Manifestations post-électorales de l’Opposition au Niger : Mahamane Ousmane veut-il la situation de 1993 ?

Manifestations post-électorales de l’Opposition au Niger : Mahamane Ousmane veut-il la situation de 1993 ?

Mahamane Ousmane, candidat du RDR Tchanji rejette les résultats globaux provisoires de l’élection présidentielle qui le créditent de 44,25% des suffrages. Il conteste donc l’élection de Mohamed Bazoum, candidat du parti au pouvoir, le PNDS-Tarraya qui remporte ladite élection avec 55,75%, selon les chiffres proclamés par la commission électorale.

 Tout en dénonçant un ‘’hold-up électoral’’, il revendique la victoire avec 50,3% des voix, et ce, malgré les félicités et la main tendue du candidat déclaré vainqueur «pour créer un nouveau climat entre le pouvoir et l’opposition, mettre fin aux tensions inutiles…». Pis, ses partisans ne se sont pas fait prier pour descendre dans les rues de Niamey, la capitale nigérienne et d’autres villes du pays comme Zinder, son fief, ou Dosso pour manifester leur colère en érigeant des barricades, brûlant des pneus ou encore pillant des commerces tout en défiant les forces de l’ordre. On est vraiment saisi au cœur et à l’estomac en voyant ce genre de scènes à l’issue d’une élection que les observateurs électoraux, de la CEN-SAD à l’OIF en passant par l’association ‘’Tournons la page’’, ont reconnu être tenue à la régulière, hormis l’attentat meurtrier de Dargol et sous réserve de la proclamation définitive des résultats par les Sages de la Cour constitutionnelle.

A l’analyse des résultats dans certaines localités, l’on voit que le candidat du PNDS a fait, par exemple, le plein de voix à Tahoua, fief de son mentor Mahamadou Issoufou, le président sortant. Ce qui relève de la logique électorale alors que Mahamane Ousmane évoque de nombreuses irrégularités dans cette zone. Certes, le candidat de l’opposition dit se réserver le droit d’exercer des recours en annulation dans ces zones tout en promettant d’utiliser tous les moyens légaux pour revendiquer sa victoire. Ce qui est salutaire. Mais, sa démarche manque d’élégance en contestant les résultats provisoires de la sorte et n’appelant pas ses partisans au calme et à la retenue, il ne fait qu’apporter de l’eau au moulin de ceux qui soutiennent qu’il joue au mauvais perdant dans une élection dont l’organisation a été mieux appréciée par la communauté internationale que celles tenues en Guinée ou en Côte d’Ivoire.  Alors, Mahamane Ousmane, est-il en train de déployer une stratégie afin de contraindre le candidat déclaré vainqueur, Mohamed Bazoum à lui faire des offres ? Ou veut-il le contraindre à un gouvernement d’union nationale dans lequel il sera partie prenante ? Ou veut-il jouer sur la carte de la déstabilisation du pays ? L’interpellation de l’ancien chef d’Etat-major des Forces armées nigériennes sous le président Tandja, Moumouni Boureima dit «Tchanga», proche de l’opposant Hama Amadou renforce en tout cas les doutes. Toujours est-il qu’aucune de ces stratégies n’est à l’honneur ni de l’opposant ni du Niger qui est à un tournant symbolique de son histoire politique. En effet, le pays est à un doigt de réussir un exploit démocratique qu’il faut s’efforcer de ne pas vendanger les efforts fournis par le président sortant, Mahamadou Issoufou qui avait fait la sourde oreille aux sirènes des courtisans l’appelant à un troisième parce que voulant rentrer dans l’histoire, par la grande porte, en opérant une passation de pouvoir d’un civil à un autre démocratiquement élu. Chose que le Niger n’a jamais réussi à faire depuis soixante ans.

Par ailleurs, même si Mahamane Ousmane arrivait à être proclamé comme le vainqueur de cette présidentielle par la Cour constitutionnelle, comment comptera-t-il gouverner quand on sait que le PNDS-Tarraya de Mohamed Bazoum est majoritaire dans les conseils municipaux et hyper majoritaire à l’Assemblée nationale avec les alliés ? Ou veut-il la même situation de 1993 où il avait remporté la présidentielle mais s’était retrouvé minoritaire au parlement si fait que ses projets de loi étaient constamment recalés par les députés ? Une situation de blocage qui avait abouti au coup d’Etat de Ibrahim Baré Maïnassara en janvier 1996.

 

Idrissa TRAORE

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