Il a soigné le mal par le mal. Le Ghana était un eldorado des coups d’Etat et des putschs. Jeremiah John Rawlings a utilisé ce moyen en 1979. La remise du pouvoir aux civils n’a pas été une bonne idée. L’idée de la démocratie n’était pas encore arrivée à maturité. Il revient alors en 1981, par le même truchement, pour cette fois, tracer les lignes directrices du multipartisme, du pluralisme et de la démocratie avec ses compatriotes.
Puis, il cède le pouvoir aux civils. Depuis lors, la fleur de l’alternance ne fait que s’épanouir au Ghana. Son économie s’en est trouvée boostée et aujourd’hui, l’ancienne Gold Coast est assise confortablement dans le fauteuil des pays de l’Afrique de l’Ouest qui ont le vent en poupe. Stabilité politique, cohésion sociale, élections apaisées, transparentes et aux résultats respectés, grandes leçons de démocratie enseignées et diffusées aux autres pays de la sous-région. Si c’est Kwamé N’krumah qui a mis le Ghana sur orbite, c’est bien le Flight captain qui l’a construit.
Au soir de 73 ans, Jerry Rawlings ne pourrait se reprocher que quelques bévues çà et là. Des hommes politiques fusillés sur le chemin de la construction de la démocratie et la volonté alliée à la détermination d’asseoir une nation aux veines gonflées par le sang de la bonne gouvernance et débarrassée du virus des putschs.
Il pourrait aussi se reprocher cette entrée ratée de sa femme en politique, à travers notamment sa tentative de se hisser à la tête du pays. Mais cela ne doit pas être vécu comme un échec, puisque les règles implacables de la démocratie, cette démocratie qu’il a aidée à vagir sur les chaumes d’Accra, ont été appliquées à l’offre politique faite par sa moitié. La femme de Rawlings n’est pas Rawlings !
Au Ghana, l’ancien président ghanéen va recueillir les hommages mérités de la part de ses concitoyens. En Afrique de l’Ouest, il le devrait aussi. Et plus particulièrement au Burkina Faso. Rawlings est un grand ami de ce pays. Amitié forgée dans les liens qu’il a tissés avec le capitaine Thomas Sankara. Il n’est un secret pour personne que les deux hommes ont eu de grandes affinités, forgées dans les grandes idées qu’ils se faisaient de l’Afrique et des projets communs qu’ils nourrissaient pour leur continent.
Malheureusement, ces projets ont été sans doute éculés par la mort brutale de l’éloquent officier burkinabè, une perte que Rawlings a avoué avoir vécue douloureusement. Ce qui a sans doute expliqué son implication sans réserve dans le projet d’érection d’un monument en mémoire et en mémoire de son grand ami au Conseil de l’Entente.
Jerry Rawlings est donc mort ! Une perte sans nom. Un départ aussi qui sonne les cloches de l’appréhension et des incertitudes pour le futur présent et à venir du Ghana. On a la faiblesse de croire que les Ghanéens sont aujourd’hui assez mûrs pour comprendre la nécessité de maintenir éloignées de leur pays, les sirènes des coups d’Etat et des coups de force aux relents militaires au sommet de l’Etat. Qu’ils sont assez mâtures pour continuer à arroser les plantes si encore vulnérables de la démocratie, de la culture de l’alternance et de la tolérance électorale. Les Ghanéens doivent continuer à souffler sur cette flamme qui fait avancer la locomotive du développement de leur pays.
Que les présidents élus respectent les échéances constitutionnelles. Pas de tentation du troisième mandat. Pas de spectre de la fraude électorale. Pas de virus de la mal gouvernance et de la gabegie. Pas d’envie débridée et morbide de fouler aux pieds les droits humains. Bref. Pas de velléité de ternir l’image et de galvauder l’héritage de Jerry Rawlings. C’est la seule façon de lui souhaiter «Rest in peace» !
Ahmed BAMBARA
COMMENTAIRES
Pourquoi ne datez-vous pas convenablement vos articles ? Cela cause de la confusion.
En effet, au jour du 20 janvier 2023, aujourd’hui, la situation économique du Ghana est CATASTROPHIQUE alors que la Côte-d’Ivoire se porte fort bien.