Même du temps où il était le maître absolu du Burkina Faso, Blaise Compaoré était rare en paroles. Ses interviews avec la presse nationale se comptent sur le bout des doigts, et face à certaines situations (crise ivoirienne, marches de populations, mutineries de soldats) il met du temps avant de parler, ou fait pérorer un de ses fidèles lieutenants. Le silence était aussi une arme de l’ancien deus ex machina politique du Burkina. C’était aussi reconnaissant-le une qualité de chef. La parole d’un dirigeant n’est-elle pas sacrée ? Il s’exprime donc avec parcimonie.
Alors lorsqu’en ces temps troubles que vit le pays (massacres de Solhan (132 tués), Foubé (11 tués), axe Gorgadji-Arbinda (80 victimes), il rompt l’omerta dans lequel, il s’était claquemuré pour présenter ses condoléances aux familles meurtries, parler sécurité et péril au Burkina, par un épistolaire authentifié par Eddie Komboïgo, président du CDP le parti de Blaise et bien d’autres personnes, c’est un évènement à double titre :
1) Cette missive datée du 27 août dernier se veut être celle d’abord d’un ancien chef d’Etat qui a dirigé le Burkina, et qui est chagriné de voir les populations victimes d’attaques meurtrières sans fin. Compassion aux familles de civils et militaires endeuillées et invite à l’unité. S’unir ou périr telle est la quintessence de cette correspondance de l’illustre exilé burkinabè d’Abidjan.
Pour Blaise toutes les compétences doivent se donner la main pour combattre ces ennemis de l’ombre. Peu ou prou, il sait de quoi il parle, car à un certain moment, il a été le négociateur ou médiateur dans la libération d’otages retenus par des terroristes. Il a offert le gîte et le couvert à certains djihadistes à Ouagadougou, bref c’est un sujet qu’il connait un peu.
Militaire d’ailleurs, il sait que si c’était dans une guerre symétrique, peut-être que les FDS burkinabè auraient eu le dessus,
mais face à cette bataille schizophrénique, seuls l’unité, la solidarité, le nivellement des égos, foi de Blaise peuvent laisser espérer une victoire face à ceux qui massacrent à tue-tête.
2) Mais en même temps, l’ex-locataire de Kosyam n’est pas dupe, il sait que son nom circule sous le manteau à propos de ces attaques : que ce sont des Burkinabè révoltés, que ce sont des sicaires du régime déchu qui seraient à la base de ces massacres, si ce n’est d’ex-RSP qui ont rejoint le «maquis désertique» … bref que ce serait donc lui Blaise qui serait à la baguette de ces attaques.
D’ailleurs, ce n’est pas une première, il y a 3 ans, il avait dû encore se fendre d’une sortie pour s’en laver les mains, lorsque le pouvoir actuel avait pointé un doigt accusateur sur lui. Second dédouanement donc de Blaise au sujet de ces attaques interminables contre le Burkina. Pour tout dire, Blaise veut montrer que tout le monde peut être à Damas (être dans l’ignorance) sauf lui. Il entend ces murmures et ces non-dits tacites qui le désignent comme l’éminence grise de ces attaques. Et c’est encore trop : il n’en est rien.
La présente correspondance autant qu’elle aiguillonne le peuple burkinabè, vise à dédouaner son auteur. Non, ce n’est pas moi Blaise qui fait attaquer le Burkina. Et il ne faut d’ailleurs pas être un Paul Ricœur (philosophe des interprétations) pour comprendre qu’il ne peut pas être le cerveau de ces massacres, et inviter les populations à s’armer davantage contre ce péril en la demeure. La dialectique d’une chose et son contraire !
Un message à double détente que cette correspondance de condoléances de conseil en guerre et de démenti à toutes les rumeurs et autres infos prétendument de source A, sur son implication dans ces tueries de masse.
La REDACTION
COMMENTAIRES