Manifestations anti-Béchir au Soudan : Les émeutiers du pain plus inquiétants que la CPI ?

Manifestations anti-Béchir au Soudan : Les émeutiers du pain plus inquiétants que la CPI ?

Il n’y a rien de plus galvanisant pour un homme que lorsqu’il n’a plus rien à perdre. Surtout s’il est pourchassé par le spectre de la famine ! C’est certainement la situation dans laquelle se trouvent les Soudanais. Empêtrée dans les ronces que le régime de Omar El-Béchir a engraissées, la population voit l’horizon de son bien-être bouché. Le Soudan a perdu sa fraîcheur. Une bonne partie de son corps est amputée. Le moignon qui reste ressemble à une croute aride où ne veut plus pousser pour servir d’ombrage aux habitants asséchés par le soleil de la mauvaise gouvernance.

Le Soudan du Sud s’est envolé avec le puits du pétrole lorsqu’il a pris le ticket de l’indépendance. De sorte que le reste du territoire ressemble à un organisme parcouru de veines et d’artères mais qui ne sont plus irriguées par le cœur rempli de pétrole et qui bat désormais sous les pieds de Salva-Kiir et compagnie.

Face donc à la pauvreté et à la carence de l’offre de salut du régime d’Omar El-Béchir, les Soudanais ont commencé à manifester leur ras-le-bol et exhumé leur volonté que les tenants actuels du pouvoir cèdent la place à d’autres personnes, qui pourraient peut-être offrir de meilleures perspectives à leurs enfants. Et c’est dans cette paupérisation galopante qu’Omar El Béchir a trouvé le moyen d’augmenter le prix du pain. Une erreur.

Mais El-Béchir ne l’entend certainement pas de cette oreille et a déchaîné depuis le 24 décembre, date du début de cette déferlante grève du pain au Soudan, les forces de la répression qui s’abattent avec une dureté mordante sur le dos des manifestants. Ces manifestants qui ont osé huer le présidentiel à Al-Gazira et qui démontrent par là le peu de respect et de considération qu’ils ont désormais ce pouvoir dont ils appellent à tue-tête la chute. C’est un sacrilège, et surtout une menace qui semble plus dissuasive que la CPI.

Sous la férule du mandat d’arrêt international lancé par la Cour pénale internationale, le Président soudanais avait joué à l’effronté et à l’impertinent. Les griffes menaçantes d’une arrestation ne l’avaient pas empêché de prendre des avions et de voyager comme bon lui semblait, narguant les procureurs exacerbés de la juridiction internationale qui crèche à La Haye. La CPI a essuyé avec Omar El-Béchir l’une de ses plus cuisantes humiliations. Une infantilisation de son autorité et de sa légitimité qui avait fait grincer des dents  à certains Ets membres et fait sourire du côté du présidentiel soudanais. En effet, accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité au Darfour, le dictateur soudanais a été le premier chef d’Etat en exercice poursuivi par la CPI. De pirouettes en ruses, aidé par les multiples procès en partialité de cette juridiction supranationale, Béchir avait fini par défier allègrement la CPI.

Mais avec ces manifestations qui réclament purement et simplement sa chute, le président soudanais semble avoir trouvé une chaussure à sa pointure. Cette menaçante-là semble bien plus sérieuse qu’un mandat d’arrêt de la CPI et pourrait apparemment bien plus lui faire un grand tort.

Car, il suffirait que les manifestants arrivent à accéder au palais présidentiel ou alors que son socle, sa base, à savoir les forces armées le désavouent pour que s’ouvre devant Omar El-Béchir, les escaliers qui mènent à la fournaise de l’après-pouvoir. Dans cette anti-chambre-là, pour sûr, il ferait moins le fier devant le mandat d’arrêt de la CPI. Mais on n’en est pas encore là, car la garde prétorienne du tyran a quitté la frontière et certains recoins du Soudan pour venir le protéger. Jusqu’à quand ? car aucune protection ne peut rien contre le peuple . 

Ahmed BAMBARA

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