Une commission électorale qui s’excuse auprès des électeurs pour les 24 heures de retard accusées dans la proclamation des résultats, un président sortant qui rempile avec 3 points d’écart avec son principal challenger, loin des scores mobutuesques, ces deux faits à eux sont suffisamment rares sous nos cieux pour ne pas être soulignés. Et c’est encore le Ghana qui depuis les années 2000, administre ces preuves de la solidité de sa démocratie qui vient de confirmer que cette réputation n’est pas surfaite, loin s’en faut !
Ce 3e match Akufo-Dramani a connu donc son épilogue hier 9 décembre sur le coup de 18 heures, avec 51,59% attribuée au champion du NPP et 47,36% pour Mahama Dramani selon les résultats provisoires de l’administration électorale. Une présidentielle qui a pris des allures de revanche, surtout pour les militants du NDC qui ont cru au grand soir puisque les premières tendances lourdes étaient en faveur de leur mentor. Victoire dans un mouchoir de poche, mais victoire tout de même pour l’avocat, le fils d’un ancien président des années 70, qui à 76 ans, entame un second mandat, qui ne sera pas une sinécure, au contraire, sa courte avance sur Mahama Dramani, prouve que le duel était corsé. Du reste, lorsqu’on regarde la carte électorale du Ghana, il est vrai que le NPP a effectué le grand chelem dans ses fiefs habituels comme au Nord dans la Volta et l’Est du pays, mais l’opposition a fait des percées dans certains bastions du NPP, taillant dans les croupières du parti présidentiel au Centre, et même un peu au Nord.
En 2016, Akufo avait battu le même Dramani avec 53,83% des voix, et si un mandat après en 2020, ce score s’est rétrécit, c’est que l’opposant historique a gagné en crédibilité, et le président sortant a déçu une partie de son électorat, lequel s’est donc érodé. 1 électeur sur 2 ne l’a pas voté, c’est un signal fort ! Alors la question principielle et basique est donc de savoir que va faire Akufo-Addo de ce 2nd et ultime mandat ?
Consolider certes des acquis tels que les lycées gratuits, et l’accès à l’éducation au grand nombre, la poursuite de l’industrialisation bref redresser la soutenabilité (moins de 8% d’inflation) maintenue depuis plus de 2 décennies par l’or, le cacao et maintenant le pétrole, laquelle embellie économique a été taillardée par la Covid-19.
Mais s’il est un terrain où le réélu est attendu par ses citoyens jeunes pour la plupart, la moitié de la population ayant moins de 35 ans, si donc Akufo est attendu, c’est dans le domaine de l’employabilité, avec un taux de chômage qui a connu une hausse.
Son 1er mandat qui s’achève draine également un parfum de corruption dont la démission du procureur anti-corruption a mis en exergue. Celui qui restera assis dans le fauteuil du palais de Flagstaff House pour les 4 prochaines années est souvent aussi accusé de népotisme, avec l’incursion de membres de sa famille dans la sphère du pouvoir, sans oublier la menace terroriste qui est… au Burkina, donc aux portes du Ghana, qu’il faudra circonscrire.
A 76 ans, Akufo-Addo s’octroie donc une seconde chance pour affiner ou terminer certains grands chantiers restés en rade. Il a intérêt même à rectifier certains tirs, si d’emblée, au parlement le NPP n’obtenait pas la majorité des 275 sièges. On le constate, c’est une réélection qui est loin d’être un chèque en blanc pour celui dont les partisans comparent un peu abusivement à l’Osagyefo, Kwame N’Krumah. Peut-être, mais pour ce faire, Akufo-Addo devra être les 4 années qui viennent, un grand capitaine très manœuvrier sur les eaux tumultueuses de la Volta River.
Zowenmanogo ZOUNGRANA
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