Modification du Code électoral : Des leaders d’OSC et de  partis politiques apprécient

Modification du Code électoral : Des leaders d’OSC et de  partis politiques apprécient

Le mardi 25 août 2020, les députés, à 107 voix ont adopté le projet de loi portant modification de la loi n°014-2001/an du 03 juillet 2001 portant code électoral, lors de la 3e session parlementaire extraordinaire de l’année 2020. 24 heures après l’adoption de ce projet de loi qui a suscité un débat controversé au sein de l’hémicycle, nous avons rencontré des leaders d’Organisations de la société civile (OSC) et de partis politiques dans le but de recueillir leurs avis.

Augustin Loada, président du Mouvement patriotique pour le salut (MPS)

Ma première observation porte sur le momentum de cette réforme électorale. C’est l’une des rares fois, sinon la première fois que des amendements aussi substantiels sont portés à notre code électoral à moins de six mois du scrutin. Comme vous le savez, le Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel de la CEDEAO de 2001 interdit dans son article 2 alinéa 1 de réformer la loi électorale de manière substantielle sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques, dans les six mois précédant les élections. J’observe que dans la pratique, le consentement dans le cas d’espèce a concerné surtout les fameux trois «baobabs» politiques du Burkina, un cartel de partis politiques qui dirige notre pays depuis plus de 25 ans et qui fonctionne par cooptation. Si vous n’êtes pas considéré comme un baobab et si aucun de ces baobabs ne vous a coopté pour servir de faire valoir, votre voix ne compte pas, que vous soyez dans la majorité ou dans l’opposition. Ce cartel de partis a un point commun : chacun pense qu’il peut remporter l’élection présidentielle et la majorité des sièges de l’Assemblée nationale. C’est pourquoi, ces baobabs se sont entendus pour que les élections se tiennent coûte que coûte, vaille que vaille avec le silence complice de la CENI. Cette obsession des élections a occulté les vrais problèmes qui se posent sur le terrain, à savoir que le gouvernement ne contrôle pas certaines parties de notre territoire national et que la tenue du scrutin dans ces zones est incertaine. Au lieu de poser ouvertement les termes du débat pour qu’il y ait une discussion et un consensus national sur ce qu’il convient de faire, le cartel de partis a préféré s’entendre sur un artifice juridique permettant de valider les résultats du scrutin même si une proportion significative de Burkinabè est privée du vote du fait de l’insécurité. Pour ne pas perdre notre temps dans un débat verrouillé d’avance, nous, nous avons opté de prendre acte de cette réforme qui reflète l’hypocrisie et les connivences de notre classe politique.

Nous pensons cependant que la réforme électorale adoptée mardi dernier est l’aveu d’un échec politique flagrant, celui de l’incapacité du gouvernement à sécuriser notre territoire. Le gouvernement ne veut pas le reconnaître, la CENI ne veut pas non plus le reconnaître officiellement. Comme les baobabs de l’opposition se voient déjà à Kosyam, eux aussi font comme si la situation est sous contrôle alors qu’ils savent que ce n’est pas le cas. C’est cela la politique de l’autruche. Tôt ou tard, on finit par être rattrapé par la réalité du terrain. La vraie question qui se pose maintenant, c’est de savoir comment vont réagir les Burkinabè qui auront été exclus de facto au lendemain du scrutin. Si on se retrouve devant des milliers d’électeurs exclus, le pouvoir aura à gérer une contestation d’autant plus légitime que sa propre légitimité est finissante et que celle du pouvoir issu d’élections calamiteuses est douteuse.

Je pense que les députés qui ont eu le courage de voter contre ou de s’abstenir ont pris date avec l’histoire ! On se souviendra qu’ils ont pris des positions plus conformes à l’idéal démocratique et républicain !

Pascal Zaïda, coordonnateur national du Cadre d’expression démocratique (CED)

Le vote de ce code électoral répond à un besoin d’ordre national. Dans l’ancien code, la question sécuritaire posait un sérieux problème. Il fallait qu’il y ait un large consensus  de la classe politique, ce qui a été fait. L’opposition et la majorité se sont accordées, ce qui répond aux dispositions de la CEDEAO qui veut qu’à six mois des élections, il faut un consensus pour toucher au code électoral. Il faut saluer la volonté des politiques d’aller à ce consensus. Un point important à relever dans ce code électoral modifié, c’est qu’en cas de force majeure, à l’issue d’un rapport émis par la CENI, le président du Faso, le premier ministre peuvent saisir le Conseil constitutionnel pour éventuellement décider du sort d’une localité. Si un cas pareil se présentait, nous espérons que le consensus va également prévaloir. Nous espérons que la majorité ne va pas utiliser cette loi à son avantage. Je m’explique. Elle peut décider d’invalider les résultats d’une localité si elle se rend compte que les résultats dans cette localité ne sont pas en sa faveur. Cela peut être source de crise et nous n’en voulons pas au Burkina Faso. Il faut mettre l’intérêt de la nation au-dessus des intérêts personnels. La satisfaction se trouve aussi au niveau de l’article 68 qui avait interdit la couverture médiatique des activités politiques. De 90 jours, c’est revenu à 30  jours et nous pensons que c’est raisonnable. Nous saluons l’adoption de ce code électoral.

Abraham Badolo, président de l’Alliance pour la défense de la patrie (ADP)

Nous avons tous suivi l’adoption du code électoral modifié. Beaucoup ont salué son adoption. Mais nous, nous nous posons des questions. Il y a des zones d’ombre que nous ne maîtrisons pas. Les gens se sont fait enrôler, l’élection aura lieu. Ce qui pose problème c’est le fait qu’on dise que des citoyens dans des zones en crise, ne pourront pas prendre part aux votes. Cela nous amène à nous poser beaucoup de questions. En tant qu’OSC, nous suivons les choses avec grande attention et nous espérons que les politiques vont travailler à plus nous éclairer davantage sur ces nouvelles dispositions qui ont été introduites dans le code électoral.

Massourou Guiro, porte-parole du Mouvement plus rien ne sera comme avant (MPRESCA)

Le projet de loi a été adopté, nous l’avons tous suivi. Je voudrais féliciter les députés qui ont voté pour. Si le projet de loi n’avait pas été adopté, il serait difficile d’aller aux élections et s’il n’y a pas d’élections, on aura échoué face aux terroristes. Ç’aurait été d’ailleurs une honte pour la Nation burkinabè. Allez aux élections c’est montrer aux terroristes qu’on n’a pas abdiqué. Les députés qui ont refusé de voter pour, sous prétexte que le pays n’est pas sécurisé ont tort. Si on ne va pas aux élections, ce serait la honte à nous tous. C’est la honte aux députés qui ont refusé de voter pour, car ils ne connaissent pas l’enjeu réel des terroristes. Que celui qui ne peut pas se battre quitte la scène politique. Nous avons besoin de politiciens compétents, qui peuvent travailler pour que la paix revienne au pays. Nous ne pouvons plus reculer, nous ne pouvons qu’avancer.

Aziz Dabo, secrétaire exécutif adjoint et porte-parole de la Nouvelle alliance du Faso (NAFA)

J’avoue par principe être peu satisfait que nous soyons toujours dans la modification des textes à la dernière minute et cela interpelle toute la classe politique qui doit corriger cela.

Je comprends la volonté de la classe politique qui, de manière consensuelle, a voulu éviter le vide juridique constitutionnel qui aurait pu plonger notre pays dans des lendemains incertains en votant le code électoral.

Si des innovations ont été apportées prenant en compte la situation de la pandémie de la Covid-19, il faut néanmoins reconnaître que jusque-là, certaines questions n’ont pu trouver de réponses satisfaisantes.

S’il est vrai que ce code révisé apporte une légalité quant au vote dans les localités qui, au vu de la situation sécuritaire délétère de notre pays pourraient être touchées, la question de la légitimité des futurs représentants du peuple pourrait être sujet à polémique.

Nous nous exposons à ce que des localités entières ne se reconnaissent pas forcément dans leurs représentants.

D’où ma compréhension aussi de ceux qui estiment qu’une frange de la population serait exclue des prochaines échéances.

Le couplage de la campagne législatives-présidentielle est une meilleure option car elle permet aux candidats d’avoir les mêmes durées de campagne de ce fait, ils mettent plus de chance chacun de leur côté.

Mon souhait le plus ardent est que la classe politique poursuive les concertations et le dialogue pour des élections apaisées, transparentes, inclusives, démocrates dont les résultats seront acceptés de tous.

 Le gouvernement doit travailler à relever le défi de la sécurisation  des élections qui reste jusque-là la question la plus importante.

Je souhaite bonne chance aux candidats .Que Dieu bénisse le Burkina Faso

La rédaction

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