Ossature de la Charte de la Transition au Mali : La CEDEAO tiraillée entre pragmatisme, juridisme et casuistique

Ossature de la Charte de la Transition au Mali : La CEDEAO tiraillée entre pragmatisme, juridisme et casuistique

Pari tenu, ou plutôt ultimatum quasi respecté pour la junte malienne, qui aura réussi en l’espace de 3 jours à ébaucher les grands traits de la Transition et dans les temps exigés par la CEDEAO, dont l’injonction n’était pas moins que d’accoucher d’un président civil et d’un premier ministre civil avant le 15 septembre.

18 mois de Transition avec un président civil ou militaire, un vice-président qui aura des pouvoirs grandioses, un conseil national de Transition, organe législatif fort de 121 membres, et un gouvernement de 25 titulaires, voici le portrait de la locomotive de ce futur pouvoir intérimaire.

Après 3 jours de concertations nationales au centre international de conférences de Bamako qui ont pris les allures de défouloir, mais où la junte était à la baguette en dépit de la présence de presque tous les concernés (à part la CMA), les Maliens ont dessiné les lignes de ceux qu’ils veulent comme dirigeants provisoires et organes intérimaires.

Des choix chahutés, mais qui dans l’ensemble ont reçu l’imprimatur des participants dont nombreux sont ceux qui subodorent une junte assez rouée pour manœuvrer et garder la réalité du pouvoir, mais ces soupçonneux n’ignorent pas que c’est le moindre mal.

La parole est maintenant à la CEDEAO, qui devra arbitrer et trancher tout en tenant compte certes des impondérables, de ses propres textes à elle, de l’existant socio-politico-militaire au Mali, et des perspectives pour ce pays.

12 mois, pas un jour de plus, un président civil, et un retour dans les casernes qui ne dit pas son nom, tels étaient les oukases de la CEDEAO qui ont donné le 15 septembre comme deadline.

Et si le 57e sommet de l’organisation tenu à Niamey n’a pas levé les sanctions et a même accentué la pression sur la junte de faire vite, le sommet d’Accra du 15 septembre qui sera présidé par le nouveau président en exercice, le Ghanéen Nana Akufo-Addo doit décider ce qu’elle fera du Mali et cela autour d’un triptyque :

1) Pragmatisme : ce sont les putschistes qui ont le pouvoir, ils ont pu le faire facilement grâce au travail de sape du M5-RFP très représentatif du peuple malien, même si les partisans de l’imam Dicko rejettent à mots à peine couverts cette charte, les militaires ont montré des signes de bonne volonté (libération d’IBK, concertations nationales …) et ils semblent ne pas si bouchés et comprennent que même un coup d’Etat «salutaire» reste un putsch, et il faudra bien donc rendre le pouvoir aux civils. La CEDEAO peut-elle balayer ces réalités d’un revers de la main, et s’accrocher à son sacro-saint principe protocole qui prohibe les coups d’Etat ?

2) Juridisme : l’article 2 dudit protocole n’admet aucunement un changement de pouvoir autre que par les urnes. Exit les putschs, les pantalonnades constitutionnelles et autres «ruecratie». Mais il faudra faire jurisprudence.

Cependant, le constat est là: IBK dont le pouvoir estropié par le M5-RFP est tombé devant les militaires de Kati, et la CEDEAO, malgré des tentatives de sauver le soldat IBK n’a pas réussi, toutes choses qui montrent que ces clauses juridiques sont inefficaces, d’autant que l’envoi d’un corps expéditionnaire de la CEDEAO est inenvisageable, IBK ayant démissionné. Les textes sont souvent impuissants face à la réalité du terrain.

3) Casuistique : on ne fait pas de la politique avec de la morale, mais on ne la fait pas sans .

La CEDEAO doit faire siens ces propos de Malraux et même avoir une perspective machiavélienne, c’est-à-dire la modernité politique africaine chevillée au corps.

A Accra donc, que ce soit le nom d’Assimi Goïta, du général Mahamane Touré qui sortent du chapeau de la junte pour être président ou vice-président ou un autre, l’essentiel pour la CEDEAO, est le déroulé  de cette Transition. L’exemple burkinabè doit forcément inspirer, même si les situations sont différentes.

Parvenir à réconcilier les Maliens avec eux-mêmes, éviter au Mali le sort d’Etat failli, remettre debout le pays qui est sur cale, depuis des années, qu’importe celui qui le pourra qu’il soit en tenue kaki, en costume ou en boubou amidonné ! La CEDEAO ne devrait pas perdre tout cela de vue.

La REDACTION

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