ce mauvais pli !
Quel chantier n’avez-vous pas pu réaliser en 10 ans qu’il faille vous ajouter ce bonus de 5 ans pour le terminer ?
La manifestation appelée par le FNDC ce 12 février ne semble pas avoir tenu ses promesses, puisque les Guinéens, à Conakry, sont restés chez eux. Les incidents n’ont pas été notés. Toutefois, cette sorte de ville morte peut être aussi considérée comme une victoire pour le FNDC. Les commerces n’ont pas tourné et c’est bien une autre forme de manifestation. A l’évidence, une tempête se prépare sous le ciel de cette force de la nature. C’est une loi presque non écrite, au pays du Silly, périodes pré et post-électorales se conjuguent avec violences et morts. Il n’appartient qu’à Alpha Condé d’éviter à son pays d’être contusionné inutilement.
Ahmed BAMBARA
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