Gagner honnêtement sa vie et refuser de mendier. C’est ce qui différencie des autres, ces personnes atteintes d’handicap regroupées au sein de l’Association des handicapés pour la promotion de l’artisanat (AHPA), à Ouagadougou. Afin de connaître leur quotidien, nous avons rencontré ces personnes qui ont dû travailler pour gagner honnêtement leur vie, au lieu de mendier, en fabriquant des jouets éducatifs, des objets d’ornement, des tabourets etc. C’était le mercredi 14 février 2018.
14 février, fête de la Saint-Valentin, fête des amoureux. Pendant que certains cherchent à comment dépenser leur argent pour faire plaisir à l’élue de leur cœur, d’autres défavorisés physiquement par la nature, ne cherchent qu’à survivre, tout en se disant qu’être handicapés n’est pas une fatalité. Eux, ce sont les membres de l’Association des handicapés pour la promotion de l’artisanat (AHPA). Ils ont refusé de s’asseoir à un coin de rue, à un carrefour, ou se promener pour mendier, et ont décidé de gagner honnêtement leur vie, en travaillant, malgré leur handicap. Diminués physiquement, la plupart des membres de ladite association ont perdu l’usage de leurs membres inférieurs dès le bas âge, à cause de la poliomyélite. Si la maladie a eu raison d’eux depuis tout-petits, une fois devenus grands, ils ont le mental assez fort pour essayer, tant bien que mal, de s’intégrer dans la vie, cela en contribuant au développement de l’économie, grâce à l’artisanat, une activité qui leur permet d’être indépendants comme le souligne le président de l’association, Séni Sawadogo. Six jours sur sept dans la semaine, soit du lundi au samedi, ces artisans handicapés fabriquent des jouets éducatifs, des objets d’ornement, des tabourets etc. qu’ils mettent sur le marché de l’art ou qu’ils exposent lors des foires.
L’union fait la force
Il y a un adage qui dit que : «L’union fait la force» ; ces passionnés de l’art l’ont compris et afin de mettre la chance de leur côté pour percer dans un milieu exigeant tel que l’art, ils ont décidé de se regrouper en association, d’où la création de l’Association des handicapés pour la promotion de l’artisanat (AHPA). Pour Samuel Kéré, c’est également un moyen de lutter contre la mendicité, car «mendier ne fait pas honneur à un handicapé», souligne-t-il. Il estime également que travailler est une manière de lutter contre la maladie qui les a diminués physiquement, c’est-à-dire la poliomyélite.Cet avis est partagé par un autre membre, Oumarou Zéba, qui a invité les handicapés qui ont fait de la mendicité leur métier à quitter les carrefours et à rejoindre l’association pour qu’ensemble, ils puissent lutter contre la poliomyélite. Et à Saïdou Konaté de rassurer en faisant comprendre que pour intégrer l’association, la volonté de travailler suffit pour être accepté.
Il faut rappeler que le siège de l’AHPA est situé à la zone 1, non loin du maquis «Zama Bar». Ce qui attire l’attention quand on pose les pieds à l’entrée du siège, c’est l’ambiance qui y règne. En effet, chacun avec un outil en main, soit pour couper, soit pour siller, soit encore pour polir ou graver, dessiner des figures sur des tableaux, des tabourets etc. L’on cause, se taquine et rit. Pour Samuel Kéré, cette ambiance permet d’établir une fraternité entre les membres de l’association. Mais, on sait que là où se regroupent deux ou plusieurs personnes, les dissensions, les avis contraires ne sont pas loin. Alors pour éviter toute mésentente pouvant aboutir à des clashs comme le diront certains, la règle est toute simple comme nous le confie Samuel Kéré : «Quand il s’agit d’une commande reçue, au nom de l’association, les membres travaillent de concert à livrer les produits aux clients ; en ce moment, le gain est partagé de façon égale entre les membres», explique-t-il. A côté, chaque membre est libre de vendre ses produits à qui il veut et empocher seul le bénéfice, car il s’agit ici d’un travail personnel, a confié l’artiste.
Ils sont contre la mendicité
Il faut dire que tous les membres de l’association sont contre la mendicité. S’ils ont décidé de travailler, à l’inverse d’autres, c’est justement pour éviter de mendier comme le confirme Oumarou Zéba. Il déclare à cet effet : «C’est le travail qui fait l’homme et mendier ne donne pas une bonne image des handicapés». Saïdou Konaté pense que nombreux sont ceux qui profitent de leur handicap pour mendier, alors qu’ils pouvaient travailler mieux que des citoyens en pleine santé physique. Pour lui, le fait de s’être regroupés en association pour travailler au quotidien est un bel exemple pour ceux qui n’ont toujours pas compris qu’il faut travailler, même si on est handicapé. Tout comme Oumarou Zéba, il a invité les mendiants à se retirer des carrefours, pour prendre leur destin en main. Le même appel a été lancé par le président Séni Sawadogo, qui a affirmé que : «Le handicap n’est pas dans les membres, mais dans la tête». Il estime que travailler donne du respect à l’homme, même étant handicapé.
Larissa KABORE
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